ERRATUM, le 19 février 2021 : La plainte initiale comprenait 37 chefs, et l’intimé a été acquitté sur trois d’entre eux. Cependant, la plaignante avait retiré le chef 23 par la suite, ce qui nous avait échappé. La mention du retrait apparaissait au paragraphe 348 de la décision. Toutes nos excuses.

Le 24 septembre dernier, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière a déclaré Paul-André Bélisle (certificat no 102 214) coupable de 34 des 37 chefs de la plainte disciplinaire. L’intimé, qui se représentait seul, connaitra la sanction à la suite d’une prochaine audience.

L’intimé a participé, par visioconférence, aux huit journées d’audition qui ont lieu en mai 2018, mais il était cependant absent lors de l’audition tenue en septembre 2018. L’enquêtrice au dossier et plusieurs clients ont témoigné. L’intimé est inscrit comme représentant en assurance de personnes depuis 1977.

Les gestes à l’origine de la plainte ont eu lieu de décembre 2013 à juillet 2015, envers des clients de Trois-Rivières, Shawinigan, Sorel-Tracy, Québec, Montréal, Victoriaville, Laval, Repentigny et Drummondville, envers 13 clients.

Six infractions pénales

Les infractions découlent de sa condamnation par la Cour du Québec, le 28 avril 2017 à Trois-Rivières, de six infractions pénales. Comme indiqué au chef 1, l’intimé a aidé Claude Martineau à agir comme représentant en assurance de personnes auprès de six clients, alors que ce dernier n’était plus titulaire d’un certificat délivré par l’Autorité des marchés financiers. L’intimé a ainsi contrevenu à l’article 149.1 du Code des professions. Il avait reconnu sa culpabilité devant le tribunal, tout comme M. Martineau.

À 78 reprises sur une période de 18 mois, l’intimé a versé une rémunération, des émoluments ou autres avantages à M. Martineau, même si ce dernier n’était pas un représentant (chef 2). Ces gestes contreviennent à l’article 37 du Code de déontologie de la Chambre.

Par ailleurs, l’intimé a contrevenu à l’article 35 du Code à 12 reprises. Il a signé à titre de témoin la proposition d’assurance alors qu’il n’était pas en présence du client (8 chefs). De plus, il a permis à M. Martineau de conseiller le client en matière d’assurance alors qu’il ne détenait pas de certificats l’y autorisant (4 chefs).

L’intimé a contrevenu à l’article 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants en ne recueillant pas personnellement tous les renseignements et en ne procédant pas à l’analyse complète et conforme des besoins financiers de ses clients (17 chefs).

M. Bélisle est déclaré coupable d’une dérogation à l’article 26 du Code de déontologie de la Chambre pour n’avoir pas respecté la confidentialité du dossier de son client en divulguant des renseignements sur les polices détenues par ce consommateur à Claude Martineau (un chef).

Enfin, l’intimé a contrevenu à l’article 13 du Code en ne s’acquittant pas de son mandat en omettant d’obtenir et de fournir les renseignements requis par son client quant aux conséquences d’un transfert de fonds distincts (un chef).

Le comité prononce la suspension conditionnelle des procédures à l’égard de toutes les autres dispositions alléguées au soutien des divers chefs. L’intimé a été acquitté sur trois chefs, et le comité a aussi déclaré l’intimé non coupable de certaines dispositions alléguées dans neuf des chefs, tout en le déclarant coupable pour d’autres. La décision du comité, qui compte 737 paragraphes, est longue de 123 pages.

Certificats échus

Claude Martineau a cessé d’exercer dans les disciplines suivantes à divers moments : en assurance de personnes en septembre 2013, en assurance collective de personnes en aout 2004, en planification financière en aout 2002 et en courtage en épargne collective en septembre 2009.

M. Martineau était rémunéré selon un taux horaire de 100 $ par l’intimé, et a touché 50 728,21 $ pour ses services. Sur différents chèques émis par l’intimé, la mention « honoraires planification testamentaire » apparaissait.

Les clients qui sont venus témoigner ont confirmé avoir eu M. Martineau comme représentant, dont certains qui disaient le connaitre depuis plusieurs décennies. L’un deux mentionne avoir rencontré l’intimé une seule fois, et celui-ci n’a fait que lui remettre sa carte professionnelle.

Un autre consommateur a indiqué avoir eu M. Bélisle comme représentant. Il a été joint par M. Martineau en février 2015 et ce dernier a prétendu qu’il travaillait avec l’intimé. Ce client a porté plainte à l’Autorité après avoir reçu un mauvais conseil de la part de M. Martineau.

Témoins de l’intimé

M. Bélisle a lui aussi soumis une preuve et a notamment interrogé Laurent Larivière, premier enquêteur au dossier au bureau du syndic de la Chambre et désormais retraité. Ce dernier a nié avoir arrêté l’enregistrement lors des entrevues qu’il a eues avec l’intimé, ajoutant que si tel a été le cas, c’était après en avoir discuté avec les procureurs de l’intimé qui étaient présents lors des entrevues.

Claude Martineau a aussi été interrogé par l’intimé. Il a confirmé avoir rencontré M. Bélisle à la fin de 2013 au bureau de MSA quand l’intimé a repris ses dossiers, car il n’avait plus le droit d’agir à titre de représentant. Il a tenté d’expliquer le contexte des différents points soulevés par les clients lors des interrogatoires menés par la plaignante. Il a confirmé avoir vendu des livres destinés à la planification successorale aux clients de l’intimé et avoir continué de le faire après mai 2015, alors qu’il ne travaillait plus avec M. Bélisle.

L’intimé a aussi fait témoigner certains clients et d’autres professionnels reliés à La Financière MSA ou à la compagnie d’assurance Équitable.

Par la suite, l’intimé a demandé une remise à l’automne en indiquant avoir des problèmes de santé. Quelque six jours avant la reprise de l’audition en septembre 2018, il a demandé une nouvelle remise, en utilisant les mêmes papiers qu’en mai. La requête a été refusée. Seule l’avocate de la plaignante a plaidé à la conclusion de l’audition sur culpabilité.

Analyse et motifs

À propos du chef 1, le comité a déterminé que la décision du tribunal déclarant l’intimé coupable avait un lien avec l’exercice de la profession exercée par l’intimé, à savoir un représentant en assurance de personnes. « Cette violation de la Loi sur la distribution de la part de l’intimé démontre un manque évident d’honnêteté, de sincérité et de probité qu’on devrait normalement s’attendre d’un représentant en assurance de personnes comme l’intimé », lit-on au paragraphe 381 de la décision.

Quant au chef 2, le comité estime que la preuve contredit la prétention de M. Martineau lorsqu’il affirme que la somme de plus de 80 000 $ lui a été versée pour des services purement administratifs exécutés dans les dossiers de ses anciens clients pour l’avantage de l’intimé.

Pas d’entrave

La preuve était insuffisante pour déclarer l’intimé coupable des accusations mentionnées aux chefs 20 et 21. Quant au chef 37 (entrave au travail de l’enquêteur), la plaignante n’a pu établir que les pièces transmises par l’intimé concernant certains clients étaient fausses et que M. Bélisle le savait. Même si la plaignante avait pu fournir cette preuve, le comité est d’avis que la remise de ces pièces ne constituait pas ipso facto une infraction au sens des dispositions alléguées dans la plainte.

L’intimé a collaboré à la demande générale de l’enquêteur et lui a transmis tous les dossiers demandés. Les pièces en question étaient des lettres ayant été confectionnées à la demande de l’Autorité dans le contexte du litige pénal.

« La seule façon pour le représentant d’éviter de commettre une entrave serait qu’il fasse une déclaration à l’enquêteur au sujet des lettres avant même qu’on l’interroge à ce sujet. » Une telle interprétation de l’intention du législateur serait déraisonnable et non fondée, estime le comité, ajoutant que l’obligation de collaborer avec le syndic ne va pas aussi loin que le prétend la plaignante.