À la lumière de ses récentes rencontres avec des régulateurs, Invesco Canada se prépare à l’abolition des commissions intégrées. Elle lance des outils pour soutenir les conseillers dans cette transition.

Lors d’une visite au bureau du Journal de l’assurance, le PDG d’Invesco Canada, Peter Intraligi, s’est montré peu optimiste quant à l’avenir des commissions intégrées. Il affirme que les conseillers doivent se préparer à « un monde sans commissions ».

La compagnie de fonds a prévu le coup et multiplie les initiatives pour accommoder ses conseillers grâce à des produits peu couteux, qui demeureront accessibles à tous leurs clients… même dans l’enveloppe d’un compte de gestion à honoraires.

Invesco Canada se félicite de s’être lancé en 2009 dans l’aventure des fonds négociés en bourse avec ses Powershares, ébranlant un marché jusque-là limité aux iShares de Blackrock. Elle devançait alors de peu son rival banquier BMO dans ce qui devait devenir une ruée, puis en rajoutait un an plus tard avec des Powershares sous forme de fonds communs.

La technologie pour réduire les couts

Invesco a récidivé en 2016 en lançant une plateforme qui permet de négocier des fonds communs à plus faible cout, sous la forme de Platform Traded Funds (PTF). Les fonds s’échangent comme des titres boursiers, mais sans être soumis aux fluctuations des cours, leur valeur nette n’étant connue qu’à la fin de la journée. Le tout sans passer par la couteuse plateforme Fundserv.

Bientôt, Invesco prévoit importer un robot-conseiller de ses activités américaines, pour permettre à ses conseillers de servir à un cout modique ses clients à faible valeur nette élevée. S’il est bien de se préparer, les dirigeants d’Invesco disent toutefois que l’abolition n’est pas souhaitable, car elle affectera tous les Canadiens.

Accompagné de Jason MacKay, vice-président principal directeur des ventes nationales, et d’Alain Huard, vice-président et directeur régional des ventes au Québec, M. Intraligi se prépare, abolition ou non. Il a rappelé que le transfert vers la gestion à honoraires s’intensifie aux États-Unis, où 80 % à 90 % des actifs sont gérés en vertu de comptes à honoraires. Au Canada, la percée de ce mode de rémunération demeure modeste chez les cabinets en épargne collective, mais gagne en vitesse au sein des firmes de courtage en valeurs mobilières. « Dans le réseau de l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (MFDA), la proportion d’actifs sous gestion à honoraires n’est que de 5 %. Chez les firmes de courtage en valeurs mobilières, elle atteint de 30 % à 50 % selon les cabinets », souligne M. Intraligi.

Sa dernière rencontre avec l’Ontario Securities Commission (OSC) laisse planer une fin probable des commissions intégrées. « Lorsque vous prenez en compte ce que les régulateurs regardent, vous vous attendez à devoir passer à 100 % vers la gestion à honoraires », a-t-il lancé. Les membres du MFDA auront selon lui « une très grosse transition à faire », si le régulateur décide d’abolir les commissions.

La pression sur les régulateurs canadiens est forte : vent mondial de transparence et de traitement équitable du client; chasse aux conflits d’intérêts, rehaussement des obligations des conseillers. Aux États-Unis, seule la gestion à honoraires est admise pour les « 401 k », du nom d’un règlement qui régit des régimes semblables aux REER collectifs et fonds de pension canadiens. Cette règle ne pèse pas encore sur les comptes non enregistrés (open accounts).

La Securities Exchange Commission (SEC) requiert les honoraires dans un souci de transparence et pour favoriser l’intérêt du client, ont expliqué les dirigeants d’Invesco Canada. « Plusieurs se demandent si la même exigence arrivera ici à nos REER, dit M. McKay. Comme les régulateurs canadiens ont dit au printemps 2016 qu’ils exigeraient de la transparence, des cabinets d’épargnes collectives ont décidé d’offrir des comptes de retraite à honoraires. »

La consultation sur l’opportunité d’abolir les commissions doit se terminer le 9 juin 2017. Selon l’Autorité des marchés financiers, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) prendront leur décision cette année ou au plus tard en 2018 quant à la l’abolition des commissions intégrées.