Ce n’est pas que son nom et son image que Fondation Kaleido a changés à l’automne 2019. C’est aussi sa capacité à prendre des risques qu’elle a rehaussée.
Née sous la marque Universitas en 1964, Fondation Kaleido compte laisser derrière elle la controverse semée par les assouplissements aux régimes enregistrés d’épargne études (REEE) collectifs, apportés par tous les fournisseurs de ce type de produit au Canada.
Isabelle Grenier, PDG de Fondation Kaleido, explique que le changement que vit son entreprise vise à refléter la multiplicité des services de l’entreprise, mais aussi les différents parcours scolaires et projets que ses bourses permettent de réaliser. D’où la référence au kaléidoscope.
Ce ne sont pas les tumultes vécus en 2017 qui ont incité l’entreprise à changer de nom. La réflexion avait cours depuis un bon moment pour créer une image moins élitiste et qui ratissait plus large, a révélé Mme Grenier en entrevue au Portail de l’assurance.
Avec Universitas, les gens faisaient le lien avec l’université, ajoute-t-elle. Or, le fournisseur de REEE offre des programmes qui permettent de remettre des bourses à un étudiant qui n’y va pas et qui décroche un diplôme d’une autre institution scolaire. De plus, la fondation voulait réaffirmer son approche d’entourer la famille et contribuer à ce que chaque enfant puisse atteindre son plein potentiel, quelques soit son cheminement scolaire.
« En 2017, il y a eu les plus récents assouplissements, qui ont permis à encore plus d’enfants de bénéficier des bourses. En 2018, nous avons commencé à offrir des programmes complémentaires comme Tremplin », ajoute Mme Grenier. Ce programme permet à une famille d’avoir en main une banque de six heures pour consulter un spécialiste en éducation ou obtenir du coaching parental aux parents d’enfants de la naissance à 12 ans.
« Notre mission d’épargne-études demeure fondamentale. Toutefois, nous ne sommes plus une institution financière traditionnelle. Le nom Universitas ne traduisait pas cette évolution », dit Mme Grenier.
Plus de risques pour plus de rendements
Du même coup, Kaleido a voulu stimuler la croissance des bourses dorénavant distribuée à plus d’enfants en raison des récents assouplissements. Mme Grenier a révélé avoir obtenu en décembre 2019 une dispense de l’Autorité des marchés financiers, lui permettant de prendre plus de risques de placements dans ses trois régimes enregistrés d’épargne études.
Outre les titres conservateurs auxquels elle recoure habituellement, Kaleido Croissance (anciennement Gestion Universitas) peut maintenant investir l’actif des trois REEE en obligations émises et garanties par le gouvernement des États-Unis, en obligations corporatives, en titres adossés à des créances hypothécaires garanties, en actions canadiennes et américaines et en parts indicielles.
Plus de rendement signifie aussi plus de risques, rappelle la PDG de Kaleido. L’institution dit par ailleurs continuer d’offrir sa garantie de remboursement à 100 % de l’épargne et d’un montant équivalant aux frais de souscription à l'échéance dans un REEE collectif.
« Nous avons demandé la dispense dans l’optique d’aller chercher des rendements additionnels, dit Mme Grenier. Avoir plus de catégories d’actifs nous donne cette possibilité, mais aussi plus de protection. L’argent des investisseurs est garanti à 100 % : notre prospectus émis en décembre étend cette protection aux nouvelles catégories d’actifs. »
Pour leur part, les sommes qui constituent les paiements d’aide aux études qui seront éventuellement versés aux bénéficiaires des REEE sont investies de la même manière que les cotisations des souscripteurs de REEE, explique Mme Grenier. Ces paiements correspondent aux revenus sur le capital accumulé et aux subventions gouvernementales.
Kaleido n’en est pas à ses premières armes en investissement boursier, rappelle sa PDG. « Nous plaçons les cotisations des souscripteurs dans des obligations gouvernementales. Depuis 2000, nous pouvons réinvestir leurs intérêts dans des actions canadiennes. Maintenant, nous pouvons aussi investir dans des actions américaines et des parts indicielles.
En ce qui touche les cotisations des investisseurs, l’élargissement réglementaire permet de les investir dans une nouvelle gamme de titres à revenu fixe, dont des titres adossés à des créances hypothécaires garanties et des obligations corporatives. Mme Grenier précise que ces titres doivent porter la cote BBB ou plus, décernée par une agence de notation reconnue.
La PDG de Kaleido affirme que des titres de cette qualité demeurent des investissements prudents, dont la protection est équivalente à celle des autres titres à revenu fixe dans lesquels les cotisations sont investies. « Dans l’ensemble des nouvelles catégories d’actifs accessibles, nous sommes très confiants. Nos scénarios montrent une forte probabilité d’obtenir des rendements accrus. »
Tourner la page sur la controverse des assouplissements
Après un vote des souscripteurs de REEE de Kaleido favorable aux assouplissements en octobre 2017 dans ses deux REEE collectifs, une controverse éclate et mène à un nouveau vote en 2018. Ses résultats sont favorables aux assouplissements, mais dans une moins large mesure que le vote précédent.
Les assouplissements ont amené la fondation à partager les mêmes sommes accumulées dans ses REEE collectifs avec un plus grand nombre de bénéficiaires (attrition moindre). Ce qui était resté en travers de la gorge de plusieurs souscripteurs : si plus de bénéficiaires peuvent désormais toucher des bourses, il reste en revanche moins de bourses pour ceux des anciens régimes. Le second vote sera rapidement suivi d’une annonce de compensation financière. Des miettes, disent plusieurs souscripteurs mécontents.
Mme Grenier dit vouloir tourner la page sur cette controverse et refuse de lui en attribuer la cause du changement de nom. « Notre but n’était pas de faire oublier Universitas. Il n’est pas question d’oublier un passé de 55 ans dont nous sommes très fiers. »
Chiffres à l’appui, elle insiste plutôt sur le fait que Kaleido a versé plus de paiements d’aide aux études en 2018 qu’en 2017. « Nous avons versé 23 millions de dollars (M$) de subvention et ses revenus de plus en 2018 qu’en 2017, soit 30 M$ plutôt que 7 M$. Nous avons versé 10 M$ de plus en revenus sur cotisation, soit 23 M$ plutôt que 13 M$. Cela fait donc un versement total en paiements d’aide aux études de 53 M$ alors qu’en 2017, avant l’assouplissement, nous avions versé 20 M$. Cela représente 33 M$ de plus », affirme Mme Grenier.
Selon les calculs de Kaleido, cette augmentation représente plus de quatre fois plus de subventions et ses revenus. Tous paiements d’aide aux études confondus, soit les revenus sur cotisations et subventions et ses revenus, l’augmentation double, ajoute Mme Grenier. Elle rappelle aussi avoir indemnisé les souscripteurs qui ont subi des pertes admissibles d’un montant de 1,5 M$.
Elle consent que les REEE collectifs ont vu leurs règles d’admissibilité s’assouplir. Toutes les fondations l’ont fait à travers le Canada. L’effet de l’attrition a diminué dans tous ces produits. Mais la PDG de Kaleido plaide pour ce changement de cap.
« Le Plan Universitas demeure géré par Kaleido Croissance, mais n’est plus distribué aux clients. REEEFLEX devient donc notre produit phare dans le créneau collectif. L’argent s’y regroupe et profite de la force du nombre. Il y a moins d’attrition, c’est certain. Toutes les sommes accumulées sont redistribuées à un plus grand nombre de bénéficiaires », dit-elle.
D’un autre côté, ces assouplissements ont éliminé des critères restrictifs, fait valoir Mme Grenier. « Peu importe l’âge de l’enfant au moment de la souscription du REEE collectif, il entre dans une cohorte qui demeure en vigueur pendant en moyenne une période de 12 à 17 ans. »
De plus, l’accès aux subventions gouvernementales est maintenant garanti. « Avant, nous devions les retourner aux gouvernements, lorsqu’un bénéficiaire ne se qualifiait pas pour le deuxième ou le troisième paiement d’aide aux études, explique Mme Grenier. C’est pourquoi en 2018 nous avons été en mesure de verser à nos bénéficiaires 10 M$ de plus qu’en 2017, paiements d’aide aux études et subventions confondus. »