Déposé le 4 novembre dernier par le ministre des Finances du Canada, François-Philippe Champagne, le budget 2025-2026 comprend diverses annonces touchant l’industrie de l’assurance.
Concernant la révision statutaire de la Loi sur les banques, qui devait avoir lieu en 2023, puis en 2025, son report à 2026 avait été annoncé dans la mise à jour économique de décembre 2024 faite par la ministre Chrystia Freeland sous le gouvernement de Justin Trudeau.
À l’annexe cinq du récent budget, le ministre Champagne renouvelle jusqu’au 30 juin 2033 les dispositions de temporisation pour la Loi sur les banques, de même que celle touchant les sociétés d’assurance et celle sur les sociétés de fiducie et de prêt.
L’Association des courtiers d’assurance du Canada (ACAC) surveille ce dossier de manière attentive, car les dispositions actuelles empêchent les banques de vendre de l’assurance directement dans leurs succursales. Une telle autorisation réduirait la protection des consommateurs, selon l’ACAC.
Cette interdiction fait partie des activités de lobbying de l’ACAC sur la colline parlementaire à Ottawa. Le président de l’Association, Peter Braid, précise que l’organisme entend surveiller toute modification réglementaire touchant la Loi sur les banques qui pourrait survenir d’ici là.
Séisme majeur
En page 227, le gouvernement de Mark Carney affirme qu’il désire accroître la résilience du secteur de l’assurance face aux catastrophes naturelles, notamment s’il survenait un tremblement de terre majeur. Le vice-président aux affaires fédérales au Bureau d’assurance du Canada (BAC), Liam McGuinty, a salué cette annonce.
Le BAC rappelle qu’un séisme majeur au large des côtes de la Colombie-Britannique ou au Québec pourrait causer des pertes économiques de plusieurs dizaines de milliards de dollars, ce qui menacerait l’économie du pays dans son ensemble.
« Le Canada est le seul pays du G7 présentant un risque sismique important qui ne dispose pas d’un filet de sécurité financière officiel soutenu par le gouvernement pour l’assurance contre les tremblements de terre », indique M. McGuinty.
L’ACAC a également souligné cette annonce dans sa réaction au budget. « L’engagement du gouvernement à collaborer avec le secteur des assurances sur cette question contribuera à préserver notre économie », indique l’Association.
Équité fiscale
Plusieurs mesures annoncées visent à préserver l’intégrité du régime fiscal. « Pour empêcher les assureurs canadiens présents à l’échelle internationale d’utiliser une filiale étrangère pour éviter de payer de l’impôt sur leurs activités d’assurances au Canada, le budget de 2025 propose de modifier la Loi de l’impôt sur le revenu afin de préciser que le revenu tiré d’actifs détenus par une filiale étrangère d’une société d’assurances canadienne pour couvrir des risques d’assurance canadiens est imposable au Canada », peut-on lire en page 251 du budget.
Certains contribuables sont d’avis que cette règle particulière du régime du revenu étranger accumulé tiré de biens (REATB) ne s’applique pas aux revenus de placement provenant de ce type d’actif, précise-t-on dans le budget en page 407. Le gouvernement propose de préciser que ces revenus de placements doivent être inclus dans le REATB. La mesure serait appliquée dans les années d’imposition qui commencent après le jour du budget.
Le programme national d’assurance contre les inondations n’apparaît nulle part dans l’énoncé budgétaire. Le terme « inondations » apparaît à différents endroits, notamment lorsqu’il est question du renouvellement du Système national d’alertes au public, de la modernisation du Service météorologique du Canada (SMC) ou de la cartographie des inondations survenues dans les réserves autochtones.
Assurance de soins dentaires
Le gouvernement promet de protéger le programme de soins dentaires, dont profiteraient cinq millions de Canadiens, selon l’estimation publiée en page 28 du budget.
Pour le régime de services dentaires offerts aux retraités de la fonction publique fédérale, au lieu de deux années de service, le gouvernement entend prolonger à six le nombre d’années de service requis pour y être admissible.
Médicaments
Du côté de l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC), où l’on espère des économies de 15 % sur trois ans, il est mentionné en page 351 que le Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés (CEPMB) « modernisera ses audiences en tirant parti des technologies existantes, ce qui favorisera des processus procéduraux plus rapides et moins coûteux ».
Au sein de l’Association canadienne du médicament générique (ACMG) et de Biosimilaires Canada, on accueille favorablement les mesures de soutien en sciences de la vie et en production, notamment la réduction du taux effectif marginal d’imposition, l’amortissement immédiat et accéléré des investissements en capital ainsi que l’amélioration des incitatifs fiscaux pour la recherche et le développement (R&D).
Selon Jim Keon, président des deux organismes, le budget n’octroie pas de ressources suffisantes à Santé Canada pour traiter le nombre croissant de demandes de médicaments génériques et biosimilaires. Il y en aurait 500 en cours d’examen, dont plus d’une centaine « accusent un retard ».
Au rythme actuel, il faudra des années pour augmenter la cadence et éliminer le retard accumulé. L’examen est financé par un mécanisme de recouvrement des coûts et l’industrie assume 75 % des dépenses, indique l’ACMG.
« Chauffeur inc. »
La classification erronée des employés commise délibérément par un employeur est un problème décrié dans l’industrie du camionnage, où le recours « aux entrepreneurs indépendants » comme chauffeur des véhicules a pris de l’ampleur ces dernières années. Les employeurs évitent ainsi de payer les sommes prévues aux régimes publics de retraite et à l’assurance-emploi, ce qui leur confère un net avantage concurrentiel.
Pour sévir contre les employeurs qui ne classent pas les employés dans la bonne catégorie, le budget de 2025 prévoit accorder à l’Agence du revenu du Canada (ARC) des ressources évaluées à 77 millions de dollars (M$) sur quatre ans, à compter de 2026-2027. L’ARC pourra transmettre de l’information à Emploi et Développement social Canada dans le but de lutter contre la classification erronée des travailleurs.
Le moratoire sur la déclaration des honoraires de service dans l’industrie du camionnage est aussi levé. Le ministre Champagne avait déjà annoncé son intention à cet égard le 30 octobre dernier. L’Association du camionnage du Québec (ACQ) félicite le gouvernement fédéral pour cette annonce et presse le gouvernement du Québec d’intensifier ses efforts pour contrer le système du « Chauffeur inc. ».
De nombreux accidents mortels sont survenus ces dernières années impliquant des véhicules lourds exploités par des sociétés utilisant le stratagème « Chauffeur inc. ». L’ACQ demande le retour le plus rapide des contrôleurs routiers sur les routes du Québec.
Concurrence bancaire
De nombreux changements touchent néanmoins la Loi sur les banques dans le récent budget fédéral. Le gouvernement annonce son intention de proposer un plan dans la prochaine année pour « créer un système financier plus concurrentiel et novateur ».
Ottawa veut notamment accroître la concurrence dans le secteur bancaire. Plusieurs des mesures suggérées concernent principalement la transparence des frais imposés aux consommateurs par les institutions financières.
Un règlement afférent à Loi sur les banques sera soumis pour veiller « à ce que les canaux de distribution des dépôts effectués par l’entremise de courtiers ne soient pas indûment limités », ce qui offrira aux banques de petite taille un accès à ce marché.
Un projet de loi sera aussi déposé pour faire progresser le système bancaire ouvert (open banking) dans le cadre de la Loi sur les services bancaires axés sur les consommateurs.
Le gouvernement fédéral veut aussi intégrer un droit à la mobilité des données dans la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques afin de faciliter le partage de données dans l’ensemble de l’économie.