L’assureur refusait d’indemniser la perte de son client, dont le véhicule avait été volé, en alléguant les fausses déclarations du conducteur sur les circonstances du vol. Le tribunal ordonne le versement de l’indemnité et rejette la demande de l’assureur qui désirait se faire rembourser les sommes déjà versées. 

L’affaire a été entendue en mars 2025 par le juge Alexandre Henri, du district de Laval de la Cour du Québec. Son jugement a été rendu le 28mai dernier. Il condamne Desjardins Assurances générales (DAG) à payer la somme de 12 000 $ réclamée par l’assuré, Jeff Phileus 

La demande reconventionnelle soumise par l’assureur, qui voulait se faire rembourser la somme de 1 108,61 $ qui avait été versée pour couvrir le coût de location du véhicule de courtoisie, est également rejetée. 

Le vol du véhicule, un modèle X3 de la marque BMW fabriqué en 2010, a eu lieu dans la soirée du 24 juillet 2020 alors que l’assuré était dans un centre de conditionnement physique afin de s’entraîner.  

Circonstances du vol 

Dans sa déclaration aux policiers, l’assuré explique avoir stationné le physique en façade de l’édifice, à côté du conteneur à déchets près du commerce voisin, un centre de réparation de vitres d’autos. Après avoir vérifié que la voiture n’avait pas été remorquée, il appelle les policiers pour rapporter le vol. Il finit par rentrer chez lui en taxi sans avoir vu les policiers.  

Le lendemain, après la visite des policiers à son domicile, il déclare le sinistre à l’assureur. Après une enquête et l’interrogatoire statutaire, DAG nie la couverture dans une lettre transmise au consommateur en décembre 2020.  

Pour justifier son refus, l’assureur allègue que le client « n’a pas divulgué toute la vérité et qu’il a donné des versions contradictoires, incompatibles, incohérentes et inexactes », ce qui l’amène à conclure qu’aucun sinistre n’est survenu. La défense se fonde sur les articles 2464 et 2472 du Code civil du Québec. 

L’assureur « soumet qu’il existe des présomptions graves, précises et concordantes démontrant que le vol aurait été orchestré par M. Phileus », ce qui entraîne la déchéance de son droit à l’indemnisation.  

La preuve 

Pour avoir gain de cause dans son recours, l’assuré doit démontrer qu’il est propriétaire du véhicule et que celui-ci a été volé. Il doit aussi prouver l’existence d’une protection d’assurance au moment du vol et la valeur du bien volé. Trois de ces quatre éléments ne sont pas contestés par l’assureur. 

L’article 2805 du Code civil prescrit que la bonne foi de l’assuré se présume ; l’assureur doit prouver le contraire. Même s’il n’existe aucune preuve directe des agissements fautifs de l’assuré que lui reproche DAG, il est néanmoins possible d’établir la faute au moyen d’une preuve par présomption.  

Après analyse de la preuve soumise, incluant le témoignage convaincant du demandeur, le tribunal conclut que « les prétentions de l’assureur ne sont basées que sur de simples soupçons, des doutes et des hypothèses », lesquels ne suffisent pas à conclure que l’assuré est impliqué dans le vol de son véhicule. 

Le prix d’achat déclaré à l’assureur, à 12 000 $, est plus élevé que le coût réel, soit 10 232,78 $ (incluant les taxes). La différence ne suffit pas à convaincre le tribunal qu’il s’agit d’une déclaration mensongère. 

L’assureur fait valoir que la valeur marchande est de 6 000 $ le jour du sinistre. Selon le juge Henri, il semble absurde que DAG reproche au client d’avoir souscrit cette garantie qu’elle offre au moment de la souscription et pour laquelle la prime est ajustée en conséquence. 

Un rapport d’analyse de l’une des clés du véhicule remises par le client soulève également des doutes pour l’assureur. Le tribunal n’arrive pas à tirer quelque conclusion que ce soit de la preuve qui s’avère incomplète et non probante. 

Autres éléments 

L’assureur dépose en preuve un extrait de l’enregistrement vidéo d’une caméra de surveillance, qui ne fait que confirmer l’heure d’arrivée et de départ du client. Le véhicule n’est pas visible dans le stationnement. Le montage soumis par l’assureur n’est pas concluant, selon le tribunal, qui estime qu’il aurait été préférable de déposer en preuve l’enregistrement complet de la soirée.  

Le rapport d’Equifax soumis par DAG montre que le consommateur est dans une situation financière précaire. Encore une fois, le tribunal ne partage pas la conclusion de l’assureur.  

L’assureur dépose aussi d’autres éléments afin de remettre en question la crédibilité de l’assuré. Il lui reproche notamment d’avoir omis de divulguer qu’un autre assureur aurait annulé sa police d’assurance habitation en 2012. Or, la preuve révèle que le même assureur a continué d’assurer le véhicule du demandeur pendant plusieurs années. 

« Vraisemblablement, Desjardins Assurances cherche des problèmes là où il n’y a en a pas dans le but de se soustraire à son obligation d’indemniser son assuré, et ce, sous prétexte qu’elle doit verser une indemnité d’assurance à la valeur marchande du bien volé, ce qui semble l’avoir grandement indisposé au point de la pousser à entreprendre une enquête approfondie », lit-on au paragraphe 64. L’assureur est condamné à payer la somme réclamée par le demandeur. 

L’assuré avait droit à un véhicule de courtoisie en vertu de la police dont il bénéficie, et il n’aura pas à rembourser le coût à l’assureur, conclut le tribunal.