Après des années de croissance du cout des médicaments dans les régimes collectifs et la crise de 2008, les écueils ne cessent de se dresser devant le marché de l’assurance collective en maladies graves. Frileux sur les dépenses, les employeurs hésitent à ajouter de nouvelles protections à leur régime déjà fort couteux. Plan de match de l’industrie en 2011 : accroitre les efforts de marketing.Mousser la notoriété du produit pour favoriser la croissance du marché de l’assurance collective en maladies graves est un passage obligé, croit le réassureur RGA Canada. L’assurance collective en cas de maladies graves est un très petit marché qui requiert davantage de marketing pour stimuler sa croissance, dit Anil Sanwal, vice-président adjoint, réassurance collective et développement chez RGA.
En février 2010, le Groupe Fraser estimait le marché total de l’assurance maladies graves collective à un volume de primes de 25 et 30 millions de dollars (M$) l’an passé, soit 0,1 % du marché total de l’assurance collective. Au moment de clore la présente édition, aucun chiffre plus récent n’était disponible chez la firme de recherche en assurance collective.
Le cout constitue le principal frein à la croissance de ce marché, croit M. Sanwal. Les couts de base des régimes augmentent continuellement et les employeurs hésitent à leur ajouter une autre garantie. « Ces derniers manquent d’argent », dit-il.
Le prix de l’assurance collective en cas de maladies graves peut être élevé. « Approximativement de trois à cinq fois le cout d’une assurance vie collective équivalente », estime M. Sanwal.
Autre frein : les employeurs ignorent souvent la valeur ajoutée du produit, ajoute-t-il. Les assureurs doivent donc porter une attention particulière sur la façon de faire connaitre les avantages du produit et accroitre sa notoriété auprès des clients.
Le réassureur suggère de souligner le rôle de l’assurance maladies graves dans le paiement des couts sans cesse croissants que les patients gravement malades doivent assumer. M. Sanwal explique qu’une quantité croissante de soins ne sont plus couverts par l’État. « L’assurance collective en cas de maladies graves est une bonne façon de couvrir ces frais », dit-il.
M. Sanwal ajoute que le marketing pourrait davantage cibler la population d’âge mûr célibataire à qui, le produit convient parfaitement. « Ces gens n’ont pas de personnes à charge et ont besoin d’un montant d’assurance vie moins substantiel. Ce dont ils ont le plus besoin, c’est quelqu’un pour s’occuper d’eux en cas de maladie. »
Couverture facultative
Tandis que les ventes d’assurance collective en cas de maladies graves payée par l’employeur stagnent, la croissance se profile du côté des couvertures facultatives payée par les employés, dit M. Sanwal.
Les produits facultatifs sont des produits dont l’émission sera simplifiée pour les couvertures modestes comme 25 000 $. Les montants plus élevés seront sujets à quelques questions non médicales supplémentaires.
Les régimes flexibles, où l’employeur donne aux employés un montant d’argent discrétionnaire à dépenser pour des garanties de leur choix, constituent aussi une avenue de croissance pour les couvertures maladies graves collectives.
M. Sanwal demeure toutefois pessimiste quant aux perspectives de croissance du produit. « Le marché rencontrera des défis parce que la population canadienne a une mentalité de droits acquis. Les gens pensent que le gouvernement ou le régime collectif de leur employeur subviendra à leurs besoins, alors qu’en réalité, il y a de plus en plus de soins à leur charge. »
Il ajoute que les Canadiens semblent également manquer de conscientisation quant à la réalité du risque d’un cancer, d’une crise cardiaque ou d’un AVC. « J’ai vu certains résultats de groupes de discussion sur l’assurance collective en cas de maladies graves dans lesquels l’attitude de plusieurs consistait à dire, « cela ne m’arrivera pas. »
Les assureurs optimistes
La Financière Manuvie perçoit une croissance de ses activités d’assurance collective en maladies graves. « Nous constatons un grand intérêt. Nous sortons à peine du marasme économique et il semble que l’assurance collective en maladies graves soit sur une lancée. Un intérêt accru se manifeste et les employeurs sont intéressés à l’offrir à même leurs programmes d’avantages sociaux de base », a révélé en entrevue au Journal de l’assurance, Kim Hayes, directrice de produits, marketing en collectif.
L’intérêt accru vient d’une plus grande maturité de ce marché au Canada, autant dans le segment individuel que collectif, a ajouté lors de la même entrevue son collègue John Salmond, vice-président adjoint, marketing en collectif et développement de produits. Le nombre d’employeurs qui ont ajouté la garantie à leur régime demeure bas, dit toutefois Mme Hayes. Elle impute cette lenteur au fait que le produit a été lancé peu avant la crise.
La Financière Sun Life dit que ce créneau représente une part modeste de ses activités en assurance collective. « Autant les promoteurs de régimes que les conseillers deviennent de plus en plus conscients de la valeur de l’assurance collective en cas de maladies graves », observe Tim Griffin, vice-président adjoint, tarification et souscription financière, distribution directe.
Au cours des deux dernières années, Sun Life a vu son en-vigueur croitre de plus de 40 % dans ce secteur en 2009 et de plus de 25 % en 2010, dit M. Griffin. Il ajoute qu’en 2011 il s’attend à un niveau de ventes élevé.

 

ACE Vie formera les conseillers québécois
Pour familiariser ses conseillers financiers québécois à l’assurance collective en maladies graves, ACE Vie leur propose depuis peu une formation axée sur le marché en général plutôt que sur des produits spécifiques.
L’assureur ontarien s’est engagé il y a deux ans à développer davantage ce marché au Québec. Le vice-président aux ventes et marketing, prestations du vivant à Toronto, Eddy Levy, avait alors embauché Marie-Noëlle Melançon pour renforcer la présence de son bureau de Montréal auprès du réseau des conseillers indépendants. L’ex-spécialiste des petits groupes en assurance collective chez Great-West y occupe le titre de directrice du développement pour le Québec et les Maritimes.
Un des principaux axes de pénétration au Québec d’ACE Vie repose sur la formation de pointe aux courtiers dans les produits de prestations du vivant. Initialement créé en octobre, le programme de formation a été récemment peaufiné. Maintenant prêt à être dispensé au Québec et dans les Maritimes, il compte déjà plusieurs inscrits en 2011.
La formation tombe à pic pour saluer la nouvelle version du produit Spectrum lancée en fin d’année. Mme Melançon signale toutefois que la formation porte sur des connaissances générales propres au marché des maladies graves en collectif, et ne mentionne pas directement Spectrum. « Nous voulons donner aux conseillers des informations qui leur permettront de mieux comprendre les besoins des entrepreneurs dans ce marché », a-t-elle indiqué.
La formation est dense et prévoit des simulations, ainsi que des quizz. « L’intérêt pour notre programme est marqué et nous envisageons de mettre sur pied une troisième séance, selon la réponse que recevront nos deux premières », a révélé Mme Melançon.
Alain Thériault

 

Chez Manuvie, Mme Hayes se dit encouragée par l’intérêt accru que manifestent les conseillers envers le produit. « Il y a une meilleure compréhension parmi les conseillers de la valeur de l’assurance collective en maladies graves, ce qui influencera les ventes », pense-t-elle. M. Griffin note qu’une demande accrue de la part des clients n’est pas étrangère à cette conscientisation chez les conseillers.
M. Salmond croit pour sa part que les occasions de percer se multiplieront pour l’assurance collective en maladies graves à mesure que la récession régressera. Il croit que les gens reviendront ainsi de plus en plus à leurs priorités en planification financière. « Ils réaliseront le gros vide laissé dans leur plan financier par l’absence de cette protection. Et, je pense que ceci ravivera leur intérêt. »
Contexte favorable
Par ailleurs, les employeurs oeuvrent souvent dans des secteurs très compétitifs, ce qui peut devenir favorable au produit de maladies graves collectif, croit aussi Mme Hayes. « Si un employeur évolue dans un univers très concurrentiel et qu’il essaie d’attirer et de retenir des employés, un ensemble d’avantages sociaux plus intéressants dans lequel figure l’assurance en cas de maladies graves s’avérerait certainement avantageux », dit-elle.
M. Griffin de la Sun Life soutient de son côté que la principale raison pour laquelle les employeurs décident de ne pas ajouter l’assurance collective en cas de maladies graves serait « qu’ils craignent un surcroît de travail administratif et, dans certains cas, des couts de systèmes informatiques pour l’ajout de cette protection additionnelle. Je dirais aussi que dans certains cas, le promoteur du régime n’est pas convaincu de la valeur de l’assurance en cas de maladies graves. »
Il ajoute enfin être d’accord avec RGA sur le fait qu’une attention accrue en matière de marketing est nécessaire afin d’augmenter les ventes dans ce secteur. Dans cette optique, la compagnie essaie de s’assurer que les gestionnaires de comptes, qui vendent les avantages sociaux, « gardent l’assurance collective en maladies graves en priorité lorsqu’ils cherchent des occasions de fournir à leurs clients des produits à valeur ajoutée. »
Chez Manuvie, les régimes d’assurance maladies graves financés par l’employeur donnent généralement lieu à des polices dont le capital assuré s’échelonne de 10 000 $ à 25 000 $. Dans les régimes où l’assuré assume lui-même les couts, la police tourne plutôt autour de 25 000 $ et plus, révèle Mme Hayes.
Quant à Sun Lifte, le montant moyen de couverture en assurance maladies graves collective oscille entre 25 000 $ et 50 000 $, confie quant à lui M. Griffin. Il ajoute que les régimes facultatifs se vendent mieux que la couverture d’assurance collective en cas de maladies graves payée par l’employeur. « La majorité de nos ventes proviennent de régimes facultatifs payés par l’employé. Toutefois, nous commençons à voir une demande plus forte dans les couvertures payées par l’employeur. »