Les investisseurs partagent la certitude que la Banque du Canada abaissera plus d’une fois son taux directeur en 2024. De quoi remonter le moral des travailleurs canadiens, dont le stress a grimpé d’un cran, selon l’Indice de bonheur au travail publié le 29 mai 2024 par ADP Canada.
Mesure mensuelle du pouls des travailleurs, l’Indice révèle que les travailleurs sont moins heureux en mai qu’ils ne l’étaient en avril. L’indice a baissé de deux points par rapport à avril, pour s’établir à 6,6 sur 10 en mai. Les travailleurs sont aussi moins heureux qu’en mai 2023.
L'enquête de l’indice sonde au début de chaque mois plus de 1 200 adultes canadiens sélectionnés au hasard parmi les panélistes de Voix Maru Canada (Maru Voice Canada), communauté d’études de marché en ligne. En mai 2024, ils sont 59 % à dire que le coût de la vie a un impact conséquent sur leur niveau de stress au cours de la journée de travail.
Selon ADP Canada, l’impact des facteurs économiques de stress se fait sentir au quotidien : 68 % des travailleurs sondés révèlent que l'augmentation du coût des aliments et des produits d'épicerie pèse lourdement sur leur niveau de stress durant les heures de travail. Ils sont 62 % à exprimer ce sentiment face à la planification des dépenses importantes.
Lueur à ce tableau sombre, l’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation (IPC) global a reculé à 2,7 en avril, comparativement à 2,9 en mars. Statistique Canada dévoilera le 25 juin l’IPC de mai.
Porte ouverte à la baisse
Malgré l’inflation qui semble battre en retraite, le remboursement d’une hypothèque ou d’un prêt personnel demeure une lourde dépense pour nombre de travailleurs, dans un environnement de taux élevé.
Un répit pointe pour eux à l’horizon. Inchangé depuis qu’elle l’a fixé à 5,00 % en juillet 2023, la banque centrale canadienne annoncera son taux cible du financement à un jour (taux directeur) le 5 juin 2024. Plusieurs spécialistes des marchés financiers croient qu’elle l’abaissera.
La porte est grande ouverte pour la coupure de taux de la Banque du Canada – Sébastien McMahon
La banque centrale canadienne ajuste son taux directeur à huit dates préétablies par an. Elle a fait trois annonces en 2024, dont la dernière le 10 avril. Il lui en reste donc cinq à faire. « La porte est grande ouverte pour la coupure de taux de la Banque du Canada, probablement à l’annonce du 5 juin et assurément à celle du 24 juillet », a dit Sébastien McMahon, stratège en chef, économiste sénior et vice-président, allocations d’actifs et gestionnaire de portefeuilles d’iA Gestion mondiale d’actifs (iAGMA), dans son survol de l’économie de la semaine se terminant le 24 mai.
Selon lui, le marché fait consensus à 63 % sur le scénario d’une baisse du taux directeur de la Banque du Canada le 5 juin. Si ce scénario majoritaire se réalise, Sébastien McMahon croit que « le marché réagirait probablement un peu ». « Il pourrait y avoir une pression à la baisse sur les taux d’intérêt canadiens », prévoit-il.
Les taux bougent déjà
« Nous avons commencé à voir bouger les taux moyens d’hypothèques fixes à 5 ans. Nous étions à 6,5 % récemment. Maintenant, on est rendu à 6,0 %. Les marchés ont donc anticipé les coupures de taux », ajoute M. McMahon.
Selon lui, l’impact de la prochaine baisse du taux directeur dépendra de la façon dont la Banque du Canada la communiquera aux marchés. « Communiquera-t-on que nous sommes partis pour une séquence rapide ou lente ? »
Une séquence rapide pourrait avoir un impact sur toute la courbe de rendements canadienne et avoir un effet à la baisse relativement rapide sur les taux d’intérêt fixes, estime Sébastien McMahon. « Trois ou quatre coupures du taux directeur d’ici à la fin de l’année, c’est notre scénario de base. Nous sommes un peu plus optimistes que le marché », dit-il.
Optimisme et inflation
Quant au recul de l’inflation à 2,7 %, Sébastien McMahon estime que la composante du coût du logement l’a freiné. Selon lui, cette composante de l’IPC global demeure importante. Elle a représenté 30 % du panier de l’IPC canadien, rappelle-t-il. « On voit encore des pressions inflationnistes fortes venant du logement, soit d’environ 6,5 % », estime l’économiste.
M.McMahon pense que la Banque du Canada ne peut garder indéfiniment les taux élevés, au risque de faire du dommage ailleurs dans l’économie. Il croit que contrer la hausse du prix des logements soutenue par la tendance démographique relèvera davantage d’initiatives des gouvernements. « Lorsque l’on en exclut la composante du logement, l’inflation totale est presque à 1 % », observe M. McMahon.
Selon les informations diffusées sur le portail de l’Indice des prix à la consommation de Statistique Canada, le ralentissement généralisé de l'IPC global résulte principalement du prix des aliments, des services et des biens durables.
Statistique Canada mentionne que les prix de l’essence à la pompe ont augmenté de 6,1 % d'une année à l'autre en avril. Cela a atténué la baisse de l’inflation. Son portail signale que la croissance des prix à la pompe a été surtout attribuable à la hausse de 7,9 % d'un mois à l'autre observée en avril. « L'augmentation des coûts associés au passage aux mélanges d'été, la progression des prix du pétrole en raison des préoccupations liées à l'approvisionnement et la hausse de la taxe fédérale sur le carbone ont contribué à la croissance des prix », peut-on lire.