L’Autorité ontarienne de réglementation des services financiers (ARSF) arrive en fin de parcours de son projet de permis d’agent général en assurance de personnes. La consultation du régulateur ontarien, qui a pris fin le 30 avril 2025, a suscité des réactions mitigées de nombreux acteurs de l’industrie.
En effet, l'ARSF doit analyser les quelque 27 mémoires reçus sur la Proposition de règle 2025-001 Agents généraux gestionnaires d’assurance vie et d’assurance santé.
La proposition
Dans sa proposition, le régulateur ontarien décrit les distributeurs qui devront obtenir un permis d’agent général : les entreprises qui recrutent, forment ou présélectionnent des conseillers, ainsi que celles qui les supervisent ou surveillent leurs activités.
La règle pourra s’étendre à d’autres types de distributeurs, s’ils exercent des activités d’agent général. L’ARSF inclut parmi eux les agents généraux délégués, aussi appelés « agents généraux associés » dans le jargon de l’industrie. Elle ajoute également les comptes nationaux, soit les distributeurs affiliés à une firme de courtage en placement, et les tiers administrateurs, dont plusieurs offrent des services en assurance collective et en assurance voyage.
La Proposition de règle 2025-001 pose des critères d’admissibilité au permis. Le demandeur devra détenir une assurance responsabilité, et soit de l’assurance erreur et omission ou un cautionnement. Il devra aussi avoir une adresse postale en Ontario et attitrer une personne responsable de la conformité.
Toujours selon la règle proposée, les assureurs demeureraient responsables de l’impact sur les consommateurs des démarches de son distributeur, quel que soit le canal utilisé, écrit l’ARSF.
Si elle est adoptée telle quelle, la règle exigera que les assureurs surveillent et supervisent les agents généraux, tandis que les agents généraux surveilleront les conseillers. L’ARSF s’attend toutefois à ce que l’assureur ait un système de vérification qui lui permette de s’assurer que les conseillers agissent en toute conformité.
Vaste participation
La démarche de l’ARSF a suscité la réaction d’à peu près tous les secteurs de l’industrie.
Les principales associations ont commenté, soit l’Association canadienne des agences de courtage en vie indépendantes (mieux connue comme la Canadian Association of Independent Life Brokerage Agencies et sous son acronyme CAILBA), l’Association canadienne des compagnies d’assurance de personnes (ACCAP) et l’association de conseillers Advocis.
Des associations des secteurs de l’assurance collective et de l’assurance voyage font aussi partie du lot, par exemple la Third Party Administrators’ Association of Canada et l’Association canadienne de l’assurance voyage, mieux connue sous son acronyme anglais THiA, pour Travel Health Insurance Association of Canada.
Des assureurs, des agents généraux et des conseillers ont à leur tour commenté individuellement.
Enfin, un comité consultatif formé de consommateurs a aussi participé à la consultation. Il s’agit du Consumer Advisory Panel to The FSRA.
Manque de clarté
Dans leurs mémoires, agents généraux et assureurs demandent des éclaircissements au régulateur ontarien sur la future règle de permis. Les assureurs craignent un dédoublement des responsabilités. Quant aux agents généraux, ils s’inquiètent que les assureurs leur refilent des responsabilités.
Nous sommes préoccupés par le caractère vague de certaines exigences
– IFB
Regroupement de quelque 2000 conseillers établis dans la région métropolitaine de Toronto, l’Independent Financial Brokers of Canada (IFB) résume les craintes des agents généraux dans son mémoire : « Nous sommes préoccupés par le caractère vague de certaines exigences énoncées dans le projet de règlement, ainsi que par le risque que les compagnies d’assurance vie se déchargent de leurs responsabilités de supervision sur les agents généraux, alors qu’il revient à l’assureur d’assumer ce rôle. »
La version actuelle du projet de règle ne définit pas clairement la répartition des rôles et responsabilités
– CAILBA
Quant à elle, la CAILBA exhorte le régulateur à mieux cerner les responsabilités de chaque partie. « La version actuelle du projet de règle ne définit pas clairement la répartition des rôles et responsabilités entre l’ARSF et les assureurs dans la supervision des agents généraux », écrit l’association d’agents généraux.
Concernant la supervision et la surveillance des conseillers, la CAILBA croit que certaines tâches devraient incomber aux assureurs, telles que former les conseillers sur leurs produits, leurs stratégies et la connaissance du client.
La CAILBA ajoute que les agents généraux devraient être responsables de superviser et surveiller la conformité des conseillers, et veiller à leur formation en ce sens, alors que la conduite du marché, le suivi et la surveillance se feraient « dans une capacité partagée » avec les assureurs.
De son côté, l’IFB reconnaît l'effort du régulateur à définir comment les assureurs et les agents généraux se partageront la responsabilité de superviser les conseillers et scruter leur conformité, mais soulève aussi un bémol.
Le régulateur québécois sondé
En marge de la consultation sur le permis d’agent général, l’ARSF mène de front d’autres travaux sur le terrain. Pour cerner les risques supplémentaires et les actions à prioriser en matière de surveillance, l’ARSF a lancé à des assureurs triés sur le volet un questionnaire sur leurs pratiques.
Au Québec, l’Autorité des marchés financiers n’entend pas exiger un permis d’agent général, selon les propos qu’a tenus Louise Gauthier, directrice principale des politiques d’encadrement de la distribution à l’Autorité, lors du Congrès annuel 2025 de la CAILBA, qui s’est déroulé à Montréal du 30 avril au 2 mai. Elle a expliqué que « les agents généraux sont déjà inscrits comme cabinets, au Québec ».
Mme Gauthier signale toutefois que le régulateur québécois estime nécessaire de clarifier le rôle et les obligations de l’agent général. Elle rappelle que l’Autorité travaille depuis un moment à un projet d’encadrement de la gouvernance des cabinets. « Nous avons eu des échanges avec l’industrie au cours de l’année », mentionne Mme Gauthier.
Le régulateur se penchera entre autres sur la différence entre représentant autonome et cabinet dans le modèle québécois, ajoute-t-elle.