Le 29 mai dernier, le comité de discipline de la Chambre de la Sécurité financière a condamné Josée Boileau (certificat no 178040, BDNI no 2709901) à une radiation d’un mois pour cause de négligence.
Au moment des faits, l’intimée exerçait son métier de conseillère en sécurité financière depuis plus de 10 ans à Salaberry-de-Valleyfield et ailleurs au Québec. Dans son jugement, le comité mentionne des motifs d’exemplarité et de dissuasion de récidive.
Étant donné la situation actuelle de l’intimée, il y a peu de risques, en principe, qu’elle utilise à nouveau ce même titre pour répéter les gestes et, surtout, les omissions dont elle se reconnaît elle-même coupable : durant la période de faits qui lui sont reprochés, Mme Boileau a cessé d’exercer sa profession de conseillère en sécurité financière. Elle n’avait pas repris cette activité au moment de l’audience, le 14 février 2023.
Le peu de suivi par l’ex-conseillère du dossier du plaignant, dans le contexte où elle quittait son poste, constitue d’ailleurs un des arguments du comité ayant mené à son verdict : « Comme elle quittait la profession et que le mandat était en cours, son client aurait dû être avisé de la situation et du nom et des coordonnées de son ou de ses successeurs. Le comité y voit également un manque de professionnalisme », lit-on dans le jugement.
Une transaction bien avancée
À partir du 26 mai 2021, Josée Boileau a coupé les ponts avec son client. Celui-ci faisait appel à ses services pour modifier son assurance vie et en obtenir une autre équivalente pour sa conjointe. Il cherchait également une protection pour ses enfants.
En audience, il est démontré qu’au cours des semaines et des jours qui ont précédé, les requêtes du plaignant avaient amplement dépassé le stade exploratoire : déjà, les 5 et 25 mai, la conseillère avait avisé les assureurs des changements nécessaires dans le compte bancaire du plaignant pour réaliser cette transaction. Il est également admis que les derniers détails pour sceller l’ensemble des transactions ont été fixés 19 mai 2021.
L’analyse des besoins financiers a ensuite été complétée, sur papier, le 26 mai et, le même jour, l’intimée a confirmé par texto à son client que les « autres papiers » lui seraient envoyés le plus tôt possible. Le 16 juin, le client, toujours sans nouvelle, prend l’initiative de mentionner, par texto à sa conseillère, qu’il n’avait toujours rien reçu. Le silence de la conseillère fut sa dernière réponse.
Une négligence admise d’emblée
En conséquence, le syndic accuse maintenant l’ex-conseillère d’avoir contrevenu ainsi aux articles 23 et 24 du Code de déontologie de la Chambre de la sécurité financière. Le premier porte sur le devoir de se montrer disponible et diligente, ce qui inclut une certaine célérité d’action. L’article 24, quant à lui, concerne davantage le devoir de reddition de compte, auquel la conseillère a manqué en n’informant pas son client de sa démission et d’une personne en mesure de lui succéder au dossier.
Le syndic suggère une radiation temporaire d’un à trois mois, une sanction que Josée Boileau, qui se représente seule, dit trouver « raisonnable ». Lorsque les parties s’entendent ainsi, il arrive souvent qu’ils soumettent une proposition commune, afin d’alléger la charge de la justice. Ce n’est pas le cas ici.
L’accusée bénéficie néanmoins du principe de l’arrêt Kienapple, interdisant les condamnations multiples. Les procédures relatives à l’article 23 quant à l’obligation de se montrer prompte et disponible restent donc conditionnellement suspendues. Il en résulte alors une sanction d’un mois, plus les frais judiciaires.
Des victimes bien réelles
En l’absence d’objections plus fermes, le comité confirme que la sanction recommandée « se situe à l’intérieur des fourchettes de sanction en semblable matière ». Le jugement ne s’étend pas davantage sur les facteurs atténuants et incriminants entourant l’ex-conseillère.
Les conséquences tangibles des manquements de l’ex-conseillère ne sont donc évoquées que dans l’énumération des faits. Il y est indiqué, en effet, que le plaignant ne découvrit l’absence de dossier finalisé que le 5 août 2021, soit deux jours après le décès subit de sa conjointe.
On accorde à l’intimée un délai de six mois pour le paiement des déboursés. Elle devra aussi payer les frais de publication de l’avis de radiation.
Condamnation antérieure
Les vérifications faites par le Portail de l’assurance auprès de l’Autorité des marchés financiers concernant la certification de l’intimée ont permis de trouver un autre jugement la concernant. Cette condamnation n’est pas mentionnée dans la décision du comité de discipline de la Chambre.
En novembre 2017, l’intimée avait été accusée par l’Autorité des marchés financiers, tout comme son cabinet Services financiers Josée Boileau. On lui reprochait d’avoir servi (selon les termes du tribunal) de « paravent » à son père, Serge Boileau, un ex-conseiller financier, lors de la rencontre de trois investisseurs.
L’intimée avait omis d’informer les investisseurs que M. Boileau avait fait l’objet d’une radiation permanente, lorsque celui-ci tentait de les convaincre de tenter de nouveaux investissements risqués, après de précédentes transactions qui leur avaient été néfastes.
Ces faits ont mené à une première condamnation pour Josée Boileau par le Tribunal administratif des marchés financiers (TMF) le 29 août 2018. Parmi ses effets, notons l’obligation de renoncer à occuper des fonctions de gestionnaire dans son cabinet de services financiers ainsi que dans tout autre cabinet durant au moins 5 ans et de payer 7 500 $ d’amende.
Le TMF avait aussi suspendu l’inscription du cabinet et avait ordonné la nomination d’un nouveau dirigeant responsable, à défaut de quoi l’inscription du cabinet serait radiée.
Le 21 septembre 2018, l’intimée avait obtenu la suspension de l’exécution des sanctions reliées au jugement du TMF le temps que sa requête en appel soit entendue.
La condamnation a ensuite été confirmée par le juge Gilles Lareau, de la division administrative et d’appel de la Cour du Québec, le 17 juin 2020.