Le 28 mars 2019, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière a déclaré coupable Jean-Pierre Falet (certificat no 111 931, BDNI no 2942041) pour les 39 chefs de la plainte disciplinaire. La sanction sera déterminée à la suite d’une prochaine audience. La plainte trouve son origine dans l’inspection du cabinet de l’intimé, J.P. Falet inc., menée par l’Autorité des marchés financiers. L’inspection a mis à jour de nombreux manquements. L’intimé est premier actionnaire, secrétaire et président du cabinet.

Les 16 premiers chefs, qui contreviennent à l’article 6 du Règlement sur l’exercice des activités des représentants, concernent des problèmes reliés à l’analyse des besoins financiers (ABF). Les gestes qu’on lui reproche sont survenus de mai 2002 à décembre 2010.

Les chefs nos 17 à 34 sont associés à des infractions à l’article 18 du Code de déontologie de la Chambre. Entre novembre 2008 et octobre 2010, l’intimé s’est placé en situation de conflit d’intérêts en prêtant des sommes à ses clients, pour des montants allant de 242 $ à 14 000 $. L’intimé aurait dit à l’enquêteur que ces prêts auraient été faits pour rendre service à ses clients, souvent des professionnels qui connaissaient des difficultés financières. L’intimé aurait cessé de faire de tels prêts depuis l’inspection menée par l’Autorité. L’intimé a agi de bonne foi et les clients sont satisfaits de lui, souligne le comité.

Enfin, à quatre reprises entre janvier 2005 et novembre 2012, l’intimé a fait signer en blanc divers documents à ses clients, contrevenant ainsi à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers. Le comité prononce l’arrêt conditionnel des procédures à l’égard des autres dispositions alléguées au soutien des 39 chefs.

Concernant les problèmes d’ABF, le procureur de l’intimé s’opposait au dépôt des documents obtenus par l’enquêteur du syndic. Il a soumis comme jurisprudence la décision du comité rendue à l’encontre du représentant André Lévesque, qui a travaillé avec M. Falet pendant 25 ans. Selon la plaignante, le dépôt des documents avait pour objectif de démontrer que des propositions d’assurance ont été faites, que des contrats d’assurance ont été émis et que les dossiers de l’intimé ne comprennent pas d’ABF. L’objection du procureur de l’intimé a été rejetée par le comité de discipline.

La plupart des clients ont été entendus par le comité, qui a constaté la satisfaction de ceux-ci pour le travail effectué par l’intimé. M. Falet a témoigné pour sa défense. Arrivé au Québec à l’âge de 19 ans, il a fondé son cabinet en 1974. Il mentionne notamment qu’il n’y avait auparavant pas de formulaire spécifique pour une ABF. Il a raconté le contexte associé à la souscription des différentes polices et des sommes prêtées. Dans plusieurs cas, il a admis avoir détruit les notes au dossier après avoir livré la police, ou n’avoir pas procédé à l’analyse des besoins financiers à la demande des clients.

Selon le comité de discipline, « l’ABF effectuée dans un dossier est le témoin de l’histoire de la relation professionnelle entre la firme, le représentant et le client ». Il ajoute : « La simple connaissance des conditions du client par le représentant n’est pas suffisante pour assurer la protection du public, car lors du départ du représentant, la firme sera dépourvue d’information importante. »

Comme il l’avait fait pour le dossier d’André Lévesque, le procureur de l’intimé a plaidé que la disposition touchant l’ABF ne prévoit pas que l’on doive par la suite conserver au dossier les renseignements recueillis. Le comité est en désaccord avec cette position. Pour les 18 chefs touchant les prêts faits aux clients, le comité estime que l’intimé s’est placé en situation de conflit d’intérêts, car son geste « n’était pas totalement désintéressé. Il pouvait ainsi conserver leur clientèle, obtenir de bonnes recommandations de ceux-ci et s’attendre à la souscription d’autres polices », écrit-il. La bonne foi et les motivations de l’intimé seront évaluées à l’étape de la détermination de la sanction.

Quant aux documents signés en blanc, le comité de discipline souligne que de nombreuses formations ont déjà jugé que cette pratique était mauvaise et reprochable. L’absence de conséquence ou d’intention malveillante n’empêche pas la commission de l’infraction, conclut le comité.