Le 29 juillet dernier, iA Gestion privée de patrimoine (IAGP) a accepté de payer une amende de 350 000 $ à l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRVM).
L’entente intervenue entre les parties, qui a été acceptée par une formation d’instruction de l’OCRVM, comprend aussi le paiement des frais de 25 000 $ par l’entreprise.
IAGP a admis avoir manqué à son obligation d’établir et de maintenir un système lui permettant de surveiller les activités de ses employés, conçu pour assurer de manière raisonnable que ceux-ci se conformaient aux exigences de l’OCRVM, en contravention de l’article 1 de la règle 38 des courtiers membres.
Selon l’aperçu de l’entente, « les activités reprochées comprennent des recommandations de placement qui ne convenaient pas aux clients, de forts volumes d’opérations et des concentrations élevées dans les titres de petits émetteurs et le recours inapproprié à la marge dans les comptes de clients ».
IAGP a immédiatement signalé la conduite fautive à l’OCRVM et a mené une enquête interne. Depuis, le cabinet a conclu des ententes de règlement avec de nombreux plaignants. Il a aussi mis en œuvre des procédures et politiques révisées et mis en place une nouvelle structure de conformité pour éviter une conduite fautive semblable dans l’avenir.
Le personnel de la mise en application à l’OCRVM a accepté une réduction de 30 % de l’amende initiale en raison de la coopération dont IAGP a fait preuve, des mesures correctives prises et des indemnités versées aux clients à ce jour. L’entente est datée du 9 juillet 2021 et a été ratifiée par Moira Simo, première vice-présidente et chef de la conformité d’IAGP.
Historique
Le cabinet IAGP a pris cette dénomination en 2021, après avoir fonctionné sous le nom d’Industrielle Alliance Valeurs mobilières. IAGP est courtier membre de l’OCRVM depuis 2005.
Parmi les représentants inscrits qui ont été laissés sans surveillance adéquate, l’entente nomme feu Donald McFarlane, ancien directeur d’IAGP. McFarlane Gordon a été fondée en 2000 et était une filiale de Jovian Capital. Elle a été renommée MGI Securities en 2005. En octobre 2013, Industrielle Alliance, Assurance et services financiers l’acquisition de Jovian, et par conséquent de MGI. La fusion avec IAGP a été conclue le 1er avril 2014.
Plaintes après le décès
M. McFarlane est décédé le 3 mars 2019. Sa clientèle était généralement composée de clients avertis et fortunés ayant une tolérance au risque élevé. En conséquence, ceux-ci s’engageaient à accepter un fort volume d’opérations sur marge. Plutôt que de réduire les positions à risque élevé dans les comptes, M. McFarlane modifiait les formulaires d’ouverture de compte pour qu’ils correspondent aux placements détenus. Ces modifications ont été faites sans que la situation financière des clients ait changé.
Le décès du représentant a provoqué de nombreuses plaintes chez IAGP, soit 30 plaintes provenant de 17 groupes de plaignants. Des ententes de règlement ont été signées de 2019 à 2021. Seuls 4 dossiers n’ont pas été résolus. Les indemnisations déjà versées sont d’environ 5,8 millions de dollars (M$).
L’entente souligne qu’un petit nombre de ces plaignants étaient moins avertis et ont subi les mêmes gestes de la part de M. McFarlane, qui lui a fait acquérir des titres spéculatifs, notamment des actions dans de petites sociétés aurifères. La cliente a retiré un montant supérieur aux apports qu’elle a faits à ses comptes, mais ceux-ci ont connu des variations importantes, incluant une baisse de 55 % entre janvier et mars 2019.
Sociétés minières
De janvier 2017 à mars 2019, M. McFarlane et ses clients ont représenté un pourcentage important des opérations visant quatre émetteurs du secteur minier : Minnova, Avidian Gold, Intercontinental Gold and Metals et Corvus Gold. Dans les quatre cas, la majeure partie était des opérations entre des comptes d’acheteurs et des comptes de vendeurs d’IAGP.
L’entente avec l’OCRVM précise qu’IAGP « n’a pas correctement déterminé et corrigé le préjudice potentiel que représentaient » les négociations du cabinet sur les actions de ces entreprises. « Ces opérations peuvent avoir créé un cours factice ou une apparence fausse ou trompeuse d’activité de négociation sur ces titres, ce qu’IAGP n’a pas détecté correctement », souligne-t-on au paragraphe 52 de l’entente.
Utilisation de la marge
On reproche aussi à IAGP et à ses représentants d’avoir utilisé la marge pour gérer les comptes. « Alors qu’IAGP a fait un suivi auprès de M. McFarlane plusieurs fois pour rendre les comptes de nouveau conformes, ces comptes finissaient par repartir à la dérive. »
En septembre 2014, 23 des comptes personnels et de clients du représentant affichaient des insuffisances de marge totalisant plus de 1 M$, incluant un cas où l’insuffisance de 269 000 $ a perduré jusqu’à 17 jours, et une autre de 219 000 $ qui a duré de 3 à 158 jours.
En mai 2015, les comptes personnels du représentant ont affiché des insuffisances de marge de plus de 560 000 $ qui perduraient depuis 7 à 17 jours. Un an plus tard, ces insuffisances atteignaient 1,9 M$.
En octobre 2018, les insuffisances des comptes personnels et des clients de M. McFarlane dépassaient encore les 2 M$. Ces problèmes n’ont pas été corrigés en temps opportun par IAGP. M. McFarlane a effectué des opérations entre ses comptes et ceux des clients pour les régler.
Sociétés fermées
De nombreux clients du cabinet détenaient des débentures de sociétés fermées. Jusqu’en février 2019, IAGP autorisait l’utilisation de ces titres comme garantie aux fins de prêt sur marge, ce qui augmentait cette marge au-delà des limites associées à ces clients. Pour 16 des comptes personnels et de clients de M. McFarlane, l’excédent de la valeur de prêt a totalisé 3,5 M$. IAGP a mis fin à cette pratique en janvier 2019 et de nombreux comptes ont affiché des insuffisances de mars. À la fin de mars 2019, celles-ci totalisaient plus de 6 M$, dont plus de 778 000 $ dans les comptes personnels du représentant.
De juin 2016 à janvier 2019, on reproche aussi à M. McFarlane d’avoir effectué de nombreuses opérations dans ses comptes personnels avant de faire des opérations dans les comptes de clients. Même si IAGP l’a averti à plusieurs reprises que ce type de conduite n’était pas autorisé, il a continué de faire de même.
Surveillance des autres représentants
De décembre 2017 à avril 2019, quatre représentants inscrits d’IAGP ont conclu une entente de règlement avec l’OCRVM dans laquelle ils ont admis avoir enfreint les règles de l’Organisme. Il s’agit de Kevin Price, Colin Baird, Duncan Roy et Sheron Crane.
L’ensemble des contraventions, de même nature que celles reprochées à M. McFarlane, ont eu lieu chez IAGP avant et après sa fusion avec MGI. Ces contraventions ont entrainé des pertes importantes pour les clients, lesquels ont été indemnisés par IAGP. Le cabinet a d’ailleurs imposé des mesures disciplinaires internes, en plus des sanctions disciplinaires imposées par l’OCRVM.
Depuis le milieu de 2019, IAGP a mis en place 17 modules de formation sur la conformité destinés à l’ensemble des conseillers. Les politiques et procédures adoptées par le cabinet sont énumérées dans l’entente, de même que les mesures adoptées pour remédier aux lacunes en matière de conformité.