En début de semaine, le Regroupement de la relève pour le futur du courtage a vu le jour. Ses membres veulent faire entendre leur voix dans le débat entourant les projets de loi 141 et 150.

Neuf jeunes courtiers comptent parmi les fondateurs du Regroupement. Ils sont tous soit propriétaires de leurs cabinets, actionnaires de l’entreprise ou relève identifiée à sa direction. Le Journal de l’assurance s’est entretenu avec leur porte-parole Vincent Lemoine, vice-président exécutif du cabinet Assurances Claude Lemoine.

C’est lundi que le nouveau regroupement a finalisé sa position face aux projets de loi 141 et 150. Ceux-ci ont des modèles d’affaires différents et des tailles différentes, a pris soin de préciser M. Lemoine, certains étant indépendants, d’autres non, alors que certains représentent un cabinet de petite taille, alors que d’autres œuvrent dans des cabinets de grande taille.

« Il est important de se mobiliser. Nous sommes l’avenir du courtage. C’est nous qui serons aux prises avec cette loi pour les prochaines années », dit M. Lemoine.

« Projets de loi pas viables » : quatre points à défendre
« Nous avons créé un groupe hétérogène. Pourtant, nous arrivons à la même conclusion, les projets de loi qui viennent d’être déposés ne sont pas viables pour le courtage et les courtiers », dit M. Lemoine.

Le Regroupement de la relève pour le futur du courtage cherchera donc ainsi à faire valoir quatre points auprès des décideurs publics. Le premier sera d’établir le rôle et la définition du courtier. Ensuite, le regroupement veut contribuer à rehausser la protection du consommateur, un point vital pour le courtage selon eux.

« La divulgation et la transparence sont au cœur de nos préoccupations. Que ce soit pour les liens financiers ou la concentration, on doit être plus clair. Si tout est clair, ça ne dérangera pas le client », dit M. Lemoine.

Le Regroupement souhaite aussi rediscuter de l’obligation de fournir 4 soumissions aux clients du courtier. Ils souhaitent aussi rediscuter de la règle des 20 % d’actionnariat qu’un assureur peut posséder dans un cabinet de courtage.

Définition du courtier : traiter avec deux assureurs généralistes

Pour le Regroupement, les courtiers sont avant tout des gestionnaires de risque et des experts-conseils. « Selon ce qu’indique la loi, notre rôle est d’offrir le produit adapté aux besoins du consommateur. Il n’est écrit nulle part qu’il faut lui offrir le moins cher. À quatre offres, on tombe dans un faux débat. Comme courtier, nous avons un code de déontologie à respecter. Ce n’est pas parce que le courtier ne soumet qu’une offre à son client qu’il n’a pas fait son travail. Par ailleurs, on ne peut le déplacer d’un assureur à l’autre chaque année juste pour le plaisir de la chose. Il y a un risque qu’il perde des protections », dit M. Lemoine.

Il ajoute que le courtier est un bon vulgarisateur et qu’il a un double mandat face à son client et face aux assureurs qu’il représente. « Les assureurs directs ne font pas cela, dit M. Lemoine. En région, il y a encore beaucoup de gens qui se déplacent aux cabinets pour payer leur police. On s’investit dans nos communautés, ce que les agences ne font pas. »

C’est pourquoi le Regroupement propose que le courtier traite avec deux assureurs généralistes par segment d’affaires. Le Regroupement inclut dans cette catégorie cinq assureurs : Intact Assurance, Aviva Canada, RSA Canada, L’Unique assurances générales et Assurances Economical. « S’il n’en a qu’un, il devient un agent. »

Protection du consommateur : attention aux mauvaises surprises

Quant à la notion de protection du consommateur, le Regroupement de la relève pour le futur du courtage s’inquiète de l’entrée potentielle du conseil sans certifié. « On revient à ce qui se faisait il y a 30 ans, dit M. Lemoine. Dans un récent sondage, la Chambre de l’assurance de dommages indique que trois personnes sur quatre ne comprennent pas leur contrat d’assurance. Option Consommateurs dit pour sa part que le projet de loi 141 sera un grave recul pour les consommateurs s’il passe. Ça nous préoccupe. »

Le Regroupement se demande aussi comment le consommateur fera pour comprendre les quatre offres que son courtier lui présentera, alors qu’en comprendre une seule est déjà ardu pour lui. « On fait quoi pour les gens qui ont des limitations particulières ? » demande M. Lemoine.

Il donne en exemple le cas d’un client dont la maison repose sur une fondation en blocs de béton. « Il y a des assureurs qui acceptent ce risque, d’autres pas. Et ceux qui l’offrent ont des exclusions particulières qui varient d’un assureur à l’autre. »

Inquiétudes pour les petits cabinets

Le Regroupement craint aussi que les petits cabinets aient de la difficulté à signer des ententes avec des assureurs généralistes si le projet de loi 150 est adopté. Le Regroupement a fait quelques calculs pour appuyer ses dires. Partant du fait que le volume du courtage au Québec est de 4,5 milliards de dollars, il a calculé la part des grands cabinets qui compose le Top 45 du Journal de l’assurance à 3,3 G$, soit 73 % du marché. Les 550 cabinets restants se partagent ainsi un volume de 1,2 G$, pour un volume moyen de 2,2 millions de dollars. Impossible de décrocher un contrat avec un assureur généraliste dans ce contexte, affirme le Regroupement.

« AXA, Jevco et L’Union Canadienne ont disparu. Dans cinq ou dix ans, à quoi ressemblera le marché des assureurs ? On veut donc faire biffer le mot offre du projet de loi pour s’assurer que chaque cabinet traite avec deux assureurs généralistes par segment d’affaires. Il pourra ensuite aller vers les bannières, les grossistes et les assureurs spécialisés », dit M. Lemoine.

Offrir quatre offres aux clients imposera aussi une lourdeur administrative au courtage, dit le Regroupement. « Plusieurs assureurs ne seront pas prêts à gérer une hausse de la demande des soumissions. Ça créera un fossé entre les directs et le courtage. Présenter quatre offres pourra prendre une heure et 15 minutes aux courtiers. Le client ne voudra pas, car il sera assuré en dix minutes avec le direct. L’expérience client qu’offrira le courtier ne sera pas agréable », dit M. Lemoine.

Augmenter la limite d’actionnariat à 49 % d’actions votantes et participantes

Quant à la limite d’actionnariat qu’un assureur peut posséder dans un cabinet de courtage, le Regroupement de la relève pour le futur du courtage l’augmentera à 49 % d’actions votantes et participantes. « Par cela, on s’assure que ce soit un courtier qui contrôle le cabinet. Ça nous permettrait aussi d’avoir accès à la technologie et à d’autres services offerts par les assureurs. De plus, nos images de marque ne font pas le poids face à celle des assureurs. En plus, un assureur est plus flexible dans ses conditions de financement. Aussi, si j’ai un problème à la fin du mois, la banque n’aura pas de pitié. L’assureur sera plus compréhensif », dit M. Lemoine.

Les membres fondateurs du Regroupement

Jean-Philippe Pinsonneault – Vice-président assurance des entreprises – DPA Assurances

Jordy Bessette –  Vice-président – Roméo Bessette et fils inc

Maxime Malouin – Directeur commercial – Arthur Malouin Ltée

Joël Chapdelaine – Vice-président – Chapdelaine Assurances

Jean-Sébastien Blais – Producteur commercial agricole – Assurances Lanoue et Ouellet Inc.

Karine Gosselin – Présidente – Gosselin Assurances

Vincent Lemoine – Vice-président exécutif – Assurances Claude Lemoine Inc.

Olivier Charpentier – Vice-président assurance des particuliers – DPA Assurances

Catherine Dubuc – Vice-présidente – Assurancia Leduc Decelles Dubuc