Clinique virtuelle qui traite les troubles du sommeil à distance par application mobile, Haleo a rapporté les résultats d'une récente publication selon laquelle l’anxiété liée à la COVID-19 joue un rôle important dans la sévérité et la persistance des problèmes du sommeil. 

Selon une publication de l'Université d'Ottawa intitulée Profiles of sleep changes during the COVID-19 pandemic: Demographic, behavioural and psychological factors, les symptômes de troubles du sommeil au Canada sont passés de 40 % de la population canadienne avant la pandémie à 55,5 % pendant la pandémie, soit une augmentation de 36 %.

La statistique a été présentée lors du congrès annuel d’Associated Professional Sleep Societies (APSS), qui s’est déroulé en aout 2020. « Les événements mondiaux stressants ainsi que les difficultés personnelles sont particulièrement connus pour augmenter les difficultés de sommeil, et la pandémie actuelle de COVID-19 ne fait pas exception. L’augmentation du stress et de l’anxiété chez bon nombre de personnes a des répercussions majeures sur la qualité du sommeil de milliers d’entre elles », mentionne d’emblée Haleo dans son document qui rapportent les résultats.

Haleo rapporte aussi que 40 % des Canadiens sont aux prises avec des troubles du sommeil. L’insomnie en fait partie. Deux fois plus élevés que ceux liés à la santé mentale, les couts liés à la perte de productivité qu’entraine l’insomnie atteignent 16,1 milliards de dollars par an au Canada, rapporte Haleo. Cette perte de productivité prend la forme d’absentéisme et de présentéisme. De plus, 24 % des couts d’accidents et d’erreurs de travail sont liés à l’insomnie.

L’anxiété sape le sommeil

« Bien que les causes de l’insomnie soient multiples et uniques à chaque individu, l’anxiété joue un rôle important dans la sévérité et le maintien des problèmes de sommeil. Les événements mondiaux stressants ainsi que les difficultés personnelles sont particulièrement connus pour augmenter les difficultés de sommeil, et la pandémie actuelle de COVID-19 ne fait pas exception », ajoute Haleo.

Le Portail de l’assurance s’est entretenu avec deux fondateurs d’Haleo, son PDG Bradley Smith et sa directrice clinique Régine Denesle. Psychothérapeute, Mme Denesle est également fondatrice et directrice de la Clinique d’insomnie du Centre d’études avancées en médecine du sommeil (CÉAMS) de l’Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal. Même si elle englobe tous les symptômes et non seulement l’insomnie chronique, l’augmentation de 36 % des troubles du sommeil « est quand même une augmentation importante, juste en quelques mois », signale M. Smith.

Selon Mme Denesle, un sommeil de courte durée et de pauvre qualité va de pair avec un éventail d’effets néfastes sur la santé mentale et physique qui n’est pas à négliger. « Tout le monde peut ressentir des symptômes d’insomnie de temps à autre en période de stress, ce qui est le cas actuellement », dit Mme Denesle.

La psychothérapeute signale en outre qu’il existe un lien étroit entre anxiété et insomnie. « Avec la pandémie que nous vivons actuellement, l’anxiété augmente beaucoup et la santé mentale vacille pour beaucoup de gens. Tout cela se renforce en boucle, ce qui explique l’explosion des cas », observe Mme Denesle. Elle note par exemple que 90 % des personnes souffrant de dépression ont des problèmes sérieux d’insomnie. En général, les deux tiers des personnes atteintes de troubles mentaux souffrent également d’insomnie, signale Haleo.

L’insomnie pointée du doigt

Régine Denesle souligne que l’insomnie est le principal trouble du sommeil derrière la forte hausse du taux de gens affectés. « L’insomnie a toujours été le gros morceau de ces troubles. Elle en représentait 17 % avant la pandémie. Maintenant, elle en représente peut-être 25 % à 30 % », dit-elle.

Deuxième trouble du sommeil le plus répandu, l’apnée obstructive du sommeil en représente à peu près 10 %, selon Mme Denesle. Elle n’écarte pas que la tendance à manger davantage ou boire plus d’alcool en temps de confinement peut entrainer une augmentation des apnées du sommeil. Ce trouble est souvent lié aux problèmes de surpoids, rappelle-t-elle.

Parmi d’autres troubles du sommeil, Mme Denesle évoque les cauchemars, un trouble qui touche 8 % de la population. Il s’agit de gens qui feront par exemple plusieurs cauchemars par semaine. Ces troubles ont aussi augmenté en temps de pandémie, alors que les gens intégreront dans des rêves des contenus angoissants en période de stress intense. « Les autres troubles du sommeil très marginaux, de nature organique et qui n’ont pas plus d’incidence en temps de pandémie », ajoute Mme Desnelle.

Regard sur la clientèle

En comparant la fréquentation de la clinique avant et après la pandémie, Bradley Smith révèle avoir connu une hausse de 2,5 fois des consultations à l’été, une période habituellement plus creuse. Haleo offre ses services auprès d’entreprises et de régimes collectifs d’assurance. « Nous avons aussi eu plusieurs nouveaux clients qui ont rapidement changé de cap pour inclure le service d’Haleo dans le programme de santé et mieux-être de l’entreprise. Nous avons dû tripler le nombre de thérapeutes dans la clinique, depuis le début de la pandémie », dit-il. Haleo compte plus d’une quarantaine de thérapeutes actifs dans sa clinique, a ajouté M. Bradley.

Pour sa part, Régine Denesle mentionne que tous ces thérapeutes sont des psychologues ou des psychothérapeutes qui détiennent un permis de l’Ordre des psychologues du Québec. Haleo soigne les troubles du sommeil en appliquant la thérapie cognitivocomportementale (TCC). La clinique mise sur une thérapie accessible par application mobile pour soigner les troubles du sommeil.

Résultats probants

Mme Denesle soutient que la thérapie à distance a fait ses preuves. « Des études pilotes ont démontré que nous avons les mêmes résultats cliniques d’amélioration que dans une clinique en face à face. Nous obtenons un taux de rémission entre 80 % et 85 % après cinq sessions de 30 minutes », révèle Mme Denesle. Au besoin, le traitement peut s’étendre à huit sessions.

Qu’en est-il des échecs ? C’est une thérapie exigeante parce qu’elle demande de faire des choses qui favorisent le sommeil et d’en éviter d’autres qui lui nuisent, répond Mme Denesle. « Lorsque l’on observe les recommandations à la lettre, c’est garanti qu’il y aura un résultat favorable, car cette thérapie se fonde sur la physiologie du sommeil, identique à tous les êtres humains. Mais il y aura toujours entre 10 et 15 % des gens qui se diront incapables de le faire, malgré tous nos efforts et explications. »

Bradley Smith explique pour sa part que la restriction du sommeil recommandé par Haleo en rebute certains. « Les gens ont de la difficulté avec la restriction du sommeil. Pour renforcer le sommeil, il faut passer moins de temps dans le lit. Des gens vont se coucher à 9h30 pour pouvoir s’endormir à minuit. Nous leur demanderons d’observer une période de sommeil de six heures », dit-il.

Nous redonnerons au sommeil la priorité, ajoute Mme Denesle. « Il s’agit de remettre sur les rails notre horloge biologique, soit le cycle circadien. Nous augmenterons la propension au sommeil de la personne par la privation de sommeil. Une fois qu’elle a consolidé un bon sommeil de 6 heures, nous rallongerons la période qu’elle passe au lit par tranche de 30 minutes », précise-t-elle.

Un investissement à long terme

Selon Bradley Smith, une revue des publications scientifiques et de l’expérience clinique révèle clairement que le sommeil joue un rôle très important dans la santé mentale de l’individu. « Un programme de santé et mieux-être doit prendre en compte une stratégie pour aider ses employés à mieux dormir. Nous ne verrons pas nécessairement des résultats à court terme en contexte de pandémie, mais à long terme, nous croyons que les entreprises qui investissent dans la santé mentale des employés réaliseront des économies dans leur régime collectif, et obtiendront une meilleure performance de leurs employés », soutient-il.

Régime Denesle renchérit : l’insomnie et les troubles du sommeil en général augmentent les risques de développer d’autres troubles métaboliques, tels le diabète et les maladies cardiovasculaires. « Les troubles du sommeil peuvent entrainer plusieurs risques très couteux pour une entreprise, de la somnolence, moins de vigilance, des accidents… Tout cela est difficile à comptabiliser dans l’enveloppe totale des couts directs et indirects de l’insomnie, mais ils sont énormes », dit-elle.

Un marché en développement

Fondée en 2015, Haleo a démarré ses activités par un projet pilote auprès des employés de Desjardins Assurances. Le Mouvement Desjardins est demeuré un client au terme de ce projet pilote, dit M. Smith.  « Nous avons aussi une entente avec SSQ Assurance depuis un an ».

Bradley Smith dit en outre que les services d’Haleo sont déjà partiellement ou totalement couverts par un grand nombre de régimes d’assurances collectives à travers le Canada.  « Nous travaillons présentement avec plusieurs assureurs afin de mieux intégrer nos services aux leurs et de simplifier les démarches d’accès et de remboursement pour leurs membres », signale le PDG d’Haleo.