Mathieu Boudreault

L’actuaire Mathieu Boudreault, professeur au département de mathématiques de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), sera le chercheur principal d’un projet de recherche sur le partage du risque financier associé aux inondations.

Le ministre fédéral de la Protection civile, Bill Blair, accorde un financement de 585 000 $ pour ce projet de recherche qui examinera l’impact financier des inondations et l’évolution des politiques publiques en matière de résilience aux changements climatiques.

La recherche se déroule sur trois ans. L’annonce a été faite par voie de communiqué le 23 novembre dernier par le ministère de la Sécurité publique du Canada

Le projet est mené en partenariat avec le Bureau d’assurance du Canada, l’Université Laval et l’Université de Waterloo. Il s’appuie notamment sur le rapport interdisciplinaire du Groupe de travail sur l’assurance contre les inondations et la réinstallation, publié à la fin août

La thématique 

Dans le résumé du projet intitulé « Modèles canadiens de partage des risques d’inondations face aux changements climatiques », le professeur Boudreault explique que le projet vise à « élaborer des solutions scientifiques viables pour la gestion financière des inondations au Canada et pour accélérer la mise en œuvre de ces solutions au pays ». 

Les stagiaires associés au projet de recherche appliqueront leurs compétences techniques en actuariat tout en acquérant des connaissances importantes sur les processus physiques des inondations, l’adaptation au changement climatique et l’assurance contre les inondations.

On espère ainsi former des spécialistes de calibre international en modélisation des risques de catastrophe, des gestionnaires de risques d’inondations, des experts en gouvernance et en politiques et des analystes des données climatiques.

La suite du rapport 

Joint par le Portail de l’assurance, Mathieu Boudreault confirme qu’il vise à poursuivre les travaux sur des aspects qui n’ont pas été abordés dans le rapport du groupe de travail sur l’assurance inondations. Il est notamment question de mieux prévoir l’évolution démographique, de la richesse des populations et de l’impact des changements climatiques. 

« On veut contribuer à créer des plans de partage de risques qui sont viables à long terme », dit-il. Avec son collègue Michael Bourdeau-Brien de l’Université Laval, M. Boudreault a participé au groupe de travail.

Le rapport du groupe de travail tentait de voir l’impact des modèles appliqués ailleurs dans le monde en matière de partage de risques. Le projet dont M. Boudreault est le chercheur principal vise notamment à mieux cibler les territoires à risque et les populations les plus vulnérables dans le plan de partage de risques. 

« Dans les paramètres d’un tel plan, on peut se demander par exemple si l’on doit rendre l’assurance inondations obligatoire pour les gens qui ont besoin d’un prêt hypothécaire », dit-il.

Même si le gouvernement fédéral doit lancer sous peu son programme national d’assurance inondations, Mathieu Boudreault souligne que les paramètres d’un tel programme sont appelés à être révisés en fonction de l’évolution des connaissances. 

Le futur programme national vise à rendre accessible et abordable au plus grand nombre l’assurance contre le risque d’inondations. « L’accès à l’assurance, c’est une chose. Mais il faut aussi prévenir le risque à la source avec des mesures de mitigation, la relocalisation étant la mesure extrême », dit-il.

L’objectif du projet de recherche est de mieux inclure les connaissances acquises par les spécialistes des données climatiques dans les prévisions actuarielles. « Si l’on veut prendre les meilleures décisions en politiques publiques, il faut être capable de chiffrer les choses, par exemple sur l’évolution à long terme de la prime d’assurance inondations », poursuit-il. 

De meilleures projections 

La profession actuarielle repose sur des hypothèses axées sur l’historique des réclamations. Or, on sait déjà que le réchauffement de la température aura des impacts nettement plus imprévisibles sur les extrêmes climatiques. « C’est ce sur quoi je travaille depuis des années, soit de mieux combiner l’approche statistique avec les sciences climatiques », indique-t-il. 

Les actuaires doivent faire des projets de pertes. Ils doivent donc apprendre à intégrer dans leurs prévisions les modèles climatiques, un domaine où la connaissance se raffine grâce aux investissements importants qui y sont consacrés, ajoute le professeur. 

Avec Michael Bourdeau-Brien et Thierry Villeneuve, M. Boudreault est l’un des co-auteurs du chapitre 15 du livre récemment lancé par le Réseau Inondations Intersectoriel du Québec. Ils y abordent les conséquences des inondations sur les finances des ménages.