Changer le mode de rémunération des conseillers financiers pourrait avoir une incidence notable sur le nombre de conseillers qu’on retrouve au pays. Une telle décision pourrait même ouvrir la porte toute grande aux banques dans le marché de l’assurance vie.Ces mots sont ceux de Terry Zive, un conseiller financier réputé, qui est aussi président des relations gouvernementales de la prestigieuse Conference for Advanced Life Underwriting (CALU).
En entrevue au Journal de l’assurance, il a dit croire que le professionnalisme des conseillers financiers continuera de faire l’objet de discussions. Il attribue ce phénomène à la pénurie de nouveaux talents qui sévit dans le métier. Il dit même y voir un phénomène de cause à effet. Un des sujets de discussion liés au professionnalisme des conseillers financiers est la rémunération. Il adresse toutefois une mise en garde aux tenants de l’abolition des commissions.
Exemple du Royaume-Uni
Il dit que le Canada pourrait peut-être suivre l’exemple du Royaume-Uni et de l’Europe. Au Royaume-Uni, les autorités ont carrément aboli les commissions. La personne qui souscrit une assurance paie désormais des honoraires. Résultat? Le nombre d’agents a chuté de manière spectaculaire, passant d’environ 150 000 à 50 000, aujourd’hui.
« Ce n’est pas l’idéal auprès des clientèles à revenu faible ou moyen, dit M. Zive. On se retrouve finalement à déserter ces marchés, qui sont alors mal desservis. Selon le milieu, et surtout si les banques tâtent de la distribution, ce sont elles qui ramasseront la clientèle. »
Quant à la tarification et aux changements à y apporter, il signale que, pour des raisons à saveur quelque peu politique, le prix des polices ne varie plus selon le sexe en Europe, même si les femmes vivent généralement plus longtemps que les hommes. L’entrée des banques en assurance évoluera selon deux tendances, croit M. Zive. Elles prendront une plus grande part de marché et elles pourraient se concentrer sur la distribution de produits moins complexes et moins gourmands en intensité de capital. « Les banques vont vouloir s’en tenir à leur formule : peu de conseils, volume élevé. »
Autre tendance chez les compagnies d’assurance : la nécessité d’élaborer des produits qui laissent davantage de risque au consommateur, afin de préserver l’équilibre entre les exigences règlementaires et l’intérêt des actionnaires.
On pourrait y parvenir de diverses façons : on a déjà retiré un certain nombre de produits et de types de garanties du marché. Certains pourraient certes réapparaitre si les taux d’intérêt s’y prêtent (l’assurance vie universelle et ses dérivés, par exemple, doivent pouvoir accéder à des obligations rapportant environ 4 % sur dix ans pour couvrir leurs frais, soit plus du double de leurs revenus actuels). Les assureurs pourraient aussi, par exemple, modifier certaines caractéristiques ou les retirer complètement.
« Les compagnies vont créer des produits qui leur permettront de réaliser des bénéfices en réponse à cette dichotomie incroyable imposée par le marché : les sociétés d’assurances et leurs contrats sont par définition axés sur la durée, tandis que le marché boursier carbure au court terme. » À cela s’ajoutent la concurrence – qui se limite à un petit nombre d’intervenants au Canada – et les contraintes des organismes de régulation, ajoute le conseiller : « J’ai bon espoir que le marché trouve une solution; je crains que cela nous fasse perdre les produits avec lesquels nous avons l’habitude de travailler. »