Le 5 décembre dernier, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière a déclaré Charlito Hael (certificat no 137973, BDNI no 1468871) coupable des 23 chefs de la plainte disciplinaire. L’intimé, qui se représentait seul, connaitra sa sanction à la suite d’une prochaine audience.
L’ensemble de la procédure ayant eu lieu en anglais, la décision a été publiée dans cette langue. La décision survient plus de 18 mois après les audiences. Toutes les infractions contreviennent à divers articles du Code de déontologie de la Chambre. Le comité prononce l’arrêt conditionnel des procédures à l’égard des autres dispositions alléguées au soutien de la plainte.
Sept clients distincts sont mentionnés dans les 22 premiers chefs de la plainte, et les gestes qu’on reproche à l’intimé ont été posés entre mai 2014 et mai 2016 à Pierrefonds. Les clients désiraient une police couvrant les frais médicaux de leurs proches en visite au Canada pour de longs séjours.
L’émission d’un visa de touriste pour un séjour de longue durée requiert une preuve de couverture médicale. L’intimé affirmait que la période de couverture pouvait être ajustée en fonction des dates effectives du séjour. Il a émis des certificats de couverture obtenus par le service de souscription en ligne, mais les clients n’ont jamais vu les polices. Celles-ci ne devenaient valides qu’au paiement de la prime.
À sept reprises, l’intimé a accordé des rabais de primes, variant de 10 % à 53 %, pour des polices d’assurance en soins médicaux souscrites auprès de Manuvie. Pour offrir ces rabais, l’intimé demandait aux clients de payer la prime par l’entremise de son cabinet, Apo Financial Services. Il prétendait que ces rabais étaient offerts aux employés de l’assureur. L’intimé a reconnu n’avoir pas consulté l’assureur avant d’offrir de tels rabais. En agissant ainsi, il a contrevenu à l’article 36 du Code de déontologie.
Les chèques étaient déposés dans l’un des comptes du cabinet ou ses comptes personnels. Dans le cas des sept clients, les sommes versées n’ont pas servi à payer les primes, mais ont été plutôt été utilisées pour payer les dépenses courantes de l’intimé. Ces appropriations de fonds contreviennent à l’article 17 du Code (sept chefs).
En omettant de payer les primes comme il s’était engagé à le faire, l’intimé a créé un découvert d’assurance (8 chefs), en infraction avec l’article 24 du Code.
Enfin, l’intimé est déclaré coupable d’entrave au travail du syndic, entre le 31 janvier et le 17 février 2017 (un chef). Il a fourni des documents incomplets à l’enquêteuse, en plus d’affirmer qu’un seul client était concerné par le stratagème au cœur de la plainte.
Un stratagème maintes fois répété
M. Hael a utilisé ses propres cartes de crédit ou celles de son épouse pour payer certaines de ces primes, mais bien après l’arrivée du bénéficiaire de la police au Canada. Lorsqu’il a été contacté pour une réclamation, il a dit au client que sa propre police d’assurance responsabilité allait couvrir les frais médicaux.
Cela a été le cas pour le premier client mentionné dans la plainte, lequel a souscrit quatre polices auprès de l’intimé. Des preuves de paiement ont été fournies pour seulement deux d’entre elles. Son beau-père a été hospitalisé en avril 2016 au Jewish General Hospital, et les frais médicaux ont totalisé 71 680 $. En faisant sa réclamation à Manuvie, le gendre a découvert que la police n’était pas valide faute de paiement. Il a porté plainte auprès de l’Autorité des marchés financiers lorsque l’assureur responsable de couvrir les actes professionnels de l’intimé a refusé de payer les frais médicaux.
La deuxième cliente a payé 2 200 $ pour des polices qui n’ont jamais été émises. Le troisième client a voulu couvrir le séjour de son beau-père, et ce dernier est reparti en Inde après trois mois, au lieu des 12 mois prévus. Manuvie affirme n’avoir trouvé trace du paiement et l’intimé n’a pu fournir la preuve que celui-ci avait été encaissé. Il a lui-même remboursé une partie de la prime. Une deuxième police a été payée pour couvrir le second séjour du beau-père, et là encore, la police n’est pas entrée en vigueur faute de paiement de la prime.
Dans le cas de la quatrième cliente, celle-ci a demandé un remboursement à l’assureur étant donné que le séjour de sa belle-mère avait été moins long que prévu. Manuvie a remboursé la somme dans le compte de la carte de crédit utilisée pour payer la prime. L’intimé n’a retourné qu’une partie de cette somme à la cliente.
Pour sa défense, l’intimé a fait intervenir un ami et ancien représentant de Manuvie, Bumani Yembe. Ce dernier a affirmé avoir été témoin des nombreux problèmes administratifs de l’assureur au siège social de Waterloo (Ontario), notamment des chèques égarés. Selon le comité, ce témoignage était non-pertinent dans la mesure où il relevait de la responsabilité de l’intimé de vérifier que les primes étaient payées et les sommes déduites de ses propres comptes.
L’intimé a aussi témoigné de ses efforts infructueux, menés entre octobre 2016 et février 2017, pour couvrir sa responsabilité en lien avec la plainte du premier client. Il a même affirmé à l’Autorité que ce client avait menti à propos des conditions préexistantes sur la santé de son beau-père. Il a nié sa culpabilité à l’égard de tous les chefs devant le comité.
Les certificats de l’intimé ont été suspendus en mai 2017 et plusieurs ordonnances ont été rendues à son endroit. Quelque 97 polices ont par la suite été invalidées. Il travaillait dans l’industrie depuis 1998 et ses premiers clients étaient originaires des Philippines, puis d’autres communautés ethniques. Il est devenu courtier à plein temps en 2004.