Un vent de renouveau souffle sur le marché des fonds distincts, de la conception du produit à sa tarification. Les compagnies d’assurance redoublent en effet d’ingéniosité pour décrocher une plus grande part de ce marché hautement compétitif.Le lancement d’un produit « à décision unique » importé des États-Unis, soit le produit assorti d’une garantie de retrait minimum (GRM), a stimulé le marché en 2007. Cette innovation a aidé la Financière Manuvie, la Financière Sun Life et L’Industrielle Alliance à accroître leur part de marché par rapport à l’année précédente. Ce produit, à mi-chemin entre une rente et un fonds de revenu de retraite, suscite autant d’intérêt au Canada qu’au sud de la frontière.

« En fait, la hausse des ventes est principalement attribuable au lancement, en avril, de SunWise Elite Plus », affirme Paul Fryer, vice-président du développement des produits individuels à la Sun Life. Il prétend que les données démographiques sont intimement liées à cette demande et qu’il faut s’attendre à ce que les ventes poursuivent leur ascension. Comme les baby-boomers approchent de la retraite, ils voudront des produits qui leur permettent de demeurer sur les marchés boursiers et de générer des revenus, tout en protégeant leur capital.Chez Sun Life et Manuvie, les produits avec garantie de retrait minimum ont généré de nouvelles ventes, ont révélé les deux compagnies en entrevue au

Journal de l’assurance. Il ne s’agit donc pas de cannibalisation ou de transfert de fonds en provenance d’autres familles de fonds au sein de l’entreprise. Ces investissements peuvent provenir d’obligations, de CPG et de fonds communs de placement à revenu fixe. Aussi, une partie de cet argent a été soutirée aux concurrents.

Les compagnies d’assurance se livrent une chaude lutte pour accroître leur clientèle, ce qui porte Doug Conick, vice-président des produits de fonds de placement de la Financière Manuvie, à croire que les concepts continueront à évoluer. Ils changeront non seulement dans les programmes pour offrir une garantie de prestations à vie mais aussi dans l’ensemble de la classe de produits.

Marchés mondiaux

Selon Investor Economics, c’est Transamerica Vie Canada qui a perdu la plus importante part de marché l’an dernier. La compagnie a vu lui échapper tout un point de pourcentage, passant de 7,6 % en 2006 à 6,6 % en 2007.

Geraldo Ferreira, vice-président du développement et de la gestion des produits de placement d’AEGON Gestion de fonds et Transamerica Vie, croit que ce recul est dû à plusieurs raisons.

Le risque relié au taux de change est certes au nombre des coupables. Une importante portion des fonds distincts de Transamerica appartiennent aux catégories de fonds équilibrés mondiaux et de fonds d’actions étrangères. Or, le dollar canadien s’étant nettement redressé par rapport aux autres devises en 2007, le rendement des fonds s’en est ressenti. L’assiette d’actifs de la compagnie a essuyé le contrecoup.

Il impute le déclin aux retraits par des investisseurs de blocs de fonds distincts de longue date. Même si Transamerica ne dispose pas de données quant aux fonds qui quittent l’entreprise, il estime que le lancement des produits à garantie de retrait minimum arrive à point nommé. « C’est assurément un produit vedette qui allie les avantages d’une prestation de décès et ceux d’un revenu constant, ajoute-t-il. Il convient à la perfection au marché des boomers. »

D’ailleurs, Transamerica collabore avec AEGON USA à la conception et à la tarification d’un tel produit pour le marché canadien. M. Ferreira prévoit son lancement à la fin de 2008. « J’ai bien l’impression que, d’ici cinq ans, toutes les grandes compagnies d’assurance évoluant dans le marché des fonds distincts offriront un produit assorti d’une garantie de retrait minimum, a-t-il indiqué. Certaines ont dit ne pas s’y intéresser, mais je ne vois pas comment elles peuvent passer outre, compte tenu de la réussite de Manuvie et de l’immense marché en quête de garanties de revenu. Il ne faut pas non plus oublier le retentissant succès de ces produits aux États-Unis. »

Barème de série Elite

Dans ce segment, les frais sont un élément à ne pas négliger. Manuvie a déjà créé un barème de série Élite qui accorde une réduction de frais de 50 à 75 points de base (suivant le type de fonds) aux clients qui investissent plus de un million$. Jim Gibson, directeur du marketing des produits d’accumulation à l’Empire, souligne que les ratios de frais de gestion d’Empire, qui sont peu élevés et généralement en deçà de la moyenne du secteur, ne sont pas étrangers à l’accroissement de la part de marché de l’entreprise. Empire a gagné plus de un demi pourcent l’an dernier. Il pense que les autres compagnies d’assurance tenteront d’abaisser leurs ratios de frais de gestion avec le temps.

L’appariement de fonds distincts avec d’autres produits et services constitue une autre tendance à suivre. M. Fryer indique qu’aux États-Unis les fonds distincts ont été regroupés avec de l’assurance de soins de longue durée de manière à former un ensemble complet pour veiller aux besoins des clients pendant leurs vieux jours. Les Canadiens qui prendront leur retraite feront face à des problèmes aussi complexes, dit-il. Jumelés au bon produit en matière de soins de santé, les fonds distincts pourraient représenter une solution intéressante.

Andrew Rickard