La volatilité des marchés a rendu les investisseurs nerveux. Les titulaires de contrats de vie universelle sont tout le contraire.Inquiets de l’effervescence des marchés boursiers, les investisseurs se sont rabattus sur les fonds de fonds. Au point où l’Institut des fonds d’investissement du Canada rapporte que les acquisitions de fonds de fonds ont surpassé les ventes de fonds vendus individuellement par environ 12 pour un en 2007.
Les assurés en vie universelle sont loin de là! Les stratégies d’investissement qu’ils préconisent reflètent plutôt le besoin spécifique pour lequel ils acquièrent leur police.
En fait, plusieurs d’entre eux choisissent allègrement des fonds de croissance ou des fonds individuels plus risqués que la moyenne. Dans les derniers mois, nombre d’assureurs ont lancé des gammes de fonds individuels pour assouvir la soif des clients envers de nouvelles options d’investissement. Pas seulement des fonds de fonds ou de portefeuille.
Les fonds de fonds connaissent aussi un fort succès comme option d’investissement au sein des polices universelles. Mais c’est la nouveauté de ce genre d’options qui susciterait l’engouement plutôt qu’une réaction aux marchés instables.
Chez Manuvie, par exemple, la frénésie s’est emparée des options d’investissement basées sur le rendement des fonds de fonds. « Les dépôts dans ces options ont connu une croissance de 35 % au cours des deux dernières années », signale Paul Smith, vice-président marketing et élaboration des produits, assurance individuelle.
Avec ses 90 options liées à des fonds de tierce partie, la catégorie fonds de fonds constitue maintenant le quart de l’actif total dans les vies universelles de la compagnie, soit 350M$ d’actif sous gestion sur près de 1,4 milliard$.
Lancés il y a à peine deux ans, les fonds de répartition de l’actif activement gérés ont depuis obtenu une croissance de 98 %. L’actif sous gestion est toutefois modeste dans cette catégorie, soit 33M$.
Ce sont toutefois les comptes à intérêt garanti qui forment la plus importante catégorie d’option d’investissement au sein des vies universelles de Manuvie, avec 500M$ d’actif sous gestion, ou 30 % de l’actif total dans les contrats de vie universelle.
Comme plusieurs de ses confrères interviewés par le Journal de l’assurance, M. Smith n’attribue toutefois pas cette tendance à un désir de se protéger contre la volatilité actuelle dans les marchés boursiers, mais bien au besoin qui a motivé l’assuré à acquérir sa police universelle.
« Bien des clients en assurance vie universelle cherchent avant tout à financer le coût d’assurance de leur police avec leurs dépôts. Ils optent ainsi pour des options garanties ou équilibrées parce qu’ils investissent des sommes importantes dans la police. Ils espèrent ainsi que les gains obtenus leur permettront d’acquitter le coût d’assurance. Ils veulent des rendements réguliers, beau temps mauvais temps. »
Cet enjeu est tout aussi crucial pour ceux qui, près de la retraite, investissent dans la vie universelle pour s’en servir comme levier financier dans une dizaine d’année, sous forme d’emprunt avec police en garantie, par exemple.
Quant à eux, les indices passifs (S&P/TSX60, S&P 500, EAEO, etc.) ont depuis longtemps une place majeure dans les polices universelles de l’assureur. Ils comptent actuellement pour 450M$ de l’actif sous gestion au sein de ces polices.
La croissance des nouveaux dépôts dans des comptes indiciels à gestion passive se fait cependant plus modeste que par le passé, signe que cette catégorie d’options a atteint sa maturité. « Les clients sortent des vieux indices pour aller vers les titres à revenu fixe. Ils vont aussi vers les fonds de fonds et les fonds de répartition d’actifs, les deux catégories les plus populaires ces temps-ci », révèle-t-il.
Selon Michel Fortin, vice-président, marketing et développement des ventes pour les marchés individuels chez Standard Life, les fonds de fonds sont populaires parce qu’ils permettent tant à l’assuré qu’au conseiller d’éviter un suivi serré du portefeuille de placement au sein des vies universelles.« Les gestionnaires et les experts en placement sont moins émotifs aux aléas du marché à court terme. Ils évitent le fameux market timing, (l’achat au moment que l’investisseur considère propice) où les investisseurs moins aguerris finissent toujours par acheter haut et vendre bas », soutient M. Fortin.
Au 31 mars 2008, Standard Life comptait 41,40 % de son actif sous gestion en vie universelle en comptes indiciels à gestion passive et 34,23 % de son actif sous gestion en vie universelle en dépôts à terme. Les comptes de répartition stratégique de l’actif à gestion passive ont compté pour 11,71 % de cet actif, les comptes à gestion active pour 10,54 % et les comptes de portefeuilles prédéterminés à gestion active pour 2,12 %.
Pour sa part, Joe Kordovi dit que les clients qui priorisent la protection d’assurance par rapport à l’accumulation sont ceux qui effectuent les choix les plus prudents. Au point où ils privilégieront même les comptes à intérêt garanti par rapport aux fonds de fonds, remarque le vice-président et actuaire en tarification pour les produits d’assurance vie chez Transamerica Vie Canada.Dans le produit
AvantageProspérité axé sur l’accumulation, les fonds de fonds IMAXX ont représenté 38 % des actifs sous gestion. Dans le produit AvantagePatrimoine axé sur la protection, ils n’ont représenté que 15 % des actifs. Les clients d’AvantagePatrimoine, souvent âgés, prennent moins de risques et vont davantage du côté des comptes à intérêt garanti, ajoute-t-il.
En vie universelle chez Transamerica, les fonds IMAXX lancée en 2001 demeurent les options les plus populaires, avec 28 % de l’actif total en 2007, contre 20 % pour les comptes à intérêt garanti.
Les portefeuilles de fonds TOP qui traquent le rendement de fonds de tierce partie sont également fort populaires. Dans AvantagePatrimoine, c’est le TOP équilibré qui l’emporte. Dans AvantageProspérité, on observe plus un mélange entre TOP équilibré, croissance et croissance audacieuse.
Les fonds de tierce partie ont en effet le vent en poupe au sein des polices de Transamerica. En 2007, les options d’indices et de fonds individuels ont compté pour 23 % de l’actif total investi dans les vies universelles de Transamerica. Or, Joe Kordovi remarque une forte popularité des fonds de tierce partie activement gérés offerts sans frais de gestions additionnels dans sa police sans bonis. Les plus populaires : TD Dividendes de croissance, CI Signature Sélect, Mackenzie Cundill Valeur et AGF Actions internationales.
Pas seulement les fonds de fonds
Chez AIG Vie du Canada, l’heure est plutôt aux options de fonds individuels avec le lancement tout récent de 17 nouvelles options d’investissement basées sur des fonds sous-jacent socialement responsables (voir encadré La Vie universelle d’AIG tourne au vert).D’ailleurs, Steve Carter n’observe pas de tendance marquée envers les fonds de fonds dans les vies universelles. Les options basées sur ces fonds ne comptent actuellement que pour 10 % de l’actif sous gestion au sein de ses polices universelles, ajoute le vice-président et actuaire en tarification pour les produits d’assurance vie.
« Les fonds individuels sont plus populaires que les fonds de fonds au sein de nos polices universelles », observe M. Carter. C’est que l’univers de plus de 400 fonds communs qu’offre AIG au sein de ses polices universelles permet au conseiller d’offrir une bonne diversification sans recourir à des fonds de fonds.
Par contre, M. Carter note que les comptes à intérêt garanti demeurent une option très prisée pour investir dans la vie universelle.
Sylvain Gagné n’observe pas non plus de tendance comme tel envers les options de fonds de fonds au sein des polices universelles Trilogie d’Empire Vie. « Ce que nous voyons, ajoute-t-il, c’est que les assurés en vie universelle n’investissent pas dans des fonds à haut risque. Ils optent pour des fonds de risque moyen à conservateur, pas seulement les fonds de fonds et les fonds de répartition de l’actif mais aussi les fonds équilibrés », observe le vice-président régional pour le Québec chez Empire Vie
Gestionnaires de comptes chez Empire Vie, Réal Picard estime que la moitié des nouveaux dépôts vont vers les options à taux garantis. L’autre moitié revient aux fonds indiciels. L’assureur n’a pas segmenté l’actif géré dans les polices universelles en termes de catégories d’option, mais compte le faire bientôt.
Est-ce une avenue gagnante d’investir dans des comptes à intérêt garanti lorsque les taux d’intérêt sont si bas? Dans une vie universelle oui, clame M. Picard. « Le terme 10 ans prévoit un plafond garanti de 2,5 % et la vie universelle, un boni de 1,5 %, ce qui donne un rendement garanti de 4,0 % à l’abri de l’impôt. En dehors de la vie universelle, vous avez besoin d’un rendement brut de 7,0 % à 8,0 % pour obtenir la même performance. »
M. Picard rappelle par ailleurs que les investisseurs prennent leurs risques de placement hors de la vie universelle. « Plusieurs assurés prévoient utiliser plus tard la valeur accumulée dans leur vie universelle à des fins de retraite, alors ils veulent prévoir combien ils auront accumulé le moment venu. »
Chez Sun Life, les assurés n’ont pas hésité à aller vers plus de risque au sein de ses options de portefeuilles gérés. En effet, Gregor Grant a révélé par courriel avoir observé un mouvement de ses portefeuilles équilibrés vers ses portefeuilles d’actions canadiennes. Le directeur, développement des produits individuels d’assurance vie note aussi plus d’entrées de fonds dans les portefeuilles d’actions américaines.
Présentement, l’actif dans les portefeuilles gérés en vie universelle de Sun Life se répartit à 50 % dans la catégorie équilibré, 29 % dans la catégorie actions, 12 % dans la catégorie internationale, 8 % dans la catégorie à revenus fixes et 1,5 % dans la catégorie actions américaines.
Sur le terrain
Habitué de rencontrer les conseillers expérimentés dans le cadre du développement des affaires d’AIG Vie au Québec, Daniel C. Duchesne croit que la vie universelle se segmente en deux camps. Il y a celui des polices axées d’abord sur la protection d’assurance. Elles sont souvent destinées au marché familial, telle La Prévoyance, d’AIG Vie.
« Les nouveaux dépôts dans ces polices vont dans les portefeuilles de fonds, remarque le représentant senior au marketing en assurance individuelle chez AIG Vie. Ainsi, les conseillers prémunissent leurs clients contre une surexposition dans des secteurs ou des titres volatils, en plus de faciliter le suivi de la police grâce au rééquilibrage automatique.
Il y a ensuite le camp des polices destinées à l’accumulation de gains à l’abri de l’impôt. « Dans les marchés de gestion de fortune, il s’agit souvent de dépôts de centaines de milliers de dollars en prime unique ou répartis sur plusieurs années. Ces assurés sont des investisseurs actifs qui veulent créer leur propre portefeuille d’investissement à partir de fonds individuels spécifiques », précise M. Duchesne.
Dans l’ensemble, un plus grand nombre d’assurés opteront pour les portefeuilles de fonds. Or, en terme d’actif sous gestion, la balance penchera du côté des fonds individuels à indice ou activement gérés.
Accumulation
Chez l’agent général Groupe Cloutier, le vice-président, vente et développement des affaires, Patrick Cloutier, croit pour sa part que la vie universelle sans bonis constitue la structure idéale pour l’accumulation. Avec ses frais réduits, cette police a rendu très attrayants les fonds de tierce partie. Plusieurs produits de ce type offrent en effet ces fonds sans frais supplémentaires. « C’est le marché des conseillers expérimentés en fonds communs. Ils savent comment monter un portefeuille avec des fonds individuels. »
En matière d’accumulation, la vie universelle offre des ententes entre assureurs et compagnies de fonds, lesquelles donnent accès à des fonds que biens des investisseurs individuels ne pourraient s’offrir autrement, rappelle M. Cloutier. « Le produit de Canada-Vie donne accès à trois fonds ABC gérés par Irwin Michael, pour un dépôt annuel de 500$. Aux investisseurs hors vie universelle, le fonds ABC Fundamentals, par exemple, exige un dépôt minimum de 150 000$ », explique M. Cloutier.
Le produit de Sun Life offre pour sa part des fonds de Phillip Hager & North, dont un de croissance canadienne dont le dépôt exigible hors police atteint 25 000$, poursuit M. Cloutier.
Trois critères
Mais dans tous les cas, le Groupe Cloutier suggère à ses conseillers de recourir à trois critères dans le choix d’une vie universelle : la solidité financière de l’assureur; le choix disponible des options d’investissement à des frais de gestion avantageux et le coût du taux d’assurance renouvelable annuellement (TRA).