Les ventes d'assurance voyage résistent à la récession grâce à l'enthousiasme des Canadiens pour le tourisme. Ils voyagent moins longtemps et ils vont moins loin. Toutefois, le nombre de voyageurs n'a pas diminué. Un phénomène plus marqué chez les Québécois, épargnés par la débâcle du secteur industriel et poussés hors de la province par un été pluvieux. Ce sont plus de 70 % des Canadiens qui prendront des vacances cet été. La récession les amènera à réduire la distance de leur voyage, alors que 81 % d'entre eux voyageront au Canada pour au moins une partie de leurs vacances. Parmi ce groupe de Canadiens, 45 % entendent même voyager dans leur province ou territoire d'origine.
C'est ce que révèle un sondage Ipsos Descarie réalisé auprès de 1 021 Canadiens pour le compte de Desjardins Sécurité financière (DSF), entre le 17 et le 21 juin 2009.
La clientèle en assurance voyage au Québec est légèrement affectée par la récession, mais pas autant que dans le reste du Canada, observe François Morel, conseiller, mise en marché en assurance directe chez DSF. « Au Québec, les gens ont conservé leur pouvoir d'achat. Les départs ne fléchissent pas, c'est la durée et la destination du voyage qui change », dit-il.
Chez Coordinateurs en assurance voyage TIC (TIC), la croissance s'est poursuivie en assurance voyage tout au long de 2008. « Nous avons connu une plus grande croissance au Québec que dans les autres provinces, affirme pour sa part Joanne Parent, directrice du développement des affaires pour le Québec chez TIC. Les agences de voyages ont beaucoup vendu à cause de l'été médiocre que nous vivons, constate-t-elle. Les ventes d'assurance voyage ont aussi bénéficié de cette tendance ».
Au printemps, David Hartman, président et chef de la direction de TIC, avait pourtant ses inquiétudes. Dans un mémo publié dans le bulletin Au temps TIC, il relevait une chute du nombre de voyage de 10 à 20 % depuis le mois d'avril, selon les secteurs. Il mettait aussi en garde contre les effets de la grippe H1N1.
Mme Parent explique les bons résultats au Québec par le fait que la crise affecte plus l'Ontario et la Colombie-Britannique en raison de la forte concentration de leur économie. La baisse globale observée par TIC a épargné le réseau de courtage au Québec pour le moment.
La récession n'affecte pas les affaires des cabinets de courtage en assurance voyage, bien au contraire, lance Sam Oliel, directeur de l'assurance voyage chez le cabinet spécialisé en assurance de dommages Ogilvy & Ogilvy. « Les gens planifient habituellement leurs voyages un an à l'avance. Même avec la récession, il n'est plus temps de reculer pour eux, surtout avec l'été que nous avons », ajoute-t-il.
Crise? Quelle crise? Pas en assurance voyage, en tout cas, dit Mimi Martin, du cabinet de courtage MRM Risques Spéciaux. Et ce n'est pas seulement en été que la demande est soutenue. « Il y avait plus de 54 000 Québécois à Acapulco l'an passé et il y en a eu autant cet hiver. Les gens ne veulent pas rester au Québec l'hiver. C'est trop dur », mentionne-t-elle.
Cabinet spécialisé en assurance voyage et actif auprès de plusieurs fournisseurs, SecuriGlobe ne ressent pas non plus les effets de la récession. « Ce que nous avons plutôt vu est le retour anticipé des snowbirds, en mars, pour profiter du beau temps que nous avons eu au printemps. Plusieurs le regrettent probablement aujourd'hui», lance le président de SecuriGlobe, Mathieu Laplante.
Les snowbirds
Si l'été se montre clément à l'assurance voyage, c'est l'automne, grosse saison dans cette industrie, qui sera décisif, rappelle pour sa part Joanne Parent, de TIC. « Il faut maintenir le rythme. C'est à la fin de l'année que nous verrons si nous avons bien fait, car le quatrième trimestre est notre plus gros trimestre », dit-elle.
Ce sont les snowbirds qui montreront si l'industrie s'en sort aussi bien qu'elle semble actuellement le faire, renchérit pour sa part Mathieu Laplante. « Nous nous préparons à la saison des lève-tôt : les gens qui retournent en Floride. Cette saison commence le 15 octobre et se prolonge jusqu'au 1er décembre. Dès le début octobre, la période des snowbirds est en effet le temps fort de l'année en assurance voyage ».
Patrick Lavoie, vice-président marketing de SecuriGlobe, est confiant que cette période sera bonne. « Les snowbirds n'arrêtent pas de voyager : ils resteront moins longtemps.
Il coûterait de toute façon plus cher à de nombreux snowbirds de rester ici plutôt que de partir. Surtout pour ceux qui n'ont pas de pneus ni de manteau d'hiver et qui n'ont pas joué de la pelle depuis longtemps », fait-il remarquer.
Joanne Parent renchérit. « Est-ce que le snowbird va changer ses habitudes alors que plusieurs ont déjà vendu leur voiture, leur maison et/ou leur terrain ? L'assurance voyage, ce n'est pas juste du court séjour. Les snowbirds constituent un tout autre marché », dit-elle.
Si les gens à la retraite continuent de voyager quoi qu'il arrive, c'est aussi le cas des immigrants, fait quant à lui observer Sam Oliel, de Ogilvy & Ogilvy. Même s'il s'agit d'un créneau plus modeste que celui des snowbirds, sa croissance ne se dément pas.
« Ce volume d'affaires est en croissance chez nous par rapport à l'an dernier et l'année précédente. Nous voyons le volume de primes augmenter à mesure que le nombre d'arrivants croît », confirme Henri Haesler, adjoint de la directrice du département d'assurance voyage chez Ogilvy. Le cabinet consacre de l'énergie depuis déjà plusieurs années à ce marché qu'il estime mal desservi.
Le cabinet montréalais vise un autre marché non traditionnel : celui des étudiants étrangers, desquels les universités exigent qu'ils soient assurés avant de les admettre. Conscient de la croissance du marché des voyageurs étrangers, TIC a revampé son produit VTC destiné aux visiteurs au Canada pour des séjours de courte à moyenne durée.
« Avec VTC, une personne en séjour au Québec peux se rendre en Ontario ou aux États-Unis et demeurer assurée si elle passe au moins 51% de son temps au Québec. Il n'y a pas de limite d'âge et l'assuré a droit à trois rencontre de suivi après avoir eu recours à un spécialiste pour une urgence. Ce produit est très populaire auprès de nos conseillers asiatiques », explique Joanne Parent.
Couverture
Le produit couvre entre autres les soins médicaux et dentaires (sujets à des limites spécifiques) et l'hospitalisation en cas d'urgence (incluant l'ambulance). La couverture maximum peut atteindre 150 000 $ et le produit donne aussi accès à de l'assurance vie et de l'assurance mutilation par accident.
DSF a aussi saisi l'occasion qu'offre l'immigration en lançant dans le réseau des caisses un produit destiné aux nouveaux arrivants pour leur permettre de se couvrir en attendant d'être admissibles au régime public.
Son produit Assurance soins de santé d'urgence pour les nouveaux arrivants offre une protection en cas d'accident ou de maladie qui couvre les frais engagés au Canada. Le montant maximal d'assurance a été établi à 50 000 $. La police couvre les soins de santé d'urgence, hospitaliers, dentaires, professionnels de la santé, soins et services médicaux ou prescrits par un médecin, ainsi que les frais de transport.
« Nous offrons ce programme à tous les membres des Caisses Desjardins depuis le début de l'année. La demande pour ce produit est venue du réseau des caisses qui expérimente une très forte croissance d'ouvertures de comptes et d'hypothèques de la part des nouveaux arrivants. Ceux-ci sont de plus en plus sensibilisés au fait qu'ils doivent attendre trois mois avant d'être admissibles à l'assurance santé de la Régie de l'assurance maladie du Québec (RAMQ) », explique François Morel, de DSF.
Le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles du Québec s'attend à ce que la province reçoive entre 40 000 et 50 000 nouveaux arrivants en 2009, et 55 000 en 2010 (nombre d'admissions projetées dans son document Planification triennale de l'immigration 2008-2010). En 2008, le Québec a reçu 18,3 % de tous les immigrants canadiens (247 202).
En plus de distribuer un produit maison pour visiteurs, SecuriGlobe distribue également ceux de multiples fournisseurs dans ce créneau, précise M. Lavoie : TIC, Croix-Bleue, Manuvie, ETFS, Travel Underwriter et Reliable Life, entre autres. SecuriGlobe planche aussi sur un nouveau produit pour les visiteurs au Canada, projet qui devraient aboutir d'ici sept mois, précise-t-il.
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Patrick Lavoie, de SecuriGlobe, décrit ces produits comme assez populaire pour maintenir ce créneau en constante croissance depuis des années, autant pour les visiteurs entrants que les Canadiens expatriés. Il ajoute que la plupart des produits sont standards, et ne diffèrent que par quelques caractéristiques bien précises.
« C'est un marché qui a pris son envol avec les courts séjours, par exemple la visite de parents. Maintenant, la tendance se déplace vers les plus grands séjours alors que les gens viennent s'établir au Canada. De leur côté les conseillers de diverses nationalités ont des contacts avec plusieurs communautés, ce qui favorise leurs ventes dans ce créneau », remarque le vice-président marketing.
« Les gens sont de plus en plus conscients des coûts si un problème de santé survient au Québec alors qu'ils ne sont pas admissible à la RAMQ. Sans la RAMQ, une chirurgie cardiaque sera aussi coûteuse ici qu'aux États-Unis », rappelle M. Lavoie.
Par ailleurs, Mathieu Laplante se félicite d'avoir réalisé plusieurs faits d'arme en 2008, dont d'excellentes ventes avec une croissance particulièrement marquée en Ontario. « Nous réalisons presque 30 % de notre chiffre d'affaires hors-Québec », dit le président de SecuriGlobe.
Environ 65% du volume total des primes de SecuriGlobe proviennent du Québec et de l'Ontario, et 35% du reste du Canada, avec prépondérance en Alberta et en Colombie-Britannique, où le cabinet accentue ses efforts.
Contrairement à ce qui se passe en assurance vie pour les joueurs québécois, M. Laplante estime que le marché de l'assurance voyage n'est pas saturé au Québec. « C'est grâce au vieillissement de la population et la vague des retraités qui s'ensuit », précise-t-il.
Le cabinet a aussi décroché un contrat avec Canadian Tire pour ses clients titulaires d'une carte de crédit, soit 4 millions de détenteurs. « Nous sommes responsables du volet assurance voyage pour ces détenteurs et nous pouvons les solliciter à même leur relevé », explique M. Laplante.
SecuriGlobe met du même coup l'accent sur le Web. Nous offrons déjà à nos courtiers un lien internet d'affaire (business to business ou B2B). Dans un mois et demi nous devrions finaliser un système qui permettra de faire des transactions sur notre site, de la proposition jusqu'à la transaction et l'impression de la police chez le client.