Les démêlés de Nicolas Fecteau-Tincau avec l’Autorité des marchés financiers se poursuivent. Après avoir obtenu en août 2021 une décision de la Cour supérieure qui annulait une décision rendue par l’Autorité en octobre 2020, le représentant reçoit un nouveau refus du régulateur concernant le renouvellement de son certificat en assurance de personnes. 

En août 2021, la juge Alicia Soldevila avait conclu que la décision rendue par l’Autorité était « déraisonnable », car elle ne contenait qu’une explication laconique des motifs à l’appui du refus de renouvellement du certificat du demandeur.

Le tribunal rappelait alors qu’une cour de justice disposant d’une preuve sérieuse a jugé qu’il était indiqué d’imposer au demandeur une sentence qui lui permettait de poursuivre ses activités professionnelles. 

L’intimé avait été condamné en octobre 2019 à une peine d’emprisonnement de 90 jours à être purgée de manière discontinue, assortie d’une probation de deux ans. En mars 2020, il a demandé le renouvellement de son certificat pour l’année 2020-2021. Le régulateur a refusé de renouveler le permis le 14 octobre 2020 et dès le 10 novembre 2020, le sursis de l’exécution de la décision est accordé par la Cour supérieure. 

Nouvelle étude 

La Cour supérieure avait renvoyé l’étude du dossier de l’intimé à l’Autorité pour qu’elle statue sur ce renouvellement. Le processus décisionnel a été repris le 22 septembre 2021.

Le 8 février 2022, l’Autorité transmettait à l’intimé un préavis à une décision en vertu de l’article 5 de la Loi sur la justice administrative. Le représentant a transmis ses observations à l’Autorité le 21 mars 2022, par l’entremise de son avocate, Me Nathalie Lavoie

La procureure de M. Fecteau-Tincau fait valoir que la lecture du préavis ne comprend aucun fait nouveau qui serait survenu depuis le refus du régulateur de renouveler le certificat de l’intimé en octobre 2020. 

L’avocate souligne de nombreux éléments pour contester le préavis, en soulignant notamment la parution dans le Journal de Montréal du 10 octobre 2020 d’un article faisant le lien entre l’intimé et François Baillargeon-Bouchard, qui témoignait la veille par le Tribunal administratif des marchés financiers

La procureure ajoute que son client « ne mérite pas d’être privé de gagner sa vie dans le domaine pour lequel il a suivi avec succès sa formation, alors qu’il est talentueux, sans antécédent, apprécié de son employeur et de ses clients, et que les motifs que nous invoquons le sont tardivement en raison du renouvellement de 2019, ce qui tend à laisser croire que l’article mensonger ci-haut cité est le véritable déclencheur ». 

L’intimé a été déclaré coupable de deux infractions, dont une reliée à un bris d’ordonnance. Les infractions n’ont pas été commises dans le cadre du travail de représentant et n’ont aucun lien avec sa profession, insistait le premier procureur qui avait plaidé le dossier en 2020. 

Confusion 

Dans ses commentaires réagissant aux propos de Me Lavoie, l’Autorité souligne que lors du renouvellement du certificat pour la période du 1er mai 2019 au 30 avril 2020, il semblerait y avoir eu confusion lors du traitement de cette demande quant à la date de déclaration de culpabilité du représentant dans le dossier relié au trafic de cannabis. 

Le régulateur explique avoir cru à tort que le représentant n’avait pas encore été déclaré coupable des infractions reprochées, aucune analyse exhaustive des faits et circonstances n’avait été faite au moment de renouveler le certificat en 2019.

Ce n’est qu’un an plus tard que la direction de la certification et de l’inscription a réalisé l’erreur administrative et a procédé à l’analyse requise suivant la déclaration de culpabilité à une infraction criminelle. 

L’article 220 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers indique que le régulateur peut refuser le renouvellement ou assortir le certificat de conditions s’il est d’avis que le demandeur « ne possède pas la probité nécessaire » pour exercer ses activités. 

Cette évaluation de la probité du représentant est un pouvoir accordé à l’Autorité et les tribunaux ont confirmé que ce pouvoir était large et discrétionnaire. L’infraction de trafic pour laquelle l’intimé a été condamné est grave. Malgré son âge à l’époque des faits survenus en 2015, l’Autorité estime que cette justification est insuffisante. 

« S’impliquer dans un système monté et organisé, tel que du trafic de substances, est totalement contraire à cette valeur fondamentale », indique l’Autorité.

L’infraction a été commise avant que l’intimé obtienne son certificat. La condamnation a été prononcée en 2018, postérieurement à l’obtention du certificat. « Or, la probité doit être détenue par un représentant en tout temps, et non seulement au moment de l’obtention de son certificat », ajoute l’Autorité. 

La deuxième infraction concernant le bris d’ordonnance et les circonstances qui l’entourent constituent un élément additionnel démontrant « le manque de sérieux accordé à l’encadrement mis en place pour la protection du public ainsi que l’insouciance du représentant ». 

L’intimé « n’ayant pas la probité requise », le renouvellement de son certificat doit être refusé, conclut le régulateur dans sa décision rendue le 14 octobre 2022, soit deux ans jour pour jour après le premier refus. La décision a été publiée dans le bulletin de l’Autorité le 3 novembre dernier. 

Au moment d’écrire ces lignes, jointe par le Portail de l’assurance, Me Lavoie ne savait pas encore si son client allait contester la décision de l’Autorité.