Les principes concernant la divulgation de la preuve par le syndic sont bien connus. Le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière a dû rappeler que les rapports d’enquête du bureau du syndic sont confidentiels et ne peuvent être transmis aux parties intimées.

Le 4 septembre dernier, les arguments de la syndique adjointe de la Chambre ont été entendus. Le comité de discipline a rejeté la demande faite par les demandeurs, en l’occurrence trois conseillers en sécurité financière du cabinet Pascale Cauchi inc., soit Katie Krem, Pascale Cauchi et Laurent Cauchi.

La division administrative et d’appel de la Cour du Québec a déjà été interpellée par les procureurs des parties intimées qui demandent la permission d’en appeler de la décision rendue par le comité de discipline.

La plainte déposée par la syndique adjointe contre Pascale Cauchi comporte 17 chefs. Six chefs d’accusation sont reprochés à Katie Krem, tandis que la plainte contre Laurent Cauchi compte cinq chefs. Les trois plaintes ont été réunies par le comité de discipline.

M. Cauchi était absent et non représenté lors de l’audience tenue le 12 avril 2024. Selon le registre des inscrits de l’Autorité des marchés financiers, son certificat n’est plus valide. Il n’y a pas d’avocat inscrit à son dossier de plainte.

Contre-interrogatoire

Pendant le contre-interrogatoire de l’enquêtrice de la Chambre, celle-ci a fait référence à l’existence de rapports produits par une autre collègue, en l’occurrence celle qui a mené l’enquête dans les trois dossiers. Cette enquêtrice qui était responsable du dossier ne travaille plus au bureau du syndic depuis l’automne 2023.

Les parties intimées ont demandé que les rapports d’enquête soient produits et remis aux trois personnes visées par les plaintes. Ces rapports n’ont pas été transmis aux intimés lors de la communication de la preuve par la syndique adjointe.

Dans une déclaration assermentée, la syndique adjointe affirme que ces rapports contiennent une chronologie et un résumé des faits, identifiés à partir de la preuve colligée lors de l’enquête. Ces documents sont rédigés avec une attente de confidentialité, ajoute la syndique adjointe. Ce document de travail est transmis au procureur du syndic dans le but de recevoir ses conseils juridiques et préparer le litige disciplinaire à venir, le cas échéant.

Analyse

La divulgation de la preuve par le syndic vise à assurer au professionnel visé par une plainte la possibilité d’exercer son droit à une défense pleine et entière, rappelle le comité. Toute la preuve pertinente doit être soumise, qu’elle soit inculpatoire ou disculpatoire.

Le syndic a un pouvoir discrétionnaire de refuser de produire un document pour des motifs de pertinence et s’il considère que ce document est protégé par un privilège. La confidentialité de la relation entre l’avocat et son client et celui du privilège relatif au litige sont des principes bien connus, indique le comité de discipline.

Dans le présent dossier, les rapports de l’enquêtrice ont été rédigés en vue de l’instruction disciplinaire qui est une instance contradictoire. Ces documents sont donc visés par le privilège relatif au litige et la plaignante n’a pas à les transmettre aux intimés.

Le comité ajoute que ces rapports sont confidentiels et qu’ils sont clairement protégés par le secret professionnel de l’avocat. « Enfin, le comité note la jurisprudence constante à l’effet que de tels rapports ne sont pas pertinents et n’ont pas à être divulgués », conclut le comité.

La suite

Le Portail de l’assurance a demandé au procureur de Pascale Cauchi, Me Pascal A. Pelletier, s’il est déjà arrivé antérieurement que le rapport d’un enquêteur lui ait été remis par la plaignante pour l’aider à préparer la défense de son client.

Par courriel, Me Pelletier refuse de commenter la décision du comité de discipline, car les procureurs des parties intimées ont demandé la permission d’en appeler de ce jugement auprès de la Cour du Québec.

Le Portail de l’assurance a consulté le rôle d’audience du comité de discipline de la Chambre. On constate que plusieurs journées d’audience prévues à la fin de septembre et en octobre pour la reprise de l’instance ont été annulées. Ces journées sont désormais accompagnées de la mention « reportée ».

Nous avons demandé à la Chambre si le rapport d’un enquêteur remis au syndic avait déjà été transmis par la plaignante au procureur de la partie intimée. En raison de l’appel fait auprès du tribunal, l’organisme préfère ne pas commenter le dossier.

Pascale Cauchi n’en est pas à ses premières démêlées avec le bureau du syndic de la Chambre. En juillet 2023, elle a été condamnée à une peine d’un mois de radiation temporaire. Elle avait été déclarée coupable de trois des six chefs de la plainte en février 2023.

Lors d’une plainte antérieure, après avoir contesté en appel devant la Cour du Québec la déclaration de culpabilité d’octobre 2019, la peine de cinq années de radiation imposée par le comité de discipline en juin 2020 et la demande en arrêt des procédures, Mme Cauchi a été condamnée à une amende de 30 000 $ en 2021.