George J. Pollack, associé établi à Montréal du cabinet d’avocats DAVIES, dit prévoir que de nombreuses réclamations dʼassurance seront soumises pour les pertes dʼexploitation liées à la COVID-19.

Ces réclamations seront-elles recevables ? Dans un avis que le cabinet a partagé au Portail de l’assurance, Me Pollack rappelle que lʼassurance pour les pertes dʼexploitation a pour but de protéger les entreprises contre les pertes de produits dʼexploitation et les dépenses causées par une perturbation des activités due à une catastrophe.

Il souligne également que la protection peut aussi être disponible lorsque les activités de fournisseurs ou de clients essentiels sont touchées et entrainent, par exemple, des pertes pour lʼentreprise en raison de lʼinterruption de la chaine dʼapprovisionnement.

« Lʼassurance pertes dʼexploitation comporte un certain nombre de restrictions importantes et, comme dʼautres types dʼassurance dʼentreprises, les conditions particulières de la police sont déterminantes, écrit-il. Il importe de savoir avant tout que la plupart des polices dʼassurance pertes dʼexploitation ne sʼappliquent que lorsque les pertes ou les dommages matériels touchent les locaux ou les biens de lʼassuré utilisés pour lʼexploitation de son entreprise. »

Le recours aux avenants

Dans la plupart des cas, toutefois, lʼapplication de la protection ne dépendra pas du fait que lʼassuré possède ou loue les biens visés par sa réclamation dʼassurance, indique Me Pollack. « Il convient toutefois de noter que les polices dʼassurance pertes dʼexploitation peuvent contenir des avenants qui étendent lʼassurance aux pertes liées aux maladies infectieuses et aux mesures imposées par les autorités compétentes pour en endiguer la propagation. »

Alors, comment déterminer le tout ? « Cʼest le libellé de la police qui déterminera dans chaque cas si la garantie sʼapplique lorsquʼil nʼy a pas de perte ou de dommage matériel, mais que lʼaccès à des locaux assurés est soit totalement interdit, soit restreint en raison de mesures de confinement liées à une pandémie », écrit l’associé de DAVIES.

Pour appuyer son propos, Me Pollack ajoute que la justification dʼune réclamation dʼassurance pour perte dʼexploitation peut être difficile même lorsque la garantie dʼassurance est claire, étant donné lʼincertitude liée à lʼévaluation des pertes futures. « Lʼassuré doit être prêt à justifier la perte subie en se fondant sur les rendements passés de son entreprise, les tendances et les références dans son secteur dʼactivité, ses budgets et ses prévisions », conseille-t-il.

Autres protections

Selon Me Pollack, il n’y a pas que pour la protection pour les pertes d’exploitation que le libellé dʼune police déterminera la réponse à une réclamation dʼassurance liée à la COVID-19. « Les polices dʼassurance couvrent les cas fortuits, cʼest-à-dire les risques inconnus ou imprévus. Il est probable que les tribunaux reconnaissent lʼéclosion de la COVID-19 comme un cas fortuit. Toutefois, une telle reconnaissance ne garantirait pas à elle seule la possibilité de recouvrer les pertes financières causées par le virus », précise-t-il.

Me Pollack donne l’exemple de la protection prévue par une police dʼassurance des biens. Celle-ci sera activée par lʼendommagement des biens assurés causé par un risque assuré, rappelle-t-il.

« Même sʼil est probable quʼune maladie infectieuse - à moins quʼelle ne soit exclue - soit considérée comme un cas fortuit, lʼon peut sʼattendre à ce que les assureurs estiment que les pandémies et les mesures visant à les endiguer ne sont pas des risques assurés. Et même si elles lʼétaient, les assureurs considéreraient elles nʼentrainent pas de perte ou dʼendommagement matériel des biens assurés du type nécessaire pour activer la protection prévue par une police dʼassurance des biens », estime l’associé de DAVIES.

Pour cette raison, il dit croire que les réclamations dʼassurance pour dommages matériels réels causés par la COVID-19 ne seront pas nombreuses ou importantes. Me Pollack juge toutefois possible que des entreprises doivent engager des frais pour nettoyer et désinfecter les biens afin de les rendre sûrs pour lʼoccupation et lʼutilisation humaines.

« Les assurés estimeront peut-être que ces frais devraient être couverts, ainsi que les pertes résultant dʼun refus dʼaccès à des locaux ou de la perte dʼattractivité résultant de mesures de confinement imposées par les autorités. Lʼacceptation ou le refus de ces réclamations dʼassurance dépendra dans chaque cas du libellé de la police et de la manière dont les assureurs et les tribunaux lʼinterprèteront. »

L’assurance responsabilité civile générale dʼentreprise

Me Pollack recommande aussi de porter une attention particulière aux polices dʼassurance responsabilité civile générale dʼentreprise. Il fait remarquer que ces polices stipulent que les assureurs doivent payer les sommes quʼun assuré est tenu par la loi de verser à titre de dommages-intérêts en raison de dommages corporels et matériels causés à des tiers auxquels lʼassurance sʼapplique.

« Ces polices devraient, en règle générale, couvrir les pandémies dans les cas où des réclamations sont présentées aux assurés pour non-protection de tiers quʼils avaient lʼobligation de protéger. Dans certains cas, toutefois, les polices contiendront des exclusions pour les réclamations causées par lʼexposition à une maladie infectieuse. Il sʼagira dans ces cas de voir, en fonction du libellé de la police, dans quelle mesure la garantie dʼassurance sʼapplique », écrit l’associé de DAVIES.

Lʼidée de réclamations alléguant le manquement à une obligation de protection des tiers nʼest pas invraisemblable, ajoute Me Pollack. Il souligne que de nombreux passagers qui ont eu la malchance dʼêtre à bord du navire Grand Princess ont déjà intenté des actions contre Princess Cruise Lines pour réclamer des millions de dollars en dommages-intérêts en alléguant précisément un tel manquement.

« Des réclamations fondées sur un manquement semblable pourraient être présentées dans un grand nombre dʼautres secteurs dʼactivité, allant de lʼhôtellerie et de la restauration à la vente au détail. Il sʼagira aussi dans ces cas de voir, en fonction du libellé de la police, si la garantie dʼassurance sʼapplique. »

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