Le 18 mars dernier, après avoir reconnu sa culpabilité aux deux chefs de la plainte, le courtier Alexandre Gaspo (certificat no 161 618) a été condamné à six mois de radiation temporaire par le comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages

Fait exceptionnel, la syndique adjointe de la Chambre, Me Catherine Bazinet, a elle-même présenté la plainte au comité de discipline lors de l’audience tenue le 20 février dernier. De son côté, l’intimé était représenté par Me Sonia Paradis

Les gestes à l’origine de la plainte ont eu lieu à Montréal en mars et avril 2022. Comme le plaidoyer de culpabilité a été enregistré dès le début de l’audience, les parties ont remis un exposé conjoint des faits pour aider le comité dans la détermination de la sanction. 

La société cliente de l’intimé est une entreprise de construction. Elle a demandé au courtier d’obtenir du cautionnement de soumission auprès d’un assureur afin de participer à des appels d’offres publics pour des travaux à faire pour le compte de la Ville de Montréal. 

L’intimé admet qu’il n’a jamais exécuté ce genre de mandat, n’a pas les connaissances ni les moyens pour exercer ce mandat. Malgré cela, dès le 10 mars 2022, il contacte l’assureur afin d’obtenir les cautionnements de soumission.

Pour ce geste, qui contrevient à l’article 17 du Code de déontologie des représentants en assurance de dommages, ce premier chef est puni par une peine de 30 jours de radiation temporaire.

Geste aggravé  

L’analyste du département de cautionnement de l’assureur écrit au courtier pour obtenir les renseignements et documents requis sur l’entrepreneur. Dans le mois qui suit, l’échange de documents se tient entre le courtier, sa cliente et l’assureur.

Afin d’aider l’entrepreneur général à obtenir des contrats de construction de travaux publics, l’intimé a permis que soient produits auprès de la municipalité plusieurs faux documents laissant croire que la cliente avait obtenu des cautionnements de soumission auprès de l’assureur, à l’insu des parties concernées. 

Pour ce deuxième chef, qui contrevient à l’article 37 (9) du Code de déontologie, l’intimé est puni par une peine de six mois de radiation temporaire.

Les documents produits ont permis à l’entrepreneur de remporter les appels d’offres pour cinq projets. « C’est dans ce contexte et après avoir participé à une réunion avec l’assureur que l’intimé a réalisé que la procédure de cautionnement était complexe et ne constituait pas une simple formalité », indiquent les parties au point 14 de l’exposé conjoint des faits. 

Le 25 avril 2022, l’intimé a appelé l’assureur pour les informer qu’il avait produit sans leur autorisation les formulaires de cautionnement pour les cinq projets. Durant l’enquête qui a suivi, l’assureur a découvert cinq autres formulaires.

La compagnie d’assurance a envoyé une mise en demeure à l’intimé où on lui demande de cesser de produire des documents au nom de l’assureur sans avoir son autorisation. Une demande d’enquête a ensuite été formulée auprès de l’Autorité des marchés financiers

Dès juillet 2023, lors d’une rencontre avec le bureau du syndic, l’intimé a reconnu les manquements, la gravité de ses gestes et a fait preuve d’un sérieux repentir. 

La sanction 

L’intimé a témoigné pour sa défense. Il exerce dans le domaine de l’assurance depuis 30 ans, dont 20 ans comme courtier.

Il dit regretter amèrement les faits et gestes qu’il a posés et surtout les inconvénients qu’il a pu causer aux parties. Il a modifié ses pratiques et ne pratique plus dans les domaines pour lesquels il n’a pas les compétences. 

Le comité n’a eu aucune hésitation à retenir la sanction proposée par les parties. Le comité estime que la peine proposée répond aux quatre critères établis par la Cour d’appel en 2003 dans l’affaire Pigeon c. Daigneault, en l’occurrence : 1) la protection du public, 2) la dissuasion du professionnel de récidiver, 3) l’exemplarité à l’égard des autres membres de la profession qui pourraient être tentés de poser des gestes semblables, et 4) le droit pour le professionnel visé d’exercer sa profession. 

L’intimé a subi plusieurs conséquences en raison des gestes qu’il a commis, notamment la perte de sa relation d’affaires avec l’assureur, en plus d’avoir transféré les dossiers chez un nouveau partenaire. Une enquête de l’inspecteur montréalais a été faite à son bureau. 

L’intimé est condamné au paiement des déboursés et des frais de publication de l’avis disciplinaire. La publication aura lieu dans un quotidien montréalais. 

Le comité prononce l’arrêt conditionnel des procédures pour les autres dispositions mentionnées au soutien du chef 2 de la plainte. Les peines de radiation seront purgées de façon concurrente.