Le 22 décembre dernier, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière a déclaré Natalie Missakian (certificat no 142395, BDNI no 1730021) coupable des trois chefs de la plainte disciplinaire. La sanction sera déterminée à la suite d’une prochaine audience.

Les gestes qu’on reproche à l’intimée ont eu lieu à Montréal entre avril et novembre 2016. L’intimée a divulgué sans autorisation des renseignements confidentiels sur les comptes et avoirs de sa cliente, ce qui contrevient à l’article 8 du Règlement sur la déontologie dans les disciplines de valeurs mobilières (chef no 1).

Par la suite, l’intimée s’est placée en situation de conflit d’intérêts en agissant à titre de mandataire de cette même cliente, notamment en signant le formulaire de « Modification non financière », tout en étant sa représentante. Cet acte déroge à l’article 18 du Code de déontologie de la Chambre (chef no 2).

Enfin, l’intimée a nui au travail du syndic, notamment en ne lui remettant pas le formulaire mentionné au chef no 2, ce qui contrevient à l’article 342 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers. Le comité prononce l’arrêt conditionnel des procédures à l’égard des autres dispositions alléguées au soutien des chefs.

L’instruction de la plainte a requis six jours d’audience entre décembre 2017 et octobre 2018. Le comité souligne que l’animosité qui régnait entre les procureures l’a obligé à intervenir pour restreindre leurs ardeurs.

L’intimée détient un certificat dans les disciplines de courtage en épargne collective depuis 2000, et en assurance de personnes depuis 2006. Elle a œuvré au sein de plusieurs cabinets au fil des ans. Depuis janvier 2015, elle exerce pour le compte du cabinet TWMG, dont elle est propriétaire.

L’intimée a rencontré la cliente, qui allait avoir 79 ans deux mois plus tard, en juillet 2013. D’autres rencontres ont eu par la suite pour gérer les actifs de la cliente, qui s’élevaient à environ 1 million de dollars (M$). La cliente n’avait pas d’enfants et vivait seule à Montréal. La représentante a incité la cliente à se préoccuper de sa succession dès le mois de mai 2015.

La santé de la consommatrice a commencé à décliner quelques mois plus tard. Ce n’est qu’en avril 2016 qu’elle a accepté de préparer un testament en présence d’une notaire, de même qu’une procuration générale qui incluait un mandat d’inaptitude. L’intimée a été désignée procureure et mandataire et une rémunération était prévue au cas où la cliente soit déclarée inapte. Cette dernière est décédée en janvier 2017.

L’intimée a renoncé à sa nomination comme mandataire le 29 aout 2016, trois semaines après signé le document mentionné au chef no 2. Le formulaire visait à changer l’adresse de sa cliente pour celle du cabinet de l’intimée, et celle-ci a également signé le document en tant que représentante de la consommatrice.

Les renseignements confidentiels ont été divulgués à la notaire que l’intimée a présentée à la cliente et qui a préparé la procuration générale. Ils concernaient la valeur des actifs détenus par la cliente. L’intimée contestait avoir divulgué ces renseignements sans l’autorisation de la cliente. Elle avait insisté pour ne pas être présente lors de la rencontre entre la consommatrice et le notaire.

Une partie des avoirs de la cliente était détenue à la Banque Royale du Canada (RBC) et l’intimée a pris des initiatives auprès de l’institution financière visant à protéger la cliente, mais sans son autorisation. Il n’a pas non plus été prouvé que la cliente avait renoncé à son droit touchant la confidentialité de ses renseignements personnels.

L’intimée affirme qu’elle voulait s’assurer que le courrier de la cliente ne tomberait pas dans de mauvaises mains durant son absence pour les vacances. La consommatrice était suivie par le CLSC et ses capacités cognitives déclinaient, affirme l’intimée. Aucune note au dossier ne permettait de le conclure. Ce n’est qu’à son retour de vacances qu’elle a transféré la gestion des actifs à sa collègue directrice de la conformité du cabinet. Le comité souligne l’absence de preuve appuyant les craintes et appréhensions de l’intimée à l’égard des voisins de la cliente.

Concernant l’entrave au travail d’enquête du syndic, le comité rappelle que la plaignante n’a connu l’existence du formulaire litigieux que par l’entremise d’une compagnie de fonds à la fin octobre 2016. Or, l’intimée a indiqué à plusieurs reprises que le dossier transmis à l’enquêteuse était complet. « Son silence à propos de ce document induisait l’enquêteuse en erreur », écrit le comité. L’intimée a plaidé que le formulaire était en possession du chef de la conformité de son cabinet.

Le comité rappelle que le fardeau de preuve en droit disciplinaire est basé sur la prépondérance des probabilités. La procureure de la plaignante rappelle que « les infractions reprochées sont de responsabilité stricte et n’exigent pas la mens rea », souligne le comité. En conséquence, la défense de diligence raisonnable ou erreur de fait ne s’offrait pas à l’intimée, précise le comité.