Au cours d’une entrevue avec le Portail de l’assurance, Jean-François Chalifoux, président et chef de la direction de La Capitale / SSQ Assurance, a beaucoup insisté sur l’importance de se donner une masse critique qui permet d’investir massivement dans la technologie et le virage numérique. C’est ce que veulent les membres, a-t-il dit.

Cette masse critique, La Capitale et SSQ Assurance estiment se l’être attribué en devenant officiellement une seule entité, dont le nom sera connu à l’automne. Comptant plus de 4 700 employés à Québec, Montréal et Toronto, la nouvelle entreprise annonce qu’elle devient « la plus grande mutuelle d’assurance au Canada, avec plus de 3,5 millions de membres et clients ».

M. Chalifoux a aussi mentionné son empreinte hors Québec. Les activités de SSQ Assurance regroupait à ce jour 125 employés dans la région de Toronto, et celles de La Capitale 400. Ils se partagent entre autres parmi les anciens de York & Fire en assurance de dommages, et Penncorp principalement en assurance de personnes. La Capitale a acquis ces deux compagnies au fil des ans pour accentuer sa présence en Ontario.

5,5 G$ de primes d’assurance

La nouvelle entreprise prend une place prépondérante dans le marché de l’assurance collective aux entreprises : elle devient le premier assureur au Québec et le quatrième au Canada dans ce secteur, avec près de 3 milliards de primes (G$).

En assurance de dommages, elle occupe la troisième position au Québec et la 13e position au Canada, avec des primes de 1,5 G$.

En assurance vie individuelle, elle devient le quatrième assureur au Québec et le sixième au Canada, avec des primes de 1,1 G$, incluant les rentes individuelles. « À cela s’ajoute une position enviable en épargne avec une 7e position au Canada en fonds distincts », ajoute La Capitale / SSQ Assurance, qui compte un actif sous gestion en fonds distincts de 5,2 G$. Dans ce secteur, l’entreprise misera sur la proximité avec le réseau de distribution.

« Nous demeurerons très près des agents généraux. Plus nous avancerons dans le temps, plus nous regrouperons nos forces de vente et nos produits pour offrir une gamme complète », explique M. Chalifoux. Dans l’intégration des deux assureurs, le PDG signale que les produits de l’un viendront compléter ceux de l’autre de façon graduelle.

Tous secteurs d’affaires confondus, la nouvelle entité compte près de 5,5 G$ de primes, dont 4,2 G$ au Québec, a indiqué Jean-François Chalifoux.

« Le regroupement est un grand pas franchi, un moment historique dans l’histoire des deux organisations. Nous unissons nos forces et continuons d’honorer tous nos contrats et nos ententes », lance Jean-François Chalifoux. Il ajoute aussi conserver les modèles d’affaires des deux assureurs. Par exemple, la nouvelle entreprise continuera d’exploiter les deux réseaux distincts qui caractérisaient la distribution en assurance de personnes à La Capitale : le réseau des institutions publiques et celui des agents généraux.

SSQ n’avait pas cette distinction dans ses réseaux de distribution d’assurance vie individuelle. « Nous avions des agents affiliés, mais cette force de vente demeurait plus marginal que celle de La Capitale. Nous n’avions pas d’équipe de développement d’affaires dans les établissements publics », dit M. Chalifoux. Il estime que SSQ gagne ainsi une nouveau modèle d’affaires bien maitrisé par La Capitale.

Investir massivement dans les systèmes

À l’annonce du regroupement en janvier 2020, les PDG respectifs de La Capitale et de SSQ, Jean St-Gelais (maintenant président du conseil de la nouvelle organisation) et Jean-François Chalifoux, avaient déjà annoncé leur intention de devenir la plus grande mutuelle au pays. Les dirigeants disaient aussi vouloir faciliter le virage numérique des deux assureurs. Dans la stratégie qu’il a partagé lors de l’entrevue accordé au Portail de l’assurance, le président et chef de la direction de La Capitale / SSQ Assurance a résolument mis l’accent sur le volet technologique.

M. Chalifoux insiste sur l’importance d’unir ses forces. « Nous allons chercher une taille et des économies d’échelle, mais aussi les moyens d’investir de manière optimale en technologie et dans le virage numérique. Nous voulons investir de façon massive dans nos systèmes d’assurance de dommages et de personnes, et mieux servir les attentes grandissantes des membres », dit le PDG de la nouvelle entreprise.

Intégrer les écosystèmes technologiques

Comme chez les concurrents, le poids des systèmes technologiques archaïques (patrimoniaux) pèsent aussi sur l’assureur regroupé. Il entreprend le vaste chantier de les harmoniser. « Sur un horizon de trois ans, nous visons à intégrer nos écosystèmes technologiques, en assurance de dommages, en assurance collective, en assurance vie individuelle et en services financiers, aussi bien que ceux des fonctions corporatives et de soutien d’affaires. Jusqu’à maintenant, nous étions des concurrents. On devient un, et l’intégration doit se faire par étapes pour réaliser une transition des plus harmonieuses et réussie pour l’ensemble des parties prenantes », explique M. Chalifoux.

Le dirigeant ajoute que les investissements prévus de chaque côté avant la fusion seront mis de l’avant. La Capitale devait investir dans son système d’assurance de dommages dans les prochaines années, dit-il, alors que SSQ Assurance prévoyait investir de façon massive dans ses systèmes d’assurance collective, et dans un environnement plus performant et plus moderne en assurance de dommages.

« Nous dessinons la carte de nos systèmes technologiques pour déterminer quelles plateformes serviront le mieux l’entreprise que nous mettons sur pied aujourd’hui. » Quel fournisseur sera retenu ? « Nous sommes en train de faire nos choix au moment même où nous nous parlons », a répondu Jean-François Chalifoux. Il a ajouté que la décision finale sera connue dans les prochains mois.

COVID-19 et virage numérique

M. Chalifoux exprime la fierté de son entreprise d’avoir concrétisé ce regroupement, annoncé bien avant que la pandémie ne prenne pied au Canada. « Nous disons aussi merci au ministère des Finances de l’avoir approuvé dans les délais souhaités. Malgré le contexte de travail à distance, le projet a avancé rondement. Nous avons une grande adhésion parmi nos employés. »

Des tendances lourdes ont amené ce regroupement, souligne M. Chalifoux. Il pointe surtout vers les exigences des consommateurs de 2020, et l’évolution technologique qui créent des attentes face aux processus de numérisation de l’assureur. La COVID-19 a accentué ces tendances, dit-il. Depuis son apparition, la numérisation des processus de son entreprise s’accélère. La taille devient selon lui encore plus importante pour gérer cette accélération.

La numérisation à vitesse grand V est là pour rester, croit Jean-François Chalifoux. « Les gens souhaiteront éviter de toucher du papier et avoir des conversations à distance. » De même, des clients voudront transiger à distance et M. Chalifoux considère son récent lancement de produits d’assurance vie individuelle à émission simplifiée en phase avec cette tendance lourde.

« Le besoin de transiger à distance et de façon numérique était là bien avant la pandémie, mais elle l’accélère », renchérit-t-il. Le début du télétravail dans les deux organisations le 27 mars a achevé de convaincre l’organisation que le moment était idéal pour lancer des produits qui matérialisent davantage ce virage.

Pas de retour en arrière

Jean-François Chalifoux doute que tout redevienne comme avant, au retour des employés dans les édifices de l’entreprise, qui se fera graduellement à compter du début de septembre. « Je n’anticipe pas un retour massif au travail des 4 700 employés », ajoute M. Chalifoux.

« Il y aura beaucoup plus de flexibilité et de mobilité pour les travailleurs, qui pourront davantage choisir l’endroit et la façon d’exercer leur travail. Il y aura davantage de télétravail occasionnel. La COVID-19 laissera des traces. Les pratiques de gestion vont évoluer et il y aura des ajustements et des aménagements du milieu de travail. Nous en sommes à préparer les espaces pour les rendre plus conviviaux et adaptés à leurs besoins. Notre nouvel environnement de travail le permet. » Depuis la fin du mois de mars, près de 98 % des employés des deux assureurs regroupés sont en télétravail.

Une union, différentes facettes