Dans le but de réduire la charge administrative des médecins, le gouvernement du Québec va interdire aux assureurs ou administrateurs de régimes d’exiger un billet médical pour obtenir le versement de certaines prestations ou des congés de courte durée. Le nouvel organisme Santé Québec aura le mandat de surveiller l’application de ces nouvelles règles et de lourdes amendes guettent les compagnies d’assurance qui ne les respecteront pas.

Le projet de loi 68 déposé le 31 mai par le ministre du Travail, Jean Boulet, modifie également la Loi sur les normes du travail afin d’interdire à l’employeur d’exiger un document attestant des motifs d’une absence, notamment en raison de maladie, pour les trois premières absences d’une période de trois journées consécutives ou moins prises annuellement. 

Le projet de loi prévoit aussi que l’employeur ne pourra exiger un certificat médical en cas d’absence pour prendre soin d’un enfant ou d’un parent pour lequel la personne agit à titre de proche aidant. 

Les médecins disent consacrer 10 heures par semaine à des tâches administratives, comme remplir des formulaires exigés par les assureurs. Le gouvernement du Québec croit que les mesures contenues dans le projet de loi 68 leur permettront pour l’ensemble de la province de libérer des dizaines de milliers de plages dans leurs horaires, du temps qu’ils pourront utiliser pour donner des soins cliniques à la population.

Élimination des recours médicaux 

En vertu de l’article 29.1, un assureur ou un administrateur de régime d’avantages sociaux ne pourra plus, même indirectement, exiger d’un assuré, d’un adhérent ou d’un bénéficiaire un service ou billet médical pour les situations suivantes :

  • Pour obtenir le remboursement ou le paiement du coût des services d’un intervenant du domaine de la santé ou des services sociaux. Par exemple, des traitements de physiothérapie ou de psychothérapie. 
  • Pour obtenir un remboursement ou le paiement d’une aide technique, telle qu’une canne ou des orthèses.
  • Pour obtenir un certificat médical lors d’une absence de courte durée de trois journées consécutives ou moins.
  • Pour maintenir le versement de prestations d’invalidité. Un diagnostic d’un médecin sera d’abord nécessaire pour recevoir ces prestations, mais la fréquence du suivi médical pour leur maintien ne sera plus déterminée par l’employeur ou l’assureur, mais par un médecin selon son jugement clinique. 
De gros pouvoirs aux inspecteurs et enquêteurs 

Le gouvernement du Québec entend exercer un contrôle sévère afin de s’assurer que ces règles soient respectées. Cette mission sera confiée à Santé Québec, l’organisme en voie de création qui sera dirigée par Geneviève Biron.  

Santé Québec pourra exiger d’un assureur ou d’un administrateur de régime d’avantages sociaux qu’il lui fournisse un rapport préparé par un auditeur portant sur la conformité de ses pratiques. L’organisme va déterminer, par règlement, les critères de sélection et les modalités de nomination de cet auditeur ainsi que la teneur de leurs rapports. 

Santé Québec pourra procéder à des vérifications sur la tenue des nouvelles règles par les assureurs et désignera un inspecteur ou un enquêteur pour s’assurer de leur application. Ce dernier disposera des pouvoirs et de l’immunité des commissaires nommés en vertu de la Loi sur les commissions d’enquête, sauf celui d’ordonner l’emprisonnement. 

Le projet de loi prévoit que cet inspecteur pourra se rendre, à toute heure raisonnable, dans tout lieu où un assureur ou un administrateur de régime d’avantages sociaux exerce ses activités et exiger le rapport que les compagnies d’assurance et administrateurs de régimes devront tenir. 

Sanctions financières, administratives et pénales 

Diverses sanctions financières administratives et pénales sont prévues dans le projet de loi. 

Quiconque entravera ou tentera d’entraver l’inspecteur ou l’enquêteur dans ses tâches, notamment en le trompant par réticence ou par fausse déclaration, sera passible d’une amende de 5 000 $ à 50 000 $ dans le cas d’une personne physique ou de 15 000 $ à 150 000 $ dans les autres cas. 

En cas de non-respect de la Loi, l’assureur ou l’administrateur de régime d’avantages sociaux sera tenu de payer à Santé Québec le coût assumé pour les services médicaux qu’il a exigés. S’ils s’élèvent à 100 000 $, par exemple, l’assureur pourrait être tenu de rembourser ce montant à Santé Québec. En plus du recouvrement de la somme, ce manquement pourrait donner lieu à l’imposition d’une sanction administrative pécuniaire ou au cumul des deux.

Cette sanction administrative de 5 000 $ pourra être imposée par Santé Québec à l’assureur ou à l’administrateur de régime d’avantages sociaux qui exigera un service médical à l’encontre de l’article 29.1. 

Des dispositions de nature pénale sont aussi prévues dans le projet de loi. L’assureur ou l’administrateur de régime d’avantages sociaux qui exige un service médical en contravention au même article 29.1 sera passible d’une amende de 10 000 $ à 1 000 000 $. 

Des éclaircissements à propos de certaines dispositions du projet de loi 68 seront apportés en commission parlementaire dans quelques semaines.