S’il n’en tient qu’à son nouveau PDG, April Canada deviendra un modèle de service pour le courtage en assurance de dommages. En entrevue au Journal de l’assurance, Nick Kidd a confié vouloir mettre fin au « trou noir » dans lequel les courtiers soumettent leurs affaires à l’assureur. M. Kidd souhaite ainsi qu’April Canada devienne une option viable pour le courtage alors que les solutions disparaissent.Nick Kidd œuvre dans l’industrie de l’assurance depuis près de 20 ans. Il a grandi à Montréal et en Ontario, avant que ses parents déménagent au Royaume-Uni alors qu’il avait 16 ans. Il a débuté sa carrière en assurance chez Guardian, acheté par la suite par AXA. Au sein de ces deux entreprises, il a assumé une multitude de rôles de gestion, notamment en réclamation, en stratégie, en souscription et en tarification.

L’an dernier, sa famille et lui ont voulu gouter à une nouvelle culture et voir de nouveaux horizons hors du Royaume-Uni. L’occasion rêvée s’est présentée au Canada, quand AON lui a demandé de diriger son portefeuille en assurance des particuliers. Puis, au début de 2014, il a reçu un appel de France, des hauts dirigeants d’April. Ils lui offraient de diriger les activités canadiennes du grossiste.

« Ce n’était pas sur mon radar, et je n’avais jamais travaillé avec eux auparavant. J’étais donc très surpris d’avoir cet appel. Dès le départ, j’ai été impressionné par leur vision et leur image de marque rafraichissante, qui parle de changement, d’agilité, mais aussi de simplicité pour le consommateur. J’aime cette approche qui veut trouver des besoins non desservis ainsi que des solutions pour les résoudre », dit celui qui a commencé avec April, au printemps, ce qui l’amène à utiliser ce jeu de mots : « I was led to start with April in April. »

Agile et flexible, mais avec un service à améliorer


M. Kidd dit grandement apprécier l’agilité et la flexibilité qu’offre April Canada, qu’il compare aux géants chez qui il a travaillé auparavant. « April est très différent à cause de sa taille. On y met plus d’attention sur le consommateur. On peut aussi y résoudre les problèmes plus rapidement. Il n’est pas nécessaire de tenir des comités ou de s’en tenir au reporting. Si c’est la chose à faire et que c’est logique, on peut le faire », dit-il.

Il a toutefois identifié quelques faiblesses au sein du grossiste, mais préfère les voir comme des opportunités. Le premier point touche l’efficacité technologique de l’entreprise.

« À cause de la complexité des risques que nous souscrivons, une grande partie de nos opérations se font encore sur papier et manuellement. Les courtiers demandent un niveau différent de service. Ils veulent un service en ligne et facile à utiliser. On a beaucoup de travail à faire sur ce point », dit-il.

April Canada est actif dans quatre segments d’affaires : l’assurance aux entreprises, l’assurance habitation non standard, le camionnage et l’assurance maritime, dont une bonne partie provient de son acquisition d’Elco. M. Kidd dit qu’il y a des améliorations à apporter dans chacun de ces secteurs.

« On n’a qu’à prendre le processus de soumissions pour les courtiers. C’est un élément qu’il faut grandement améliorer, tant au Québec qu’au Canada. Les courtiers qui traitent avec nous peuvent tomber dans un trou noir. Ils remplissent la soumission et attendent. Ils ne savent pas quand, ni si, ils auront une réponse. Notre processus est probablement trop compliqué. Il y a trop de questions auxquelles répondre », relate-t-il.

Le nouveau PDG d’April Canada veut grandement simplifier les choses et compte s’inspirer d’autres industries pour ce faire. « On peut maintenant commander et payer une pizza en ligne chez Domino’s. On peut ensuite voir qui la prépare et à quelle heure. On suit très clairement le processus. Fondamentalement, les attentes de nos clients sont identiques. Pourquoi ne pouvons-nous pas offrir le même niveau de service? C’est un grand défi », dit-il.

Ne plus être un dernier recours

M. Kidd souhaite aussi que les courtiers ne voient plus uniquement sa compagnie comme un dernier recours pour placer un risque. « Les courtiers cognent à notre porte quand tous les assureurs réguliers refusent leur risque. Il faut s’interroger. Pourquoi certains de nos produits ne sont-ils pas offerts à une plus grande échelle? Il nous faut concevoir de meilleurs produits », dit-il.

Il se questionne d’ailleurs sur la façon dont April Canada peut s’engager davantage avec les courtiers. « Il faut reconnaitre que chaque courtier est différent. Pourquoi ne pouvons-nous pas reconnaitre cela dans notre entreprise, surtout pour ceux avec qui nous sommes les plus proches? », dit-il.

Rendre les courtiers plus efficaces

Le slogan d’April est bien connu : Changer la face de l’assurance. « Il nous faut refléter cela, mais nous ne pourrons le faire sans investir en technologie. Dans chaque industrie, en ce moment, on le voit. La technologie influence la réaction du consommateur. Si on ne peut refléter cela, honte à nous. Toutefois, il ne faut pas développer des outils technologiques juste pour le plaisir de le faire. Ils doivent avoir une raison d’être. Il faut voir comment nous pouvons rendre les courtiers plus efficaces, et nous attarder à la manière dont ils veulent interagir avec nous », dit M. Kidd.

Autre aspect à améliorer : le positionnement d’April, ainsi que son markéting. « Comment peut-on aider le courtier à avoir une vision stratégique? Il faut avoir une compréhension de la manière dont on peut aider le courtier dans ce qu’il fait. Il faut lui trouver une solution, peu importe ce qu’il nous présente, d’une façon qui se colle à son modèle d’affaires. Nous devons prendre ce recul avant d’aller de l’avant avec de nouveaux moyens », dit-il.

April Canada traite présentement avec 1 500 courtiers au pays, dont la majorité au Québec. L’entreprise a 47 000 clients, pour un volume de primes avoisinant les 100 millions de dollars (M$), dont 70 % au Québec. « Nous sommes encore une jeune entreprise dans le reste du Canada », affirme M. Kidd.

Objectif croissance

Il dit clairement vouloir la faire croitre :« Nous voulons livrer la préférence d’un point de vue de courtier. Il nous faut développer cette présence. Ce sera ma mission pour les deux prochaines années. Nous avons une bonne base à partir de laquelle travailler, notamment avec notre forte présence au Québec. »

Il ne cache pas que ce ne sont pas tous les courtiers qui tirent pleinement profit des services d’April Canada. « Nous avons un très bon partenariat avec les grands courtiers, surtout ceux avec qui nous traitons depuis de nombreuses années. Ils comprennent très clairement ce que nous faisons. Effectuons-nous suffisamment de markéting? Probablement pas », admet-il.

Rentabilité variable d’un secteur à l’autre

M. Kidd souligne que la rentabilité d’April Canada varie selon ses segments d’affaires. Aucun n’est déficitaire, mais il n’y en a pas un qui atteint la rentabilité souhaitée par M. Kidd.

« En camionnage, nous sommes très rentables grâce aux primes élevées. C’est tout le contraire en habitation sous-standard à cause des basses primes. Pour ce segment précis, nous sommes souvent dans un cycle de quatre ans avec le consommateur. La première année, nous perdons de l’argent avec lui. La deuxième, on rentabilise le tout, et on fait de l’argent dans la troisième. Il nous quitte généralement lors de la quatrième puisqu’il a amélioré son profil de risque », dit M. Kidd.

April Canada travaille avec un fournisseur de données pour identifier les segments où le grossiste pourrait faire une différence. « Il faut voir comment identifier les segments d’affaires où les courtiers pourraient être plus forts. On ne veut pas agir uniquement comme grossiste pour le courtier, mais aussi comme consultant pour les aider dans le marché. Il nous faudra une bonne année avant d’en arriver à ce point », dit-il.