La durée des prestations du régime d’assurance emploi en cas de blessure ou de maladie d’Emploi et Développement social Canada passera de 15 à 26 semaines. Ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et de l’Inclusion des personnes en situation de handicap, Carla Qualtrough, a annoncé la prolongation qui entrera en vigueur le 18 décembre 2022.
Selon la ministre Qualtrough, les personnes admissibles qui présentent une nouvelle demande à compter du 18 décembre 2022 pourront recevoir des prestations jusqu’à 26 semaines, si elles sont malades et ont besoin de ce temps pour se rétablir.
« En faisant passer de 15 à 26 semaines la durée des prestations de maladie de l’assurance-emploi, nous donnons aux travailleurs canadiens le temps et la flexibilité dont ils ont besoin pour se rétablir et retourner au travail », a déclaré la ministre.
Emploi et Développement social Canada précise que ce changement à l’assurance emploi octroie une aide financière aux Canadiens confrontés à une maladie, à une blessure ou à une mise en quarantaine. Les prestations du régime d’assurance emploi correspondent à 55 % du salaire hebdomadaire moyen du demandeur. Le gouvernement a fixé la prestation maximale à 638 $ pour 2022. Emploi et Développement social Canada estime que l’allongement de la durée des prestations donnera plus de temps pour se remettre à environ 169 000 Canadiens chaque année.
Répit pour maladies graves
La ministre Qualtrough a annoncé le changement à l’assurance emploi au centre régional de soins de la Société canadienne du cancer à Vancouver, le 25 novembre 2022, en compagnie de la directrice générale de la Société, Andrea Seale. « Lorsqu’une personne est confrontée au cancer, son combat n’est pas seulement médical, mais aussi financier. La prolongation des prestations de maladie de l’assurance-emploi à 26 semaines donne aux Canadiens atteints d’une maladie comme le cancer plus de temps pour se concentrer sur leurs traitements et leur rétablissement », a affirmé Mme Seale.
La Société canadienne de la sclérose en plaques (SP) a aussi réagi à l’annonce de la ministre. Il s’agit selon elle d’un changement crucial pour les Canadiens ayant des incapacités épisodiques, dont la sclérose en plaques. Présidente et chef de la direction de la Société canadienne de la SP, Pamela Valentine a révélé que 60 % des personnes atteintes de SP finissent par se retrouver au chômage. « Cette mesure donnera aux gens la flexibilité nécessaire pour rester en contact avec leur lieu de travail, tout en gérant l’imprévisibilité de la SP », a ajouté Mme Valentine.
Emploi et Développement social Canada a rappelé que les prestations de maladie de l’assurance emploi complémentent celles d’invalidité versée par le Régime de pensions du Canada ou par les régimes provinciaux et territoriaux. La Régie des rentes du Québec (RRQ) offre aux travailleurs une rente dont les prestations débutent après 4 mois d’invalidité. En 2022, le montant de base pour tous de la rente d’invalidité de la RRQ a été établi à 524,61 $. Elle peut atteindre jusqu’à 1463,83 $, en fonction des revenus de travail déclarés par le bénéficiaire.
Effet sur l’assurance collective ?
Emploi et Développement social Canada précise que ses prestations complètent aussi celles versées par les régimes d’assurance privés financés par les employeurs. Parmi ces régimes privés, les employeurs qui possèdent un régime d’assurance collective peuvent offrir à leurs employés une garantie d’invalidité de longue durée, qui prendra le relais à la fin des prestations d’assurance emploi.
À la suite du prolongement du régime public, les employeurs allongeront-ils le délai d’attente avant que l’employé soit admissible aux prestations de leur régime collectif privé ? Le choix de l’entreprise aura un effet sur les coûts du régime privé, dont les prestations sont habituellement plus généreuses que celles du régime public.
Directeur, développement des affaires d’AGA Assurances collectives, Alexandre Timothy a dit au Portail de l’assurance qu’il est encore tôt pour se prononcer. « Étant donné que l’annonce est très récente, nous ne connaissons pas encore tous les tenants et aboutissants, mais je crois que ce sera variable. Certaines entreprises prolongeront le délai d’attente, alors que d’autres le maintiendront » prévoit M. Timothy.
« Certaines entreprises rechercheront des économies de coûts en prolongeant le délai d’attente de la rente d’invalidité d’assurance collective », croit-il. Parmi les autres entreprises qui pourraient considérer allonger la période d’attente avant de toucher les prestations du régime privé, Alexandre Timothy mentionne les entreprises dont les travailleurs font partie de catégories d’emploi moins bien rémunéré. « L’assurance emploi les protège relativement bien », explique-t-il. Selon lui, les entreprises qui n’offrent pas d’assurance invalidité de courte durée dans leur régime seront aussi susceptibles de rallonger la période d’attente avant de recevoir des prestations du régime privé.
« Celles dont le régime privé offre une assurance salaire de courte durée en prestations supplémentaires chômage pourraient aussi prolonger le délai d’attente. Mais pour ce point, il faut valider comment les assureurs ajusteront leurs taux et comment il faudra réenregistrer le régime auprès de l’assurance emploi (du régime fédéral) », signale M. Timothy.
Au sujet des entreprises qui pourraient maintenir le délai de 4 mois, le directeur développement des affaires d’AGA pense que cela pourrait être le cas entre autres des entreprises dont les employés gagnent de gros salaires et celles dont les employés sont assurés à 100 % en cas d’invalidité de courte durée.
Assurance individuelle en renfort
Vice-présidente, prestations du vivant de Groupe Cloutier, Claudine Cloutier a accueilli la bonification de l’assurance emploi avec enthousiasme. « Je suis très contente de constater que ce projet de loi se concrétisera. Cela fait longtemps que c’est discuté. Je crois que tous les acteurs de l’industrie salueront cette initiative », a-t-elle dit au Portail de l’assurance.
Sur le plan individuel, l’industrie de l’assurance de personnes offre des produits qui peuvent complémenter tant l’assurance emploi que les régimes collectifs privés. Il s’agit de l’assurance invalidité et de l’assurance maladies graves. Claudine Cloutier se spécialise dans ces deux créneaux et soutient les conseillers dans le développement de leurs affaires. Elle estime que trop de gens malades subissent de lourdes conséquences financières parce qu’ils ne sont pas couverts adéquatement en assurance invalidité ou maladies graves. « Il y a un besoin criant de ce côté », renchérit Mme Cloutier.
Occasion de parler aux clients
« Cette prolongation ne change en rien ma façon de présenter le produit d’assurance maladies graves. Au contraire, elle donnera un regain puisque c’est une excellente occasion pour les conseillers de discuter de plan financier en cas de maladie avec leurs clients », croit Claudine Cloutier.
Les conseillers peuvent revoir l’assurance invalidité des clients, « puisque c’est la base des besoins », selon Mme Cloutier. La conversation peut être moins évidente en assurance maladies graves, selon les propos de Claudine Cloutier. « Souvent, les conseillers ne savent pas comment aborder leurs clients en assurance maladies graves. Cette nouvelle peut donc être un bon début de discussion », dit la vice-présidente, prestations du vivant de Groupe Cloutier. Le conseiller a ainsi l’occasion de poser des questions au client sur sa situation personnelle, et de connaître l’impact qu’aurait sur lui ou sa conjointe un diagnostic de cancer, par exemple.
« Le contrecoup financier d’un diagnostic de maladie grave est énorme, les dépenses liées à la maladie pouvant rapidement devenir exorbitantes », rappelle Claudine Cloutier. « L’assurance maladies graves a plus que jamais son utilité, il faut donc continuer à en parler encore et toujours. Il existe tellement de solutions différentes, pour tous les budgets », ajoute Mme Cloutier.
Plus de 400 000 prestataires
Emploi et Développement social Canada a révélé qu’en 2019-2020, l’assurance-emploi a versé 1,9 milliard de dollars (G$) à près de 421 140 prestataires, sous forme de prestations de maladie. Au cours de la même année, 34 % des bénéficiaires ont utilisé les 15 semaines complètes de prestations auxquelles ils avaient droit. En 2020-2021, c’est près de 2 G$ qui ont été versés cette fois à plus de 450 000 prestataires. Cela en dépit du fait que les gens ont seulement recommencé à présenter de nouvelles demandes dans la deuxième moitié de l’année suivant la fin de la Prestation canadienne d’urgence, souligne Emploi et Développement social Canada.
Son rapport d’évaluation sur les prestations de maladie révèle que 87 % des prestataires ont déclaré être retournés au travail dans la première année suivant une maladie, une blessure ou une mise en quarantaine. La majorité des prestataires qui retournent au travail après avoir utilisé la totalité des 15 semaines de prestations de maladie de l’assurance-emploi le font dans les 10 semaines suivant la fin de leur période de prestations.