La Cour d’appel du Québec donne raison à Intact Compagnie d’assurance et infirme le jugement de première instance qui l’obligeait à assurer la défense de la société Hydromec.
En effet, en février 2025, la Cour d’appel accepte d’entendre la requête d’Intact et suspend les procédures dans le litige opposant Hydromec à AIG Compagnie d’assurance du Canada. Cette dernière cherche à se faire rembourser l’indemnité versée à la société 9351-9817 Québec inc., une entreprise d’exploitation forestière établie au Saguenay–Lac-Saint-Jean.
L'appel est entendu le 20 juin dernier et le jugement de la Cour supérieure de décembre 2024 est infirmé.
Les origines
Le contexte remonte à décembre 2021, lorsque l'entreprise d’exploitation forestière achète un équipement de transport de bois vendu par Hydromec, fabriqué par la compagnie Ponsse. Or, l’engin est incendié alors qu’il est en activité en forêt le 13 mars 2023 au nord de Girardville, dans la municipalité régionale de comté (MRC) de Maria-Chapdelaine.
Le 19 février 2024, Intact refuse la réclamation, jugeant qu’elle n’est pas recevable en vertu des allégations et des pièces.
Plusieurs mois plus tard, en décembre 2024, la juge Sandra Bouchard, du district de Roberval de la Cour supérieure du Québec, accorde la requête de type Wellington demandée par Hydromec, forçant ainsi Intact à la défendre à ses frais dans le recours intenté par AIG, qui lui réclame une somme de 744 538,66 $.
L’ordonnance condamne aussi Intact à rembourser à Hydromec tous les frais et honoraires juridiques qu’elle a engagés dans le cadre de la poursuite d’AIG.
La requête Wellington est liée à l’obligation de défendre imposée à l’assureur, laquelle est prescrite par l’article 2503 du Code civil du Québec. Pour déclencher l’obligation de défendre, cette disposition prévoit qu’il ne faut qu’une simple possibilité que les allégations contenues aux procédures intentées contre l’assuré mènent à une réclamation couverte par la police.
Les arguments
Devant la Cour d’appel, le 20 juin dernier, les parties conviennent que la juge Bouchard a appliqué le bon cadre d’analyse pour déterminer le bien-fondé de la demande Wellington lors de son jugement.
Cependant, Intact soutient que le tribunal a appliqué cette analyse de manière erronée, puisqu’une clause de la police de l’assurée excluait ce type de risque de la couverture.
De son côté, Hydromec affirme que la vente d’équipements forestiers est sa principale activité. À ce titre, la société estime qu’elle est en droit de s’attendre à ce que sa police d’assurance responsabilité civile couvre ses activités principales.
La Cour d’appel souligne que, même si la juge ne pouvait déterminer la cause possible du sinistre à ce stade des procédures, elle aurait dû se prononcer « sur la question déterminante de savoir si une indemnité pouvait être payable en vertu de la police, considérant la nature de la demande ».
En tenant pour avérées les allégations de la demande introductive d’instance soumise par AIG contre Hydromec, ainsi que les pièces déposées à ce stade des procédures, la Cour d’appel estime que « même en leur donnant la portée la plus large possible », elle ne peut conclure que la couverture d’assurance s’applique pour la réclamation en cause.
Le refus de couverture
Dans sa poursuite, AIG allègue que l’équipement de transport acheté a cessé de fonctionner prématurément. Les dommages se résument à la perte totale du transporteur et à la location d’un équipement de remplacement temporaire. Comme vendeur professionnel, Hydromec a l’obligation de vendre un produit exempt de défectuosité, ce qui est prévu dans la garantie de qualité imposée par la loi, ajoute AIG dans sa demande.
Afin de soutenir son refus de défendre et d’indemniser Hydromec pour les dommages liés à sa responsabilité civile, Intact invoque l’exclusion prévue à la clause 2.9 du contrat, concernant le dommage matériel au produit occasionné par une défectuosité connue au moment de la vente.
La Cour d’appel souligne que, dans sa demande pour une ordonnance de type Wellington, Hydromec reconnaît que sa responsabilité est recherchée comme vendeur professionnel, en vertu de son obligation de vendre un produit exempt de tout défaut, dans le respect des dispositions du Code civil.
Hydromec n’allègue aucune autre cause potentielle permettant de retenir sa responsabilité, ce qui lui permettrait de bénéficier de la couverture d’assurance, lit-on au paragraphe 17 du récent jugement.
Les trois juges de la Cour d’appel estiment qu’Intact a raison de soutenir que la nature véritable de la réclamation relève de la garantie légale de qualité du vendeur et qu’il s’agit de l’unique fondement du recours.
Le choix de ce régime de responsabilité implique « que la seule possibilité qu’Hydromec soit trouvée responsable et condamnée au paiement des dommages repose sur la démonstration de l’existence d’une défectuosité affectant le transporteur au moment de la vente ». Or, cette situation est expressément exclue par la clause 2.9 de la police d’assurance.
En conséquence, la Cour d’appel infirme le jugement de première instance et rejette la demande d’Hydromec pour une ordonnance de type Wellington.