Les municipalités et les provinces seront davantage encouragées à investir dans les mesures d’atténuation stratégique des catastrophes. Le gouvernement fédéral en a fait l’annonce en fournissant de nouveaux détails sur la modernisation des Accords d’aide financière en cas de catastrophe (AAFCC)

Le ministre de la Protection civile du Canada, Harjit R. Sajjan, a profité d’une conférence organisée par la Croix-Rouge canadienne, le 29 janvier dernier, pour préciser les changements aux AAFCC qui entreront en vigueur le 1er avril 2025. Le gouvernement fédéral concrétise ainsi l’un des engagements pris dans la Stratégie nationale d’adaptation du Canada

La réduction des risques par des investissements avant la catastrophe sera encouragée par une mesure incitative. Le programme modernisé permettra de rembourser les provinces et les territoires pour les activités qui contribuent à mitiger les risques de catastrophe.

Des exemples 

Les activités dans ce volet numéro 5, dédié à l’atténuation des catastrophes, peuvent inclure une vaste gamme de projets liés aux infrastructures structurelles ou naturelles. Pour que le projet soit admissible, il devra offrir des avantages en matière de réduction des risques qui sont supérieurs aux infrastructures classiques.

« Les exemples peuvent comprendre, sans toutefois s’y limiter, l’infrastructure de stabilisation des rives ou des berges ou le blindage ; les canaux de transport, les ponceaux, les bassins de drainage biologique ou les bassins de rétention des eaux pluviales ; les brise-lames, les revêtements, les épis, les seuils ou les ouvrages de formation fluviale ; les coupe-feux permanents ; les débris d’ingénierie permanents et les structures de contrôle des glissements de terrain, etc. », explique-t-on sur le site de Sécurité publique Canada où sont publiées les nouvelles lignes directrices. 

Les AAFCC peuvent aussi financer des programmes communautaires qui visent le même objectif de mitigation des risques. À l’échelle de la communauté ou de la propriété, la distribution de pompes de puisard est l’une des activités admissibles.

« Les activités peuvent être menées en amont ou dans une autre zone géographique où il peut être démontré qu’elles réduisent efficacement les risques dans la zone touchée par la catastrophe », ajoute-t-on.

L’atténuation des catastrophes non structurelles est incluse dans les activités financées, par exemple, les rachats et la relocalisation, incluant l’achat du terrain et l’expropriation, l’achat de la propriété, la démolition ou la désaffectation du site.

D’autres exemples cités sont la cartographie des aléas naturels, l’éducation du public et la divulgation des risques, la mise à jour des règlements municipaux et des règlements sur l’utilisation des terres.

Stratégie nationale 

La Stratégie nationale d’adaptation fournit un cadre général « qui vise à réduire le risque de catastrophe climatique, à améliorer les résultats en matière de santé, à protéger la nature et la biodiversité, à bâtir et à entretenir des infrastructures résilientes et à favoriser la vigueur de l’économie et des travailleurs », indique le gouvernement canadien. 

Le programme modernisé devrait assurer la fourniture rapide et efficace de l’aide financière aux provinces et aux territoires à la suite d’une catastrophe. Les changements annoncés viseront à accroître le soutien offert aux personnes les plus touchées par les impacts des catastrophes majeures. 

Les nouvelles règles permettront surtout d’augmenter les investissements pour atténuer les effets de ces événements extrêmes « et de mieux bâtir pour réduire au minimum les répercussions des catastrophes sur les communautés et le risque que des catastrophes se reproduisent », indique le gouvernement fédéral.

Les nouveaux AAFCC permettront « d’encourager la réduction des risques, la planification préalable aux catastrophes et la connaissance accrue des dangers en vue de diminuer les risques et les répercussions des catastrophes ». 

Les lignes directrices du programme modernisé sont publiées, tout comme celles qui concernent les catastrophes admissibles survenues avant le 1er avril 2025. Comme le traitement des paiements finaux peut avoir lieu des années après le sinistre, les anciennes lignes directrices demeureront en vigueur jusqu’au moment où les anciens dossiers seront réglés et clos. 

Valeur financière des milieux naturels 

Par ailleurs, les milieux naturels ont une valeur financière et les organisations publiques et privées ont désormais un outil pour en déterminer l’impact des services écosystémiques qu’ils apportent aux communautés, notamment en matière de mitigation

Le même jour où le gouvernement fédéral annonçait le financement des efforts de mitigation des risques de catastrophe, les chercheurs du Centre Intact sur l’adaptation au climat (CIAC) de l’Université de Waterloo publiaient le guide Inscrire la nature dans les rapports financiers : divulgation des actifs naturels par les gouvernements locaux

Sous la direction de Joanna Eyquem, le guide a recueilli la contribution de plus de 120 experts à travers le pays. Il a été préparé pour le Conseil canadien des normes grâce au partenariat de l’Initiative des actifs naturels et de KPMG

Le CIAC rappelle que les actifs naturels comme les zones humides, les rivières, les forêts et les dunes côtières sont reconnus comme des infrastructures qui fournissent des services d’une valeur considérable, car ils absorbent et en emmagasinent l’eau pour entraver les inondations, ils réduisent la température des milieux urbanisés lors d’une canicule et ils stockent le carbone. 

« Les rapports sur les actifs naturels sont essentiels pour reconnaître notre dépendance à l’égard des services que la nature nous offre et pour gérer efficacement leur valeur financière. Les comptables ont un rôle clé à jouer, et nous sommes ravis que d’avoir pu compter sur les contributions d’une multitude de gens du métier pour ce nouveau guide », précise Joanna Eyquem. 

Des municipalités comme Toronto et Montréal ajoutent désormais des renseignements sur les actifs naturels dans leurs rapports financiers. L’absence de normes canadiennes fait cependant en sorte que la qualité des déclarations est assez variable, une lacune que le guide vise à régler. 

Le guide répertorie près de 160 gouvernements locaux, soit des municipalités ou des instances régionales, qui ont défini leurs actifs naturels et en évaluent la qualité dans leurs états financiers. On trouve 60 exemples en Ontario, 51 en Colombie-Britannique, mais seulement 13 au Québec. 

Parmi les déclarations à faire qui sont recommandées par les experts, on suggère : 

  • Les types et catégories d’actifs naturels, comprenant un inventaire des écosystèmes qui fournissent des services essentiels à la communauté  ;
  • L’étendue des actifs naturels, incluant des données sur leur emplacement, leur superficie et les distinctions entre actifs publics et privés  ;
  • L’état des actifs naturels, en évaluant la composition, la structure et le fonctionnement de l’écosystème  ;
  • Les services économiques par des indicateurs, par exemple le stockage d’eau, les avantages pour la communauté et les dépendances qui en découlent  ;
  • L’évaluation financière par l’attribution d’une valeur comptable aux services fournis ainsi que les coûts de remplacement. 

Les divulgations sur les actifs naturels explorées dans le guide « sont volontaires, non auditées et fondées sur les lignes directrices existantes ». L’objectif est d’encourager les gouvernements locaux à déclarer ce qu’ils peuvent et à étoffer leurs divulgations au fil des ans. 

« Chaque communauté peut y trouver un point de départ », indique Bailey Church, collaborateur du rapport et responsable des conseils en comptabilité du secteur public chez KPMG.

« Nous attendons avec intérêt les réactions des communautés au guide pour faire ressortir les domaines où nous pourrions offrir un soutien supplémentaire pour normaliser la gestion des actifs naturels », ajoute Chantal Guay, directrice générale du Conseil canadien des normes.