L’Association des experts en sinistre indépendants du Québec (AESIQ) est en train de revoir sa mission, sa vision et ses valeurs pour devenir la principale porte-parole de l’ensemble de la profession, incluant les professionnels certifiés à l’emploi des assureurs.

Quelque part en 2026, l’AESIQ devrait ainsi changer de nom pour devenir le Regroupement des experts en sinistre du Québec (RESQ). Le Portail de l’assurance avait eu vent de rumeurs à cet effet sans que personne ne confirme l’information. Nommé tout récemment comme président du conseil d’administration de l’AESIQ, Jonathan Fradet a accepté de dévoiler la démarche du futur regroupement avec le Portail de l’assurance.
M. Fradet, président-directeur général du cabinet Authentik, remplace ainsi Jean Lalumière, du cabinet Indemnipro, qui était président de l’Association depuis 2020. Avant l’entrevue, il a partagé une présentation de ce que pourrait devenir le RESQ, « qui est né de la volonté de rassembler, défendre et valoriser la profession, tout en soutenant le développement de ses membres ».
« Les experts en sinistre occupent un rôle essentiel au cœur de l’écosystème de l’assurance de dommages au Québec. Par leur savoir-faire, leur jugement et leur impartialité, ils accompagnent les citoyens et les entreprises dans des moments de vulnérabilité, veillant à ce que les droits et obligations de chacun soient respectés », indique-t-on dans le préambule du document.
Un exposé sommaire de la mission, de la vision et des valeurs qui guideront les membres sont proposés dans le document. Selon M. Fradet, le Regroupement pourrait être lancé de manière officielle à une activité de formation continue qui aurait lieu en 2026 sous l’égide de l’Institut d’assurance du Québec (IADQ).
Le nom du Regroupement a été ajouté au dossier de l’AESIQ déposé au Registraire des entreprises du Québec en juillet 2025. Les membres du conseil se réunissent une fois par mois et discutent de l’avenir de l’Association. « L’AESIQ existe depuis longtemps, mais elle n’avait pas nécessairement évolué avec le reste de l’industrie », explique M. Fradet.
La profession a besoin d’être valorisée, car la relève se fait rare, insiste-t-il. « On a besoin de tout le monde dans l’industrie pour faire la promotion de cette profession, qui demeure assez méconnue. » L’idée de créer un regroupement est issue de ce constat du manque de main-d’œuvre, devenu évident à la suite des catastrophes naturelles de l’été 2024.
« Si l’on veut intéresser la nouvelle génération à cette profession, il faut promouvoir notre rôle, nos bonnes pratiques et être la voix des experts en sinistre », poursuit M. Fradet.
Changements législatifs
Au printemps 2024, le ministre des Finances Éric Girard a fait adopter le projet de loi 30, lequel incluait plusieurs changements concernant l’utilisation des surnuméraires par les cabinets d’expertise en règlement de sinistre. Les changements proposés ne faisaient pas l’unanimité.
Peu importe qu’il exécute son mandat pour un cabinet indépendant, pour un assureur ou à la demande de l’assuré comme expert public, le professionnel de la réclamation a le même code de déontologie et la protection du public est au cœur de ses préoccupations, selon M. Fradet.
En octobre dernier, le cabinet Authentik annonçait qu’il se joignait à une grande firme américaine spécialisée dans le règlement des réclamations et qui désirait accentuer sa présence au Canada. À cette occasion, M. Fradet avait souligné que le principal défi de l’industrie de l’expertise en règlement de sinistre est le recrutement et la formation du personnel.
Lors du plus récent entretien avec le Portail de l’assurance, Jonathan Fradet a répété la même observation. « Quand j’ai commencé dans l’industrie, on se formait comme ajusteur chez un assureur, avant de démarrer son cabinet indépendant. Ce n’est plus comme ça aujourd’hui », dit-il.
Au fil des mois, l’Association tentera de trouver des ambassadeurs au sein des assureurs pour faire la promotion du Regroupement dans leurs rangs et favoriser l’émergence d’une voix unique dont profitera l’ensemble de l’industrie, poursuit M. Fradet. Les activités de formation continue seront selon lui un moyen de réseautage qui aidera à créer de la cohésion entre les membres du Regroupement.
Il songe ainsi à la création de capsules d’information à être diffusées sur les réseaux sociaux, en axant leur contenu sur les bonnes pratiques et le caractère névralgique du travail de gestion des réclamations dans le milieu de l’assurance. « Ça fait 25 ans que je suis dans l’industrie, et même dans mon entourage, les gens pensent que je fais de la restauration après sinistre. Notre profession est méconnue des gens qui n’ont jamais subi de sinistre », estime Jonathan Fradet.
La création du Regroupement est encore au stade embryonnaire et il y a encore bien des éléments à mettre en place, précise-t-il. Les administrateurs du RESQ sont tous bénévoles et les projets avancent grâce au temps que chacun d’eux peut y consacrer. La transaction impliquant son cabinet a d’ailleurs retardé ses propres efforts en la matière.
« Je suis passionné par ce métier. On porte le titre d’expert, mais dans les faits, on doit être bon dans tout, car nous touchons à tellement de domaines. La gestion d’un dossier de réclamation, c’est vraiment passionnant. C’est ça qu’il faut faire comprendre si l’on veut avoir une relève », dit-il.
Groupe d’intervention
Le 8 décembre dernier, l’Autorité des marchés financiers (AMF) a annoncé la création d’un groupe d’intervention sur l’expertise en règlement de sinistres au Québec.
Le mandat du groupe d’intervention qui sera coordonné par l’Autorité est de conseiller rapidement et efficacement le régulateur lorsqu’il lui faut déterminer si les circonstances justifient de déclencher une permission, par exemple, lors d’une catastrophe naturelle ou d’un événement météorologique extrême.
L’Autorité fait un appel de candidatures pour trouver 13 personnes pour former le groupe d’intervention, qui comprendra deux représentants de groupes dédiés à la défense et à la promotion des droits des consommateurs. Les personnes qui désirent soumettre leur candidature ont jusqu’au 20 janvier 2026 pour soumettre leur nom.
Jonathan Fradet insiste d’ailleurs sur la nécessité pour le RESQ d’être représenté au sein des comités consultatifs mis sur pied par l’Autorité, pour faire valoir le point de vue des professionnels de la réclamation après sinistre. « Dans les consultations, on n’était presque jamais là. Pourtant, on est ceux qui donnent le service sur le terrain. On est en première ligne. On est les gens qui peuvent aider à faire avancer les choses », dit-il.
Grâce à un RESQ comptant sur l’adhésion de toute l’industrie, il sera possible de créer des alliances et des partenariats qui aideront à trouver des solutions lorsque les circonstances l’exigent, comme c’est le cas à la suite d’une catastrophe majeure provoquant de nombreuses réclamations. « Avant de penser à utiliser des surnuméraires, on doit faire en sorte de faire appel à tous les professionnels certifiés, tout ça avec la protection du public en tête », explique M. Fradet.
(Avec la collaboration de Serge Therrien)