Le 8 novembre dernier, le comité de discipline de la Chambre de l’assurance de dommages a déclaré Véronique Desbiens (certificat no 178 493) coupable des 12 chefs de la plainte amendée.
La sanction sera déterminée à la suite d’une prochaine audience, laquelle est prévue le 28 novembre prochain.
L’intimée agissait comme experte en sinistre dans la région de Saint-Hyacinthe. Elle est présentement inactive et sans mode d’exercice. Elle a été congédiée le 15 mars 2021 et son permis a ainsi été suspendu par l’Autorité des marchés financiers.
La plainte initiale comptait 15 chefs, mais le syndic a retiré les chefs 3, 5 et 7. Les gestes à l’origine de la plainte ont eu lieu d’août 2019 à février 2020.
L’intimée a procédé au paiement de sommes dont la totalité ou une partie importante fut payée sans justification (chefs 1, 2, 4 et 6), exerçant ainsi ses activités de façon malhonnête ou négligente. Ces gestes contreviennent au premier paragraphe de l’article 58 du Code de déontologie des experts en sinistre.
L’intimée a aussi contrevenu à huit reprises à l’article 48 du même Code. Elle a induit en erreur ou abusé de la bonne foi de l’assureur en détournant des sommes de dossiers de réclamation au bénéfice d’un tiers (chefs 8 à 15).
Pas de procureur
L’intimée se représentait sans l’aide d’un procureur et le comité de discipline consacre les premiers paragraphes de sa décision pour rappeler le devoir de conseil qui lui incombe lorsque le justiciable n’est pas appuyé par un avocat.
L’avocat Daniel Fabien, vice-président du comité de discipline et président de cette formation qui a entendu l’affaire, a dû intervenir auprès de l’intimée principalement au motif que celle-ci avait essentiellement reconnu sa culpabilité au cours de deux conversations téléphoniques enregistrées lors d’un interrogatoire tenu par un enquêteur de la Chambre.
De plus, l’intimée donnait son accord à un exposé des faits tout aussi incriminant, mais refusait de plaider coupable. Me Fabien a informé l’intimée qu’il serait préférable qu’elle reconnaisse sa culpabilité par l’enregistrement d’un aveu de culpabilité, ce qui serait un facteur atténuant lors de la détermination de la sanction.
À la suite de cette intervention et l’ensemble des explications du vice-président, l’intimée a compris le processus, saisi l’enjeu de la plainte ainsi que ses déclarations incriminantes, et enfin, enregistré en toute connaissance de cause une reconnaissance de culpabilité sur chacun des chefs.
Le contexte
Au moment des faits, l’intimée était titulaire d’un certificat d’expert en sinistre et était rattachée à une compagnie détenant deux assureurs de dommages. Elle effectuait le traitement de réclamations relatives à des contrats souscrits auprès de ceux-ci.
L’intimée travaillait à partir de sa résidence et sur la route. Elle détenait une autorité de paiement jusqu’à concurrence de 15 000 $.
Les assurés reliés aux chefs 1, 2, 4 et 6 détenaient un contrat d’assurance habitation. Le 17 avril 2019, un dossier de réclamation est ouvert pour des dommages causés à leur propriété à la suite d’une infiltration d’eau de source inconnue.
La garantie « eau du sol, égouts, débordement de cours d’eau » est limitée à 30 000 $ et la franchise est de 1 000 $. La garantie au titre des « dommages d’eau, eau au-dessus du sol » ne comporte pas de limite et est sujette à la garantie de 538 000 $ pour l’habitation, et la franchise est de 1 000 $.
Des experts ont été mandatés et des tests effectués pour tenter d’identifier la source de l’infiltration. Une nouvelle infiltration a lieu le 10 mai 2019. Une troisième infiltration est notée au dossier le 24 octobre 2019.
Le 29 août 2019, l’intimée a versé une somme à l’un des assurés pour payer le montant prévu par un fournisseur en maçonnerie. L’intimée a soustrait le montant de la franchise. Or, la soumission visait des travaux non encore exécutés ni facturés (chef 1).
L’intimée répète ce geste auprès d’autres fournisseurs pour des travaux divers (chefs 2, 4 et 6).
Les détournements
Les huit autres chefs sont reliés à quatre dossiers distincts où l’intimée a détourné une somme au bénéfice d’un client en utilisant un tiers qui n’a aucun lien avec l’assuré ni avec la réclamation (chefs 8, 10, 12 et 14). Le même tiers a été utilisé dans les quatre dossiers.
À chaque occasion, l’intimée a modifié les renseignements apparaissant au dossier de réclamation en y remplaçant le nom de l’assuré par un autre, le temps de procéder au virement (chefs 9, 11, 13 et 15).
Dans le cas de l’assuré concerné par les chefs 10 et 11, le dossier a même été fermé sans qu’aucune indemnité ne soit payée, car l’intimée n’a jamais réussi à entrer en contact avec l’assuré.