Afin d’atteindre l’objectif d’améliorer les transactions entre les automobilistes et les assureurs, l’Autorité des marchés financiers a modifié et actualisé plusieurs formulaires d’assurance automobile.
De plus, conjointement avec le Groupement des assureurs automobiles du Québec (GAA), l’organisme de réglementation a également déployé la base de données InfoNIV. La participation des assureurs à cette base de données est facultative jusqu’au 1er janvier 2025, date à laquelle elle deviendra obligatoire.
Sous la responsabilité du GAA, InfoNIV permettra d’optimiser les communications entre les corps policiers qui retrouvent un véhicule volé et l’assureur qui est en devenu propriétaire à la suite du règlement du sinistre. Dans certains cas, cela accélérera la remise du véhicule volé à son propriétaire.
Le formulaire des propriétaires
Concernant le formulaire F.P.Q. no 1, ou « formulaire des propriétaires », l’Autorité ajuste le montant offert aux automobilistes pour louer un véhicule en cas de vol complet de leur véhicule à un maximum de 3 000 $ par sinistre et par véhicule assuré. Cet ajustement tient compte notamment de l’inflation.
Les montants n’avaient pas été revus depuis plusieurs années et le prix de location des véhicules automobiles a augmenté considérablement ces dernières années. L’ancienne limite était de 1 200 $ par sinistre. On a aussi supprimé la limite d’un montant maximal quotidien, qui était auparavant de 40 $ par jour.
L’assuré aura la responsabilité de louer un véhicule de même catégorie que celui qui a été volé. En plus des frais de taxi qui sont actuellement remboursés, l’assuré pourra aussi demander le remboursement des frais liés à tout autre mode de transport rémunéré de personnes par automobile. Tous les frais supplémentaires que l’assuré n’aurait pas à assumer habituellement pour ses déplacements, comme des frais de péage ou le carburant, seront couverts.
Cet ajustement permet de mieux répondre au problème que vivent certains assurés lorsque la période de location d’un véhicule se prolonge, précise l’Autorité dans la section 5.1 du bulletin hebdomadaire du 28 novembre 2024.
Système antivol
Toujours dans ce bulletin et dans le communiqué publié le même jour, l’Autorité publie un avis relatif aux avenants F.A.Q. no 45, F.A.Q. no 4-45A et F.A.Q. no 4-45B, où il est question de l’engagement formel visant le risque de vol d’un véhicule en entier.
« En signant cet avenant, l’assuré s’engage notamment à faire installer et à maintenir en fonction un dispositif antivol ou de repérage déterminé par l’assureur. Les assureurs qui exigent l’ajout de cet avenant visent ainsi à réduire le risque de vol, ce qui s’inscrit dans un ensemble de mesures pour lutter contre le fléau des vols de véhicules automobiles. »
L’Autorité précise ensuite ses attentes en matière de saines pratiques commerciales et de traitement équitable des clients. « Ainsi, lorsqu’un assureur exige l’ajout de l’un ou l’autre de ces avenants pour conclure le contrat d’assurance, l’Autorité considère qu’il serait opportun que l’assureur accorde à son client, par exemple, un rabais de prime ou qu’il assume les coûts d’installation d’un tel dispositif. »
Remplacement ou montant forfaitaire
Au lieu de remplacer son véhicule lors d’une perte totale, l’automobiliste pourra désormais choisir un montant forfaitaire, ce qui sera plus avantageux pour le consommateur, selon l’Autorité.
Lorsque l’assuré détient l’option 43E, les deux premiers types d’indemnisation prévus sont le remplacement du véhicule visé par un véhicule neuf et le remplacement par un véhicule usagé ou par un véhicule neuf autre que celui prévu par le premier type d’indemnisation.
Un troisième type est désormais ajouté, soit le cas où le véhicule n’est pas remplacé. « La valeur des dommages devra dorénavant correspondre au “prix payé majoré”, soit le prix payé pour le véhicule visé par l’assuré désigné, qui en est le propriétaire réel, majoré d’un pourcentage composé annuellement, calculé en proportion du nombre de jours écoulés entre la date du contrat d’achat du véhicule et la date de la perte totale », souligne-t-on dans le bulletin.
L’Autorité profite de l’occasion pour rappeler que le prix payé, ou le prix d’achat, « est le prix exigé par le marchand pour le véhicule tel qu’indiqué au contrat d’achat, de location à long terme ou de crédit-bail, incluant seulement ses équipements et accessoires ». Ce prix payé sur lequel sera basé le calcul du « prix payé majoré » ne doit pas inclure, le cas échéant, le solde de la dette lié au véhicule donné en échange ou sinistré, selon le cas.
Le pourcentage à utiliser pour calcul le prix payé majoré est établi à partir de l’indice des prix à la consommation (IPC) dans le secteur de l’automobile tel que publié par l’Institut de la statistique du Québec. Si l’IPC de l’année du sinistre n’est pas connu, on utilise celui de l’année précédente. Cet indice pour le secteur automobile a atteint 4,6 % en 2021 et 6,8 % en 2022, avant de s’établir à 3 % en 2023.
L’avenant F.A.Q. no 43 comprend aussi des options sur la perte partielle et les pièces neuves. « L’assureur doit déterminer la valeur des dommages pour la réparation du véhicule assuré selon le coût des pièces d’origine du fabricant neuves et non selon la valeur au jour du sinistre », indique l’Autorité. Certains assureurs déterminent la valeur des dommages relativement à la réparation du véhicule assuré sans prendre en considération le fait que l’assuré désigné détient ces options.
« En conséquence, l’estimation de la valeur des dommages s’avère moins élevée qu’elle ne l’aurait été si l’assureur avait considéré cette option de sorte que, dans certains cas, le véhicule est réparé alors qu’il aurait été déclaré perte totale ou réputée totale », précise l’Autorité, qui ajoute que cette façon de procéder prive l’assuré du bénéfice d’être indemnisé selon la protection qu’il détient, soit l’option 43E ou 4-43E.
Réaction d’un courtier
À propos d’InfoNIV, le courtier d’assurances Louis Cyr rappelle que cette base de données a été créée grâce aux renseignements sur les véhicules volés inscrits au Fichier central des sinistres automobiles (FCSA). Or, le mandat de gestion du FCSA est accordé par la loi à l’Autorité, qui l’a délégué au GAA.
« Donc, l’accès au Fichier central, c’est faisable et pas si compliqué », indique-t-il en entrevue avec le Portail de l’assurance, en rappelant que le réseau de courtage attend toujours impatiemment des changements concernant l’accès au FCSA.
Concernant les annonces faites par l’Autorité et le GAA le 29 novembre dernier, M. Cyr estime qu’elles auront peu d’impact sur le vol automobile. « Les consommateurs seront mieux protégés quand les corps policiers mettront les efforts pour combattre l’exportation de véhicules volés », dit-il.
De l’avis de M. Cyr, des mesures essentielles sont attendues de la part du gouvernement fédéral en matière de lutte contre le vol de véhicules. Ottawa doit doter l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) des moyens requis pour inspecter les expéditions faites dans les installations portuaires à Montréal.
Ensuite, des sanctions plus lourdes doivent être imposées aux malfaiteurs. « Au Canada, pour les crimes qui ne touchent pas directement à la personne, les peines sont moins sévères qu’ailleurs », dit-il.
Enfin, Transports Canada doit réviser son Règlement sur la sécurité des véhicules autonomes (la norme ULC 338). Cela forcera les fabricants automobiles à installer des systèmes antivol plus performants. Tant que ça ne sera pas le cas et qu’il sera facile d’exporter les véhicules volés à partir du port de Montréal, la facture du vol automobile restera élevée, selon le courtier.
À cet égard, M. Cyr suggère que le Canada adopte les mêmes normes de sécurité contre le vol que celles imposées par l’Allemagne à ses propres constructeurs.
Les mesures annoncées par l’Autorité et le GAA auront plutôt pour effet d’augmenter les coûts de sinistre des assureurs, ce qui leur donne la possibilité de hausser les primes. L’assureur doit obtenir un profit raisonnable en fonction de son chiffre d’affaires, indique le courtier.
« Le chiffre d’affaires de l’assureur vient des revenus tirés des primes. Et la prime, c’est la sinistralité qui la détermine », indique Louis Cyr. Selon lui, si le recel de véhicules volés se limite au marché intérieur, la facture de ce méfait demeure dans des limites raisonnables pour l’assureur et le consommateur.
Le gouvernement du Québec et l’Autorité sont sensibles à la grogne des consommateurs associée à la hausse constante des primes d’assurance, poursuit le courtier. En assurance habitation, le Québec pourrait par exemple amender le Code du bâtiment afin de limiter l’habitation dans les sous-sols.
Mais en assurance automobile, les moyens à adopter pour limiter la facture des sinistres relèvent du gouvernement à Ottawa, et non pas à Québec, répète le courtier. « Augmenter la limite à 3 000 $ pour le véhicule loué, ça ne sert pas à contrôler les coûts de sinistre, au contraire », conclut Louis Cyr.
Lutte à l’international
Par ailleurs, le 25 novembre dernier, le gouvernement du Canada annonçait l’octroi d’un financement de 3,5 millions de dollars (M$) sur trois ans au projet « Drive Out », une initiative menée conjointement avec l’Organisation internationale de police criminelle (INTERPOL) qui lutte contre le crime organisé transnational lié aux véhicules.
Dans son communiqué, Sécurité publique Canada rappelle que la plupart des véhicules volés et exportés du Canada sont destinés à l’Afrique et au Proche-Orient. La base de données d’INTERPOL recense plus de 12 millions de dossiers. Les services de police des pays membres peuvent vérifier si un véhicule suspect s’y trouve et de savoir immédiatement s’il a été déclaré volé.
En 2023, la base de données a permis de constater qu’à l’échelle mondiale, environ 226 000 véhicules avaient ainsi été volés dans un pays puis exportés vers un autre État.
L’Agence des services frontaliers du Canada a saisi plus de 1 800 véhicules volés en 2023, soit une hausse de 290 % par rapport au nombre de véhicules saisis en 2018.