Pour célébrer ses 25 années d’existence, le Journal de l’assurance vous présente 25 idées exclusives pour construire, dès aujourd’hui, l’industrie de demain.


L’industrie de l’assurance doit rapidement prendre le virage technologique. Les nouvelles générations de consommateurs sont prêtes à faire affaire avec les assureurs de l’ère numérique, affirme Bruno Guglielminetti.

Selon le stratège numérique bien connu au Québec, les clients sont désormais mieux outillés pour comparer les offres. Ainsi, les nouveaux besoins des clients poussent vers l’innovation. Il estime que ce sont plutôt les changements technologiques qui contribuent à changer les comportements des consommateurs.

« Le meilleur exemple est probablement le téléphone intelligent. Si on ne leur avait pas proposé ce bidule, les gens auraient continué à utiliser deux appareils, le téléphone sans fil d’un côté pour communiquer, et leur assistant personnel, du type Palm à l’époque. On arrivait à bien lire avec cela. Un jour, des gens ont pensé à mixer les deux appareils. Nokia a été la première à la faire, suivie par BlackBerry et Apple. On se retrouve désormais avec un ordinateur dans les mains qui permet aux gens d’être connectés en permanence. »

L’appareil permet aussi aux firmes intéressées d’obtenir énormément d’information sur le comportement, les actions, les gouts, les passe-temps et la vie de leurs utilisateurs. Désormais, et notamment grâce à l’utilisation de l’intelligence artificielle, les entreprises peuvent en savoir beaucoup grâce à la coopération même des consommateurs.

« On leur permet d’avoir accès à cette information. Le défi est de savoir ce que l’on peut en faire. Tous les appareils qu’on utilise génèrent énormément de données. Il faut développer les bons capteurs pour les attraper et voir ensuite comment on va les mâcher pour que ça devienne de l’information signifiante », dit-il.

Mieux comprendre le comportement des assurés

M. Guglielminetti cite l’exemple des mouchards utilisés en assurance automobile, qui transmettent des données en temps réel sur le comportement du conducteur. « On peut penser que toutes les données provenant de la voiture et des objets branchés dans sa maison peuvent aider les assureurs à avoir une meilleure idée du comportement et des habitudes des personnes qu’ils vont assurer », souligne-t-il.

Le problème de l’utilisation de l’information s’était posé quand Nike a installé une puce dans la chaussure de course, poursuit-il. « On s’est demandé alors ce qu’il se passe si la personne décide de se brancher à un réseau et de partager cette information. Qu’est-ce qui se passera le jour où une compagnie d’assurance mettra la main sur cette information ? »

On peut désormais compiler les renseignements sur son état de santé dans de diverses applications. L’utilisateur peut donner son accord pour les transmettre, mais l’on doit le rassurer sur l’utilisation qu’on en fait. « Il faudra une profession de foi, un guide éthique devra être écrit, et auquel les assureurs québécois et canadiens devront porter allégeance, en confirmant que les données provenant de ces outils ne seront pas utilisées sans le consentement des utilisateurs. C’est la crainte de tout le monde », dit-il.

La voiture connectée fournit énormément de données à compiler et de nombreux appareils sont aussi branchés à Internet. Une nouvelle industrie est en train d’émerger, celle de courtier en données. Des entreprises pourront offrir leur service aux assureurs pour analyser ces données. Des spécialistes du Big Data arriveront à produire des courbes sur certains aspects, et qui toucheront une région, ou un type d’utilisateur, explique-t-il.

Être présent, c’est déjà un plus

Les consommateurs sont toujours plus exigeants. Que doivent faire les assureurs pour affronter la concurrence des nouveaux joueurs issus de l’ère numérique ? « Être présent sur les plateformes où sont déjà les consommateurs, ça serait déjà un plus. Tous les assureurs ont leur site Web, certains sont présents sur Facebook. »

Par l’entremise de l’application Messenger de Facebook, on peut même faire du service à la clientèle avec un « chatbot », grâce à l’intelligence artificielle. « On doit permettre aux gens, peu importe où ils sont, d’avoir accès à de l’information, évidemment, avec des moyens, des mécanismes de validation de l’identité. Il y a de l’information générique que l’on peut obtenir », dit-il.

Le transporteur KLM utilise déjà un tel robot sur Messenger pour aider les passagers à retrouver leurs bagages, par exemple. Bruno Guglielminetti pense que les assureurs peuvent faire de même pour échanger avec leurs clients actuels ou potentiels. « Il faut être présent là où les gens sont », insiste-t-il.

Les échanges avec le représentant de l’assureur se font souvent au téléphone. L’utilisation du robot sera utile si l’utilisateur se trouve dans un endroit public.

« Vous pouvez être dans une boutique, en file en attendant de payer, vous ne tenez pas nécessairement à ce que la personne devant vous, ou derrière vous, entende la conversation que vous avez avec votre assureur. Vous le faites discrètement, assis dans une salle d’attente, ou en ligne sur un clavier », explique-t-il.

Le CEFRIO a publié le 29 juin dernier les chiffres sur l’utilisation des technologies numériques au Québec en 2016. « Un Québécois sur deux utilise quotidiennement Facebook, et 64 % des gens ont un compte là-dessus. Si les assureurs qui sont sur Messenger pouvaient offrir un service de téléréponse, qu’elle soit humaine ou avec un robot, déjà ça serait un endroit plus pratique pour bien des consommateurs », note-t-il.

Utiliser davantage les réseaux sociaux

L’industrie pourrait davantage utiliser les réseaux sociaux pour améliorer son image, rappeler quelques faits et défaire certains mythes sur l’assurance. « Ils peuvent être à un clic de leur clientèle. Ils doivent travailler à être plus près des gens, plus accessibles, plus efficaces. »

Un jour, Bruno Guglielminetti présentait une conférence devant un groupe de restaurateurs, et une dame a évoqué les problèmes qu’elle avait avec la plateforme TripAdvisor. Des clients y commentaient la qualité du service et de la nourriture dans son établissement. Le conférencier s’était montré assez direct.

« La première chose à faire, madame, c’est peut-être de regarder ce qu’il y a dans votre assiette et la manière dont vous la servez. Elle s’est mise à rire. Généralement, quand les gens se plaignent, c’est qu’il y a un problème. Il y a toujours des gens impossibles à satisfaire, mais assurez-vous au moins d’être efficaces », relate-t-il.

Un fournisseur comme Vidéotron, longtemps critiqué pour la qualité de son service à la clientèle, est devenu un modèle dans l’industrie des télécommunications. « On n’entend presque plus les gens se plaindre de leur service, outre les gens qui sont des détracteurs de l’entreprise », souligne-t-il.

Chaque entreprise est responsable de son image. « Il y a du travail à faire à l’interne pour régler les problèmes. Après, il faut savoir communiquer et passer le message, et investir dans les plateformes. On peut dépenser un million de dollars en moins dans les campagnes à la télé, et l’investir dans des campagnes originales, en ligne, afin d’attirer l’attention des gens et leur expliquer où l’entreprise est rendue, voire de faire des promesses. Il faut déboulonner des mythes », insiste M. Guglielminetti.

Il cite un autre exemple tiré du domaine de la restauration : il y a quelques années, la chaine McDonald’s a lancé la campagne « Nos aliments, vos questions ». En six mois, ils ont reçu 12 000 questions, dont bon nombre étaient redondantes, « mais ils ont pris le temps de répondre à tout le monde. Pendant tout le temps où la campagne a marché, les blagues plates et les images tristes sur la qualité de la bouffe dans les restaurants, ça a arrêté sur le Web », affirme-t-il.

Faire une profession de foi pour le service

Du côté des assureurs, ils doivent faire « leur profession de foi sur la qualité de leur service, être plus présents, plus proactifs. Ça va leur donner un bon coup de pouce. Je le vis avec mon assureur, je n’ai jamais été aussi bien servi dans ma vie. Et je la vois, la différence », dit-il.

Pour que l’effet dure, il faut cependant s’assurer que les promesses correspondent aux faits. La meilleure stratégie numérique ne suffira pas si la promesse de la qualité des produits et du service ne se concrétise pas.

« Vous pouvez vendre la meilleure histoire, mais une fois qu’on lève le voile, si les faits ne sont pas là, ça se retourne contre vous. La première chose à faire, avant d’être beau et fin sur les réseaux sociaux, c’est d’être beau et fin dans la vraie vie. Ça demande beaucoup d’investissement », souligne


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