Synex Performance d’affaires a trouvé deux investisseurs pour combler la sortie de Brown Brothers Harriman Capital Partners (BBHCP) : il s’agit de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) et des Fonds d’investissement en crédit d’Ares Management.
Les deux sociétés sont devenues investisseurs minoritaires et à participations égales dans Synex, qui en a fait l’annonce le 3 avril dernier.
En annonçant la plus récente acquisition de la société dans le courtage au Québec, à la mi-février, Synex confirmait la décision de BBHCP de récupérer son investissement de 100 millions de dollars annoncé en mars 2022.
En entrevue avec le Portail de l’assurance, Yan Charbonneau, président et chef de la vision de Synex, confirme que la venue des nouveaux investisseurs met un terme à un processus de 10 mois. La Banque Royale du Canada (RBC) avait été mandatée par Synex pour trouver de nouveaux investisseurs.
« C’est la RBC qui nous a présenté Ares, à travers le processus de recherche. On les connaissait déjà, car on avait déjà fait des recherches pour trouver des investisseurs aux États-Unis, et on les avait déjà rencontrés. Cette fois-ci, ils ont été les premiers qu’on a rencontrés. La Caisse s’est ensuite jointe à l’affaire, mais pour Ares, c’est vraiment par l’entremise du travail fait par la RBC », explique M. Charbonneau.
Quant à la CDPQ, elle avait déjà été approchée auparavant, sans que la relation se concrétise. Cette fois-ci, l’entente a pu être établie.
La sortie de BBHCP
Concernant la décision de BBHCP de se récupérer ses billes moins de trois ans après l’investissement initial, Yan Charbonneau indique que le fonds américain était « satisfait et content » du chemin parcouru, mais que son appétit pour la croissance par acquisitions n’était plus le même.
« Nous voulions retourner sur le chemin des acquisitions, et on voulait être un peu plus agressifs dans notre croissance. Eux n’étaient pas prêts à suivre au même rythme que nous souhaitions le faire. Nous étions d’accord pour prendre des chemins séparés. Alors, on a décidé de chercher quelqu’un pour racheter leur participation, et c’est ce qu’on a fait », dit-il.
« Nos intérêts n’étaient plus alignés. Ils étaient satisfaits des résultats, et on est restés en bons termes, la fin est heureuse. On n’a pas mis fin à notre relation alors qu’on était en chicane », poursuit-il.
Les nouveaux investisseurs
Au 31 décembre 2024, l’actif net de la CDPQ s’élevait à 473 milliards de dollars canadiens (G$ CA). De son côté, la plateforme mondiale d’Ares Management Corp. gérait plus de 525 milliards de dollars américains d’actifs (G$ US).
« L’appui de la CDPQ et d’Ares envoie un signal fort : notre modèle et notre vision fonctionnent et contribuent à redéfinir l’avenir du courtage indépendant », indique Yan Charbonneau, président et chef de la vision de Synex.
Selon Kim Thomassin, première vice-présidente et cheffe au Québec de la CDPQ, l’investissement de la Caisse se fait à la fois dans l’actionnariat et le financement de la dette. Elle ajoute que la CDPQ est déjà partenaire avec Ares dans d’autres entreprises.
« Notre relation avec Synex illustre la capacité d’Ares à conjuguer notre connaissance approfondie du secteur de l’assurance avec notre aptitude à offrir des solutions de financement flexibles et à grande échelle », précise Scott Rosen, associé chez Ares.
Ares exploite la plateforme Ares Insurance Solutions, afin de gérer les portefeuilles d’investissement de compagnies d’assurance présentes en assurance de personnes et en assurance de dommages. Quelque 1 100 professionnels travaillent dans cette division. Au 31 décembre 2024, Ares gérait ainsi environ 71,4 G$ US d’actifs pour le compte de 249 compagnies d’assurance des États-Unis et de l’étranger.
Par l’entremise de ses différents fonds d’investissement durant les 12 mois terminés au 31 décembre 2024, Ares a réalisé quelque 341 investissements pour des sommes totalisant 48,2 G$ US.
Parmi les investissements réalisés au dernier trimestre de 2024, le communiqué publié par Ares le 5 février 2025 rapportait un investissement dans le groupe Carlyle pour faciliter la croissance de The Hilb Group, une firme de courtage qui exploite une centaine de succursales dans tous les États américains et emploie 2 400 personnes.
En Europe francophone
L’investissement permettra à Synex de poursuivre son expansion. Même si l’accent sera maintenu sur la consolidation du réseau de courtage au Canada, Yan Charbonneau ne cache pas son intérêt à implanter son entreprise dans le réseau de courtage du côté de l’Europe francophone.
« On a déjà fait deux tentatives dans le passé, dont une qui a échoué parce qu’on était pris dans ce processus de recherche d’investisseurs », souligne-t-il. Selon lui, si le marché de l’assurance de dommages des particuliers est très concentré entre les mains de quelques assureurs directs, le réseau de courtage est très présent en assurance aux entreprises.
« Le marché est fragmenté. Dans les lignes commerciales, c’est un peu différent, il y a moins de très gros joueurs », dit-il.
« Le modèle de croissance par acquisition qu’on avait n’a pas changé et c’est d’ailleurs ce qui a intéressé ces nouveaux investisseurs. On ne change pas le cap. On espère que la CDPQ nous suggérera des idées, même chose pour Ares. C’est de l’expertise de plus autour de la table », indique le dirigeant de Synex.
M. Charbonneau précise que le pipeline d’acquisitions envisagées par Synex est déjà rempli et que les prochaines transactions auront lieu au Canada. Il est très enthousiaste à l’idée d’utiliser l’expertise de la CDPQ pour dénicher des acquisitions intéressantes en Europe, « ce qui nous évitera de faire des erreurs inutiles », dit-il.
Quant à Ares Management, la société joue un rôle plus classique d’investisseur qui souhaite obtenir du rendement de son actionnariat, précise-t-il.
En tentant de s’implanter en Europe, Synex ne risque-t-elle pas d’affronter la concurrence des grandes firmes internationales de courtage ? « Les géants comme Marsh et Aon prennent de l’expansion par croissance organique. Quand ils annoncent une transaction, ça se fait en milliards de dollars. On n’est pas dans le même marché. »
« On ne les croise pas ici. Quand je parle à des courtiers indépendants aux États-Unis, ils ne les croisent pas non plus. Même chose en Europe, ils ne sont pas là pour consolider le marché. La concurrence viendra plutôt d’entreprises de la même taille que Synex, mais en Europe », note M. Charbonneau.
Synex est présente dans les provinces maritimes, au Québec et en Ontario, de même qu’en Alberta et en Colombie-Britannique. Le groupe compte une vingtaine de cabinets et emploie plus de 700 personnes.
Le volume de primes dépasse le milliard de dollars, soit environ les deux tiers en assurance de dommages et le reste en assurances collectives. La firme est membre du Canadian Broker Network et du réseau américain Intersure.