Le Canada serait en tête de file mondiale en termes de nombre de vols de véhicules, mais aussi de nombre de fraudes en la matière. La tendance est à la hausse, c’est pourquoi les automobilistes et les assureurs devraient adopter des mesures de précaution, selon Freddy Marcantonio, vice-président, développement des affaires et distribution, chez Tag.
Un rapport d’Equifax Canada datant d’octobre 2024 révélait que la fraude automobile avait augmenté de 54 % au cours de l’année précédente. La société d’évaluation attribue entre autres le phénomène aux demandes de crédit falsifiées et aux vols d’identité. Equifax Canada indique également que c’est en Ontario où les fraudes automobiles ont le plus augmenté.
En 2014, un article du Portail de l’assurance indiquait qu’entre le quart et le tiers des vols d’automobile étaient potentiellement des fraudes.
Des fraudes coûteuses
La hausse des cas de fraude entraîne des coûts pour les assureurs canadiens, une facture que M. Marcantonio évalue à plusieurs millions de dollars chaque année.
« Les experts estiment que 30 % des véhicules non retrouvés sont suspectés de fraude. Près du tiers des vols d’automobiles signalés seraient en fait des fraudes », avance-t-il.
Qui plus est, la détection des fraudes est particulièrement complexe pour les assureurs, alors que les pertes attribuables à la fraude oscilleraient autour de 10 % des demandes.
Des stratégies raffinées
Avec le temps, le modus operandi des fraudeurs s’est affiné. Dans un cas de fraude sur trois, le propriétaire ou le locataire du véhicule est dans le coup, soutient M. Marcantonio.
« Le nouveau stratagème à la mode est d’utiliser un prête-nom pour acheter ou louer un véhicule, parfois quelqu’un qui n’aurait pas les moyens de se l’offrir », détaille le vice-président.
Le véhicule sera ensuite revendu à l’étranger par un groupe organisé et envoyé outre-mer dans un conteneur, par bateau, la plupart du temps. Mais sur papier, la voiture est toujours en sol canadien, souligne M. Marcantonio.
« Deux ou trois mois plus tard, le véhicule change de mains, souligne-t-il. On en profite pour changer d’assureur, et tout est beau. »
Le problème, dit-il, est que personne ne voit le véhicule lors des transactions au bureau d’enregistrement des véhicules et auprès des assureurs. « Pourtant, ça fait des mois que le véhicule est parti par bateau et qu’il ne se trouve plus au pays », indique le vice-président.
C’est quelques mois plus tard que la fraude est commise, quand le véhicule est déclaré volé. « Les fraudeurs ont déjà fait de l’argent sur le véhicule quand il a été revendu, et là, ils empochent l’indemnité des assurances », explique M. Marcantonio.
Mieux vaut prévenir
Il n’existe pas, à l’heure actuelle, de solution permettant de déceler avec certitude qu’une demande d’indemnisation est frauduleuse, d’autant plus que le système d’assurance actuelle est fondé sur la bonne foi présumée des assurés.
Si on ne peut empêcher des fraudes d’être commises, il est cependant possible de les rendre plus facilement identifiables, soulève M. Marcantonio.
Tag a mis en place, il y a une douzaine d’années, le département de support aux assurances pour venir en aide aux assureurs dans la détection des fraudes.
Essentiellement, si un concessionnaire ou un particulier choisit de faire affaire avec l’entreprise, qui se spécialise dans l’installation de balises de repérage sur les véhicules, celle-ci conserve les données de géolocalisation d’une voiture.
Seule une poignée de personnes habilitées ont accès à ces informations confinées dans une base de données chiffrées.
« Disons qu’un véhicule a été déclaré volé la semaine dernière, si on vérifie ses déplacements à la demande d’un assureur et qu’on se rend compte que les dernières données enregistrées par nos balises datent de plusieurs mois, au port de Montréal, on peut se demander pourquoi le propriétaire ne l’a pas déclaré plus tôt… », illustre M. Marcantonio.
Une autre base de données
En novembre 2024, l’Autorité des marchés financiers avait actualisé plusieurs formulaires d’assurance automobile et déployé la base de données info NIV, de concert avec le Groupement des assureurs automobiles (GAA).
Cette base de données, administrée par le GAA, a pour objectif de faciliter le transfert d’information entre assureurs et policiers lors du vol d’un véhicule.
Depuis 1981, chaque automobile sort de l’usine avec un numéro d’identification de véhicule (NIV) de 17 caractères alphanumériques. Ce NIV est observable à plusieurs endroits dans le véhicule et sert en quelque sorte d’empreinte digitale.
Le NIV permet de connaître le modèle et l’année de fabrication du véhicule, sa marque et sa classe, entre autres. Il permet aussi d’identifier de façon unique une voiture auprès de l’industrie de l’assurance, des autorités, des gouvernements et d’autres parties concernées, facilitant ainsi le suivi de son historique, qu’il s’agisse d’accidents, de changement de propriétaire ou de vols.
L’inscription des assureurs à info NIV est obligatoire depuis le 1er janvier 2025.
Tarifs douaniers
Les tarifs douaniers décrétés par l’administration du président Donald Trump, aux États-Unis, il y a quelques semaines, inquiète grandement l’industrie automobile et les assureurs, souligne M. Marcantonio.
Plusieurs retiennent leur souffle en attendant de connaître les répercussions de cette imposition, gardant en tête l’augmentation des vols survenus durant la pandémie de COVID-19.
« Certains pays n’avaient plus accès à certains modèles de véhicules, alors il y avait eu une hausse des vols, explique le vice-président. Est-ce que les effets des tarifs sur les chaînes de production auront le même effet ? Pour l’instant, on l’ignore. »
Un dossier entièrement consacré au vol d'automobiles est à lire dans l'édition de mars 2025 du Journal de l'assurance.