Selon le président et chef de la direction de Croix Bleue Canassurance, Sylvain Charbonneau, des conditions géopolitiques et économiques ont pris le pas sur la pandémie de COVID-19 pour venir chambouler l’industrie du voyage au printemps et à l’été 2022. M. Charbonneau rappelle toutefois que la situation évolue rapidement.
Il a remarqué que l’inflation a été davantage perçue comme une embûche aux voyages au début de l’été, lorsque la Banque du Canada a annoncé que le taux d’inflation avait atteint 8,1 % en juin 2022, comparativement à 7,7 % en mai 2022. Le rythme a ralenti cet été, alors que le taux d’inflation s’est établi à 7,6 % en juillet 2022. La banque centrale canadienne était sur le point de révéler le taux d’inflation d’août 2022, au moment d’écrire ces lignes. La Banque du Canada mesure l’inflation selon la variation de l’indice global des prix à la consommation.
Sylvain Charbonneau croit que l’inflation pourrait avoir un impact sur la capacité des gens à voyager. « Un sondage récent montre que ceux qui n’envisagent pas voyager dans la prochaine année considèrent le coût du voyage et de l’augmentation du coût de la vie comme la plus importante barrière, avant les mesures sanitaires liées à la COVID-19 », ajoute le PDG de Croix Bleue Canassurance.
Hausse des primes
PDG de SécuriGlobe, un courtier d’assurance voyage acquis de La Capitale par Croix Bleue Canassurance en juillet 2021, François Morin soulève les effets de l’inflation sur le coût de l’assurance voyage. M. Morin rapporte que le coût de l’assurance voyage a augmenté depuis le début de la pandémie. Il dit avoir observé que la hausse moyenne du prix de l’assurance voyage de ses fournisseurs a oscillé dans une fourchette de 5 % à 10 %.
En revanche, le courtier ne craint pas l’effet de l’inflation sur les intentions de voyage des Snowbirds. « Les snowbirds se montrent résilients face à l’augmentation de l’indice des prix à la consommation (IPC). Ils feront des sacrifices pour partir », croit M. Morin.
Inflation des frais médicaux
Sylvain Charbonneau observe quant à lui que le coût de l’assurance voyage a été affecté par l’augmentation des frais médicaux. « Nous n’avions pas ajusté nos primes durant la pandémie ; nous l’avons récemment fait. L’augmentation a été de l’ordre de 5 % à 7 % approximativement en avril dernier. Plusieurs assureurs ont ajusté leurs primes ou pourraient le faire. Il y a eu un peu rattrapage, car les frais médicaux ont continué d’augmenter globalement, surtout aux États-Unis », explique M. Charbonneau.
Sylvain Charbonneau n’impute pas la hausse des primes d’assurance voyage aux cas de COVID-19. Ils n’ont eu, selon lui, aucun impact significatif sur l’expérience de Croix Bleue Canassurance. « Nous n’avons pas observé énormément de cas de COVID-19 parmi notre clientèle », confie M. Charbonneau. Lorsqu’il y en a eu, ces cas n’ont pas entraîné de longs séjours en établissement de santé, ajoute-t-il. « L’ajustement des primes est davantage lié au contexte économique qui a affecté les coûts médicaux que nous couvrons dans nos contrats », note le PDG de Croix Bleue.
Pas trop proche de l’Ukraine
Revenant sur le contexte géopolitique, Sylvain Charbonneau mentionne que la guerre en Ukraine contribue à atténuer les intentions de voyage en Europe, principalement en Europe de l’Est. « On observe aussi une plus grande propension des clients à aller aux États-Unis. La baisse provient des intentions de voyager en Asie et en Europe. Dans leur processus de réapprivoiser les voyages, les clients vont à l’étranger, mais un peu moins loin, et pas trop proche de l’Ukraine », signale Sylvain Charbonneau.
Directeur, assurance voyage de Optimum Réassurance, Patrick Charbonneau remarque pour sa part que « la prévision actuelle est bonne » quant aux intentions de voyages des snowbirds, mais qu’il y a « encore de la réflexion de la part des Canadiens qui veulent voyager ». Parmi les éléments qui font réfléchir les voyageurs, M. Charbonneau cite :
- La hausse du coût des vols et des forfaits de voyages ;
- La hausse du prix de l’essence ;
- Le coût de la location de voiture « qui est maintenant exorbitant », commente-t-il ;
- L’inflation en général ;
- Les problèmes dans les aéroports canadiens (délais et annulations de vols) ;
- Le risque d’une prochaine vague de la COVID-19 cet automne 2022.
« Ces impacts vont favoriser l’augmentation des voyages en automobile au détriment des voyages en avion, même si le prix de l’essence est élevé », prévoit le directeur de l’assurance voyage à Optimum Réassurance.
À l’instar du PDG de Croix Bleue Canassurance, Patrick Charbonneau croit aussi que le voyage du côté américain reviendra en force, au détriment de « la nouvelle tendance de certains Snowbirds d’aller passer leur hiver en Europe (Espagne, Portugal) », dit-il.
« Une autre tendance sera de voyager plus nord-sud qu’est-ouest », ajoute Patrick Charbonneau. La pandémie a selon lui favorisé les voyages près du lieu de résidence de l’assuré. Il s’agit ainsi de faciliter le retour au domicile, si des risques apparaissent, tels que celui d’attraper la COVID-19 ou d’assister à l’arrêt complet des vols, explique-t-il.
Cet article est un Complément au magazine de l'édition de septembre 2022 du Journal de l'assurance.