Bien que l’inondation soit un risque qui commence à être couvert par certains assureurs, les crues des eaux survenues en mai à travers le Québec ont été riches en enseignement pour l’industrie.

Tous les assureurs avec qui le Journal de l’assurance s’est entretenu s’entendent pour dire que cet épisode d’inondations a été « marqué et marquant ». Les téléphones de tous les assureurs n’ont pas dérougi durant cette période, ont-ils confié. Peu d’assureurs se sont toutefois avancés pour chiffrer le nombre de demandes de réclamation reçues, puisque des réclamations peuvent toujours leur être soumises.

Le Journal de l’assurance a aussi pu constater que le traitement, l’acceptation ou le refus des réclamations se fait différemment chez chacun des assureurs. Tous les dossiers sont réglés au cas par cas. Alors que certains offrent l’avenant contre la crue des eaux, d’autres n’ont pas ajouté la protection aux contrats de leurs assurés. Ne sachant pas ce qui allait arriver, la majorité des assurés n’ont pas reçu de communication indiquant qu’ils étaient couverts. Certains l’ont donc découvert en contactant leur assureur.

À La Garantie, compagnie d’assurance de l’Amérique du Nord, une cinquantaine de réclamations ont été reçues, qui seront toutes acceptées, puisque l’assureur a ajouté plus tôt dans l’année la protection contre la crue des eaux à leur police habitation. « Lorsque nous avons fait l’ajout automatique, il n’y avait pas de restrictions. Toutefois, une souscription sera faite au moment du renouvellement, et des restrictions pourront s’appliquer », souligne Daniel Richard, vice-président, directeur général, Québec, chez l’assureur.

Aviva Canada a aussi rendu disponible l’avenant contre les inondations en mars dernier. Martin-Éric Tremblay, vice-président principal, région du Québec, explique que leur protection se différencie de celle de l’industrie parce qu’elle couvre le montant total de la police. « Ce ne sont pas seulement les refoulements d’égouts qui sont couverts, les inondations aussi, causés par une pluie subite et le débordement des rivières », énonce-t-il.

Robert Lépine, directeur régional sénior, indemnisation des biens, région de l’Est du Canada d’Aviva Canada, souligne que le volume d’appels était 2,5 fois plus élevé qu’à l’habitude. « Les inondations ont évidemment eu un poids important dans cette hausse du nombre d’appels. Ils auraient aussi été plus nombreux qu’à la même période de l’année dernière sans l’évènement. »

6 000 réclamations chez Desjardins

Desjardins Assurances Générales évalue avoir traité 6 000 réclamations liées à des dommages causés par l’eau, soit 4 000 en avril et 2 000 en mai. Valérie Lamarre, conseillère principale, relations publiques pour le mouvement coopératif, tient toutefois à préciser qu’il s’agit d’une estimation préliminaire.

Desjardins évalue que 80 % de ses assurés habitent à l’extérieur des zones à risque et ont pu profiter de l’avenant. Du reste, le 15 % d’assurés qui demeurent dans des zones moyennement à risque doivent demander l’ajout de l’avenant à leur police. Ils subiront donc un ajustement de tarification. Pour les 5 % restants dans les zones à haut risque, l’option n’est pas disponible. « Nous avons appelé les clients couverts qui se trouvent à proximité des zones touchées pour voir s’ils ont subi des dommages. On les a informés de la couverture dont ils bénéficient », spécifie Mme Lamarre.

Quant à Intact Assurance et belairdirect, l’avenant contre la crue des eaux a été ajouté automatiquement aux clients éligibles, qui restent dans des zones de faible et moyen risque. Le service de réclamation des deux assureurs affirme prendre en compte l’élévation, la perméabilité du sol, et l’historique lorsque l’assureur évalue l’admissibilité d’une propriété située dans une zone de moyen à haut risque.

« L’assurance est là pour protéger les gens de l’imprévisible. Pour une maison construite sur le bord de l’eau, l’inondation est un risque prévisible. Elle n’est donc n’est pas éligible à l’ajout de l’avenant », indique Jason Patuano, directeur principal des communications chez belairdirect, qui parlait au nom des deux assureurs.

La question des frais de subsistance

Jean-Pascal Lavoie, conseiller en communication à La Capitale assurances générales, révèle qu’il y a eu une hausse de 30 % des appels liés à l’eau par rapport à la même période en 2016. Il ajoute que l’assureur étudie la possibilité d’offrir l’avenant contre la crue des eaux. « Il n’y a pas de décision qui a été prise à cet effet. »

Par contre, La Capitale accepte les réclamations liées aux refoulements d’égouts qui ne sont pas attribuables à la crue des eaux. « Nous évaluons les dossiers exactement comme à l’habitude, en ligne avec tout ce qui se fait ailleurs dans l’industrie. L’inondation est exclue du contrat de base, et s’applique dès que l’eau atteint la maison », ajoute-t-il.

Il indique d’ailleurs que La Capitale a décidé de payer les frais de subsistance pour les assurés évacués. L’assureur a aussi remboursé les frais de consultation pour du soutien psychologique, peu importe si l’assuré est couvert ou non.

Du côté de Promutuel Assurance, le versement de frais de subsistance s’est fait au cas par cas. « Lorsqu’il y a un ordre d’évacuation, ces frais peuvent être admissibles, mais ça dépend des contrats et de leurs conditions particulières. Dans certains cas, ces frais ont été remboursés », explique Émilie Dick-Roy, conseillère en relations publiques. Par ailleurs, elle a précisé que Promutuel s’affaire à fournir rapidement les documents nécessaires pour que les assurés puissent recevoir une indemnité du programme gouvernemental.

Promutuel affirme aussi se pencher sur l’avenant contre la crue des eaux. « Nous avons présentement plusieurs projets sur la table, dont un outil de gestion des polices. Il est certain que nous réfléchissons à la possibilité d’offrir l’avenant contre la crue des eaux. Les récents évènements accélèrent nos réflexions à ce sujet », dit Mme Dick-Roy.

Du côté de SSQ auto et habitation, on révèle que le nombre de réclamations pour les cinq premiers mois de l’année a connu une hausse globale en assurance habitation. L’assureur songe aussi à offrir l’avenant contre la crue des eaux, indique sa porte-parole Danielle Rioux. Si l’habitation n’est pas protégée contre les inondations, SSQ couvre toutefois les dommages causés à un véhicule par ce type de sinistre. L’assureur a aussi offert une assistance à ses assurés quant à leurs démarches auprès du gouvernement, afin d’obtenir de l’indemnisation, entre autres en les mettant en lien avec la Sécurité civile.