Aurrea Signature a pris une participation minoritaire dans Karma Assurance, une société en démarrage qui vendra directement de l’assurance en ligne, avec le soutien d’une équipe de conseillers salariés.

Karma Assurance veut bouleverser le modèle de vente traditionnel et rendre l’expérience en ligne plus agréable pour les consommateurs. Sa plateforme actuellement en développement verra le jour en version bêta le 29 juin 2017. Cette première version se limitera au départ à l’offre de produits d’assurance vie individuelle. Un lancement officiel aura lieu plus tard à l’été. Si l’entreprise connait du succès, l’offre de produit s’étendra éventuellement à tous les produits individuels.

Partenaire d’Aurrea

Karma sera un agent général partenaire d’Aurrea signature et aura accès à ses 17 fournisseurs d’assurance, à des services de conformité et d’arrière-guichet, a précisé le PDG d’Aurrea, Christian Laroche. Les partenaires ont indiqué que la demande d’inscription de Karma Assurance auprès de l’Autorité des marchés financiers suivait son cours. M. Laroche veut leur permettre d’être actifs à travers le Canada, à travers les permis que détient Aurrea en Ontario et dans les Maritimes. Il entreprendra des démarches pour obtenir aussi des permis dans l’Ouest canadien.

Les conseillers qui agiront pour Karma seront rémunérés par une formule de salaires et bonis de performance, a révélé M. Laroche. La propriété des affaires en vigueur demeurera entre les mains de Karma Assurance, qui recherche avant tout des conseillers intéressés par le service et non la vente. L’entente ne prévoit pas de partage de commissions entre Aurrea et Karma.

« Karma a le même contrat que tout autre agent général partenaire d’Aurrea, par exemple Pro Vie assurances. Aurrea recevra la surcommission des assureurs et Karma recevra sa rémunération totale. Karma laissera à Aurrea une part pour assumer entre autres nos services d’arrière-guichet », a expliqué M. Laroche, en entrevue au Journal de l’assurance.

Les conseillers de Karma auront leur permis, mais ne se déplaceront pas chez le client. Hors l’interaction avec le conseiller, le processus se déroulera entièrement en ligne, grâce à la proposition et la signature électroniques. Le PDG d’Aurrea a précisé qu’il mettra son réseau de conseillers indépendants au service de Karma Assurance, dans les cas où le cabinet dédié à la vente directe aurait besoin de lui transmettre des dossiers plus complexes.

De passage au Journal de l’assurance en compagnie de Christian Laroche, les deux partenaires majoritaires et fondateurs de Karma Assurance, Isabelle Bouchard et Martin Bailey, ont raconté leur cheminement. Conjoints dans la vie, ils souhaitent tirer parti du virage numérique qu’ont entrepris les assureurs dans les dernières années. Ils veulent aussi redéfinir la façon de vendre de l’assurance en ligne.

Ils miseront sur une équipe de conseillers salariés pour amener les clients à acheter de l’assurance, et non à se la faire vendre. Les deux trentenaires sont d’ailleurs des néophytes en assurance. Mme Bouchard a un bac en droit, et M. Bailey un bac en génie logiciel.

C’est pourtant une des choses qu’a le plus aimée Christian Laroche de ces deux jeunes entrepreneurs. « Leur force est justement qu’ils ne sont pas issus du secteur de l’assurance. Ils n’ont pas été contaminés. Ils ont suivi des étapes que nous n’aurions pas suivies, par exemple en faisant plusieurs entrevues avec des milléniaux et des Y, et en effectuant des tests de leur plateforme dans des cafés Internet. Ils ont compris de quelle façon ces jeunes voulaient contracter de l’assurance. »

Lors de cette étude de marché, le couple a pu cerner les attentes des jeunes envers des processus fluides et transparents, plus faciles d’utilisation. « C’est ce qui est ressorti de nos nombreuses entrevues au cours desquelles nous avons demandé ce que les personnes pensaient du modèle de vente d’assurance existant », dit M. Bailey. C’est leur fibre entrepreneuriale qui a poussé les deux entrepreneurs à créer Karma Assurance, avant même de connaitre le secteur. « Nous avons habité neuf ans à Vancouver, où nous avons lancé des start-ups de technologie en pharmaceutique, en intelligence artificielle et en vision numérique, dit-il. Nous nous sommes ensuite intéressés aux fintechs et avons constaté le virage numérique entrepris dans le secteur de l’assurance », relate M. Bailey.

Perturbateurs de tradition

Et pourquoi réinventer le modèle que les assureurs commencent à peine à mettre en ligne ? Les assureurs prennent bel et bien un virage numérique, disent les associés de Karma Assurance, mais tendent à y répéter la traditionnelle vente à pression.

Pourtant, rejoindre les jeunes exige justement d’éliminer la pression de vente de l’équation, insiste Isabelle Bouchard. « Nous voulons faire mentir l’adage selon lequel l’assurance est un produit qui se vend, non un produit qui s’achète, lance-t-elle. J’étais certaine que l’on pouvait acheter de l’assurance vie par Internet, même avant de rentrer en contact avec M. Laroche. Mais je n’aimais pas le modèle traditionnel de l’offre numérique où on demande un nom et un numéro de téléphone, et dans lequel, éventuellement, un conseiller s’assoit à votre table. Je voyais des générateurs de prospects qui rendent l’offre numérique semblable à celle de la souscription traditionnelle, alors que nous voulons aller plus loin », dit-elle.

Une façon d’aller plus loin selon Karma : émuler le modèle des banques pour éviter que ces institutions ne raflent tout le marché des jeunes férus d’Internet. « La plateforme offrira aux utilisateurs des outils en ligne pour se familiariser aux produits d’assurance, des outils d’analyse de besoins, de comparaison de taux et de caractéristiques de produits, des calculateurs et le soutien du conseiller, pour amener l’utilisateur jusqu’à l’achat de sa police », a énuméré Mme Bouchard.

Karma n’écarte pas la possibilité de vendre des produits que les assureurs ont conçus pour se transiger sans l’intervention d’un conseiller. « Nous avons la technologie pour le faire, dit Mme Bouchard. Comme tout le monde, nous sommes dans l’attente du dépôt de la loi qui encadrera cette pratique. »

Mme Bouchard et M. Bailey insistent toutefois sur l’importance du rôle du conseiller dans la chaine de distribution. Leur étude du marché démontre que les Y et les milléniaux veulent rechercher de l’information en ligne sur l’assurance sans avoir de pression. Or, ces chercheurs autonomes ont besoin d’un conseiller pour répondre à leurs questions et découvrir le produit dont ils ont besoin. Mme Bouchard a signalé que le conseiller sera toujours accessible durant le processus, par chat, courriel ou téléphone.

Le courtier toujours impliqué

« Selon un sondage de LIMRA, 80 % des milléniaux commencent à faire leurs recherches sur Internet avant d’acheter de l’assurance vie, et il n’existe pas d’offre pour accommoder cette clientèle, a rappelé pour sa part M. Bailey. Ultimement, le courtier sera toujours impliqué pour assurer la conformité de la transaction et la valider. Ce ne sera pas un système non supervisé, où on peut acheter n’importe quoi. »