Tous les scénarios ont montré que la transition climatique impliquera des risques importants pour certains secteurs économiques. C’est entre autres ce que révèle le rapport Utiliser l’analyse de scénarios pour évaluer les risques liés à la transition climatique, publié en janvier 2022 par la Banque du Canada et le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF).
On y apprend que la transition sera plus difficile dans les pays qui ont de grands secteurs à fortes émissions de carbone, comme le Canada. Si tous les secteurs doivent contribuer à la transition, certains subiront d’importants contrecoups financiers, dit le rapport. Parmi ces secteurs, le rapport mentionne le secteur des combustibles fossiles. Il ajoute que d’autres secteurs bénéficieront de la transition, tel celui de l’électricité.
« Les résultats de l’analyse mettent aussi en évidence le risque d’impacts significatifs sur le plan macroéconomique, découlant en grande partie de dynamiques mondiales et affectant plus particulièrement les pays exportateurs de produits de base, comme le Canada », écrivent les auteurs du rapport. Ils attribuent principalement les impacts à la baisse des prix mondiaux des produits de base.
Quatre assureurs et deux banques
Le rapport résulte d’un projet pilote d’analyse de scénarios auquel ont collaboré six institutions financières. Parmi elles figurent deux assureurs de dommages, Co-operators et Intact Assurance, deux assureurs vie, Manuvie et Sun Life, ainsi que Banque TD et RBC Banque Royale.
La Banque du Canada et le BSIF ont élaboré ces scénarios pour illustrer les conséquences possibles de transiter vers un monde qu’ils qualifient de « sobre en carbone ». À travers ces scénarios, les deux organismes ont aussi voulu illustrer les types de tensions qui pourraient se manifester dans le système financier et l’économie au fil de la transition.
Les deux organismes signataires du rapport ont dit souhaiter que le projet pilote aide le secteur financier à développer des ressources et des capacités pour évaluer et communiquer les risques liés à la transition économique.
Prochaine étape : les risques physiques
D’autres travaux sont prévus. Le rapport signale entre autres qu’il faudra déployer des efforts pour améliorer la collecte des données sur les expositions et les vulnérabilités. Il ajoute que plus d’institutions devront recourir à l’analyse de scénarios. Les prochains travaux pourraient porter sur les risques physiques liés aux changements climatiques. Il pourrait aussi porter sur d’autres types de risques ou des questions plus larges d’ordre systémique, indique le rapport.
Sous-gouverneur de la Banque du Canada, Toni Gravelle a déclaré que la Banque s’est engagée à élaborer de nouveaux modèles et de nouvelles méthodes pour mieux comprendre les effets physiques des changements climatiques, et l’incidence de la transition climatique sur l’économie canadienne.
La Banque du Canada a dit qu’elle prévoyait renforcer sa capacité à évaluer les implications des phénomènes météorologiques extrêmes plus fréquents, ainsi que l’incidence de la transition sur la croissance de la production potentielle, le marché du travail et l’inflation.
Plus de rigueur
L’analyse des scénarios conclut également que les institutions financières doivent avoir des pratiques plus rigoureuses de gestion des risques financiers liés aux changements climatiques. « Les exercices d’analyse de scénarios climatiques comme celui-ci montrent clairement les incidences financières potentielles des risques liés à la transition climatique en fonction de diverses trajectoires de transition », a commenté Ben Gully, surintendant auxiliaire du BSIF.
Il estime que ces scénarios sont essentiels pour améliorer les connaissances et les capacités des entités réglementées en matière de gestion des risques. Ils favorisent ainsi la résilience du système financier durant la transition, ajoute M. Gully.
Le BSIF entend publier au cours de 2022 des lignes directrices préliminaires sur la gestion des risques climatiques. Elles s’adresseront aux institutions financières fédérales. Le BSIF souhaite ainsi obtenir cinq résultats qu’il qualifie de prudentiels :
- Connaissance
L’ensemble de l’institution comprend les risques financiers liés au climat et leurs répercussions.
- Gouvernance et stratégie
L’institution incorpore les risques financiers liés au climat à sa stratégie globale et à sa propension à prendre des risques. L’institution les intègre au régime de gouvernance du risque, en plus de les gérer adéquatement et de les superviser.
- Gestion du risque
L’institution intègre les risques financiers importants aux processus de gestion du risque et les gère en conséquence.
- Résilience financière
L’institution détient assez de fonds propres et de liquidités pour faire face à des scénarios de risques climatiques graves, mais vraisemblables sur de longues périodes.
- Résilience opérationnelle
L’institution continue de réaliser ses activités essentielles malgré les perturbations causées par des catastrophes climatiques.