Desjardins Assurances a dévoilé les résultats d’une étude qui tire la sonnette d’alarme sur les troubles du sommeil, qui toucheraient un grand nombre d’employés et affecteraient lourdement la productivité des entreprises.

Près de 40 % de la population adulte au Canada souffre d’un trouble d’insomnie au moins trois fois par semaine, selon l’étude intitulée Le sommeil : un levier d’amélioration du bienêtre des employés et de la performance de l’entreprise. Ces Canadiens rapportent une ou plusieurs des difficultés du sommeil suivantes : troubles d’endormissement ; troubles de maintien du sommeil ; réveil précoce ; sommeil non récupérateur. Ces difficultés surviennent au moins trois nuits par semaine, depuis au moins trois mois. L’étude souligne que ces problèmes surviennent malgré que le sujet ait des habitudes et des conditions adéquates.

Réalisée par le Groupe Levia, en collaboration avec le CIRANO (Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations), l’étude publiée en 2017 a été commanditée par Desjardins Assurances. Sa vice-présidente, développement, commercialisation et stratégie, assurance pour les groupes et les entreprises, Nathalie Laporte, en a dévoilé les résultats lors de deux événements organisés à Montréal durant la semaine du 1er mai : le Rassemblement sur la santé et le mieux-être en entreprise et la Semaine internationale francophone de la santé et la qualité de vie au travail.

Découverte-choc de l’étude : la majorité des Canadiens ne dorment pas le minimum d’heures requises pour vraiment récupérer. « Sept heures sont le minimum nécessaire, qui permet à l’organisme de récupérer et de fabriquer les hormones dont il a besoin. Nous ne sommes pas aussi simples qu’un appareil que l’on peut brancher dans une prise pour se recharger », a commenté Mme Laporte.

Les troubles signalés peuvent aller de la difficulté à s’endormir ou à se rendormir de temps à autre, de tourner et tourner dans son lit, jusqu’à l’insomnie chronique, où ces troubles se répètent de deux à trois fois par semaine, pendant une période d’au moins trois mois. Plus rare, l’apnée obstructive du sommeil n’en fait pas moins des ravages, surtout du fait que 80 % des cas ne sont pas diagnostiqués.

Nathalie Laporte pointe plusieurs facteurs du doigt pour expliquer l’ampleur de ces troubles : le stress, les horaires de travail atypiques, le culte de la performance, mais aussi les habitudes de vie malsaines comme l’usage de tabac et l’excès d’alcool. Les personnes aux prises avec des difficultés financières, ou qui vivent de la violence physique ou psychologique, y sont particulièrement vulnérables.

« L’étude révèle qu’il y a cinq millions de travailleurs qui ne dorment pas bien, dit-elle. Des statistiques disent que 59 % d’entre nous s’ennuient de leur oreiller lorsqu’ils sont au travail. »

Facture élevée du présentéisme

Nathalie Laporte signale que les troubles du sommeil contribuent à faire augmenter le cout de l’assurance collective. Les troubles du sommeil, et leurs conséquences, qu’elles soient directes ou indirectes, sont couteux pour les entreprises, a-t-elle ajouté. « Ils entrainent des couts de l’ordre de 30 milliards de dollars (G$) au Canada seulement, en termes de perte de productivité. Aux États-Unis, l’apnée entraine une perte de productivité dont les couts atteignent 262 G $ US », a révélé Mme Laporte.

Ces couts élevés des troubles du sommeil passent sous le radar des employeurs, car ils se cachent derrière d’autres problèmes, a dit Mme Laporte en entrevue exclusive au Journal de l’assurance. « Les plus gros impacts des troubles du sommeil sur l’employeur sont l’absentéisme et le présentéisme. Ils comptent pour 96 % des couts liés à ces problèmes. Un mauvais dormeur vivra en moyenne 28 jours de présentéisme par année dans l’entreprise, contre trois jours pour un bon dormeur. »

Selon Mme Laporte, les troubles du sommeil cachent aussi d’autres problèmes de santé. « Ce qui coute cher, ce sont les conséquences du manque de sommeil. Il entraine d’autres maladies, lesquelles entrainent à leur tour des invalidités. » Et la liste est longue : diabète, hypertension, dépression et autres troubles de santé mentale. « Les employeurs doivent intégrer le sommeil à leurs programmes de prévention, comme ils l’ont fait pour les autres problèmes de santé et de mieux-être au travail», insiste Mme Laporte.

Halte aux médicaments !

Aux États-Unis, on a adopté l’approche de prescrire la thérapie cognitivocomportementale, plutôt que seulement des médicaments, rapporte-t-elle. «Cette approche a le mérite d’aller aux faits et de changer les comportements. Un programme mis en place aux États-Unis proposait des webinaires aux employés avec des séances de questions, ainsi que des courriels mensuels de rappels et d’incitation à appliquer des stratégies. Il a fait chuter de 30 % à 10 % le nombre d’employés qui rapportaient avoir un mauvais sommeil», a indiqué Mme Laporte.

Ce ne sont pas les médicaments contre l’insomnie qui coutent cher, ajoute Mme Laporte. «Il faut travailler au niveau de la prévention. Les médicaments ne traitent pas la cause, mais les symptômes, et les problèmes empirent. Ils nous laissent un peu moins frais le lendemain, alors le niveau de fatigue s’élève. Le problème peut se transformer en maladies connexes et les couts de santé devenir plus élevés», soutient-elle.