Lors d’un panel de dirigeants de l’industrie des fonds communs, Stéphane Blanchette a lancé que le rôle du conseiller est d’accompagner son client en temps difficiles. Le vice-président exécutif, chef de conformité et chef de la gestion des risques d’Investia Services financiers, a aussi exhorté les conseillers à tirer parti des enjeux démographiques et de transformation numérique pour démontrer leur valeur.
M. Blanchette a tenu ces propos lors du colloque du Conseil des fonds d’investissement du Québec (CFIQ), en mai 2022. Modératrice du panel et première directrice régionale, stratégie de distribution-entreprise de RBC, Brigitte Felx a sondé son opinion sur les enjeux démographiques de l’industrie.
« Notre force de vente est vieillissante, a répondu M. Blanchette. Tout comme l’est la population générale. Nous devons composer avec cette réalité : on dit souvent qu’on est touché à deux niveaux. »
En ce qui concerne la population générale, son vieillissement « amène les gens en période de décaissement », signale Stéphane Blanchette.
Stéphane Blanchette révèle que les conseillers qui ont plus de 60 ans représentent 30 % de la force de vente, et 30 % du volume d’actif d’Investia, filiale de courtage en épargne collective d’iA Groupe financier. « C’est un volume très important qui sera nécessairement en migration dans les prochaines années », prévoit-il. M. Blanchette avance que la proportion de gens âgés de 60 ans et plus représente 25 % de la population générale.
Migrer vers les jeunes conseillers
Il en est tout autre des jeunes conseillers. M. Blanchette révèle que les représentants en épargne collective de moins de 40 ans ne représentent que 7 % de la force de vente d’Investia, et leurs actifs 10 % de son volume total. « Pour nous, le plus gros défi de la démographie est le transfert des affaires d’un représentant plus expérimenté vers un représentant plus jeune. »
Stéphane Blanchette s’attaque au défi du transfert de volume en incitant les conseillers à réaliser où ils en sont dans leur carrière. Il classe en trois catégories les représentants :
- Il y a les éternels : ils s’estiment en croissance ils veulent continuer et ne pas ralentir. « Ils ne sont qu’un petit nombre. Ils ont une bonne organisation qui les supporte. Leur carrière est leur passion et leur vie. » Investia prévoit pour ces conseillers un plan de transition en cas d’événement malheureux, « pour que la clientèle puisse être prise en charge rapidement ».
- Le plus grand groupe rassemble les conseillers qui se demandent pourquoi ils vendraient leur bloc d’affaires, alors que continuer leur assure une certaine stabilité de revenu, observe M. Blanchette. Il constitue ce qu’il appelle son groupe moyen. Selon lui, les conseillers de ce grand groupe sont moins actifs dans le service à la clientèle. « Ils attendront les appels plutôt que de solliciter les clients. C’est un défi important. En même temps, ils sont notre bassin cible pour attirer les nouveaux conseillers. »
- En petit nombre figurent ceux que M. Blanchette appelle les cordonniers mal chaussés : ce sont des travailleurs autonomes qui doivent continuer de travailler pour maintenir « un certain niveau de vie ».
Stéphane Blanchette rappelle que les représentants en épargne collective reçoivent principalement des revenus sur leur volume d’affaires. « On croit que la nouvelle génération devra accumuler plus d’actifs que les précédentes pour avoir un bon niveau de vie. »
Le haut dirigeant d’Investia veut donc briser l’équation selon laquelle avoir plus d’actifs signifie plus de clients et plus de travail, « alors qu’il n’y a que 24 heures dans une journée ». Il salue chaque avènement technologique qui permet de briser cette équation, et croit que maximiser ces technologies sera un gage de succès.
L’accompagnement avant le produit
Selon Stéphane Blanchette, la valeur du conseil ne doit pas se réduire à recommander un produit. « Je crois énormément à la valeur du conseil. Souvent, on la limite au niveau de la catégorie ou de la nature de l’investissement. La valeur du conseil avec un grand “C”, c’est d’abord et avant tout d’accompagner le client dans plusieurs étapes de sa vie, et d’être disponible lorsqu’arrive un événement malheureux. »
Il observe que le client a accès à un nombre croissant de sources d’information sur les placements : « trier les sources très fiables des sources boiteuses s’avère de plus en plus difficile », ajoute-t-il. Si au moment d’un événement difficile, les clients ont le réflexe de consulter une de ces sources plutôt que de parler à la bonne personne, ils risquent de perdre une partie de leur patrimoine, « parce qu’ils sont mal accompagnés », croit M. Blanchette.
Le vice-président exécutif d’Investia a cité au passage une statistique selon laquelle 80 % des investisseurs en fonds communs estiment que leur conseiller favorise de meilleures habitudes d’investissement. Elle est tirée du sondage Pollara 2021 de l’Institut des fonds d’investissement du Canada (IFIC), réalisé auprès des investisseurs en fonds communs de placement au Canada. On peut aussi lire dans le rapport que 42 % sont tout à fait d’accord avec cette affirmation, et que 38 % sont plutôt d’accord.
Cette statistique réaffirme d’après M. Blanchette l’importance d’un conseiller disponible et apte à créer les bonnes habitudes d’investissement.
Démontrer sa valeur grâce à la technologie
La grande transformation dans l’industrie selon lui ? « Que le client trouve l’information dont il a besoin 24 heures sur 24, 7 jours par semaine, et puisse aussi s’appuyer sur son conseiller quand il le veut, de la façon dont il le veut et avec le véhicule de son choix. » C’est là que les nouvelles technologies entrent en jeu : en permettant par exemple de répondre rapidement au client par message texte.
Avec tout cet environnement technologique, nous avons une belle occasion de vendre la force et la valeur du conseil, et non pas la limiter uniquement à la portion de l’investissement », insiste Stéphane Blanchette.