Le 18 mai dernier, le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière a déclaré le conseiller José De Trinidad (certificat no 198 722, BDNI no 2903381) coupable du seul chef de la plainte. La sanction sera déterminée à la suite d’une prochaine audience.
Dans la région de Québec, entre mars 2013 et avril 2018, l’intimé a contrefait la signature de sa cliente sur un document manuscrit, contrevenant ainsi à l’article 16 de la Loi sur la distribution de produits et services financiers.
Le comité estime que le plaignant a prouvé la culpabilité de l’intimé en se basant sur les aveux extrajudiciaires de ce dernier, faits en mai 2018, de même que l’aveu judiciaire de l’intimé lors de son témoignage durant l’audience tenue en novembre 2020. Le document dont il a contrefait la signature portait sur la situation financière de la cliente datée du 20 mars 2013.
Procédures nombreuses
L’intimé, qui se représentait seul, a tenté d’obtenir l’arrêt des procédures dans cette affaire. Les 318 premiers paragraphes de la décision du comité (sur 56 pages) sont consacrés à cette requête. Le comité prononce plusieurs ordonnances de non-publication sur de nombreux éléments mis en preuve.
Parallèlement à cette requête en arrêt des procédures, le comité de discipline a aussi eu à trancher différentes demandes en cassation de citations à comparaitre. L’intimé voulait faire témoigner de nombreuses personnes associées au bureau du syndic ou pour la Chambre.
L’intimé a été interrogé le 25 mai 2018 et il prétend qu’on a fait pression sur lui pour lui soutirer des aveux. Or, il n’y a aucune trace des de ces abus ni dans les notes de la rencontre, ni dans les enregistrements. Selon lui, cela ne peut s’expliquer que par la falsification. En novembre 2019, le plaignant a reconnu qu’il ne pouvait fournir les fichiers originaux, car ils ont été perdus à la suite d’une panne du réseau informatique.
L’intimé a soumis cette requête en se basant sur divers motifs. Selon lui :
- le syndic ment délibérément au comité ;
- le syndic refuse de fournir les documents originaux ;
- les fichiers de l’entrevue ont été falsifiés ;
- les enquêteurs ont abusé de ses droits.
Le 8 octobre 2020, le comité a rejeté les demandes en cassation de citations à comparaitre et a permis le témoignage du syndic Gilles Ouimet et de Valérie Sauvé. Le 13 novembre 2020, le comité a ordonné la non-publication du témoignage de Jacques Houde pour toute information portant sur la description, la configuration, la gestion et le fonctionnement des équipements informatiques de la Chambre, de même que sur les mesures mises en place pour les protéger.
Le témoignage de Christian Faubert, vice-président aux services corporatifs, responsable de la division des technologies de l’information, est aussi frappé par une ordonnance de non-publication.
Entre le dépôt de la plainte au printemps 2019 et le 30 juin 2020, un membre de la formation du comité de discipline a dû se désister en délibéré de la demande de récusation. Le président du comité de discipline a dû mandater une nouvelle formation pour entendre le dossier et les requêtes multiples de l’intimé.
Des aveux
La décision rendue le 18 mai dernier résume les débats de la requête en arrêt des procédures et de l’audition sur culpabilité de l’intimé, tenue en novembre 2020.
Deux enquêteurs du syndic ont témoigné de l’entrevue tenue avec l’intimé le 25 mai 2018. Ils ont confirmé que celle-ci avait duré environ quatre heures. L’intimé aurait alors admis avoir contrefait la signature de la cliente étant donné qu’il avait besoin d’un document pour être en mesure de répondre aux questions du service de la conformité de London Life.
L’intimé a d’ailleurs témoigné qu’il n’y avait pas d’analyse de besoins financiers au dossier de la cliente pour motiver la proposition d’assurance vie. Il a d’abord soumis un aveu de culpabilité après avoir parlé à son agent général. En prenant connaissance de la preuve divulguée et en visionnant la vidéo de l’entrevue, il n’y a pas retrouvé la séquence de l’incident où il affirme avoir été victime de la pression des enquêteurs. Convaincu que le fichier avait été altéré, il a changé son plaidoyer.
Les enregistrements vidéo et audio ont été déposés en preuve. Les enquêteurs ont évidemment nié avoir menacé l’intimé pour obtenir ses aveux. Le témoignage d’une experte mandatée par l’intimé n’a pas permis au comité de conclure à l’existence d’une falsification des fichiers.
Valérie Sauvé a souligné qu’il y a eu des pannes électriques sporadiques causées par la construction du Réseau électrique métropolitain REM) et qu’elle était responsable de protéger le système informatique de la Chambre lors de ces pannes. La panne de l’automne 2018 n’a pas affecté les fichiers de l’entrevue du 25 mai 2018.
Gilles Ouimet a de son côté témoigné qu’il ne pouvait remettre les fichiers originaux demandés par l’intimé parce qu’ils n’existent pas. À propos de la prétendue falsification des fichiers, le syndic considère les prétentions de l’intimé comme étant « farfelues et sans fondement ».
Rejet de la requête
Le comité rejette la requête en arrêt des procédures et consacre une vingtaine de pages à son analyse. Le comité ne croit pas la version de l’intimé. Il a pris soin d’écouter les deux versions de l’enregistrement du 25 mai 2018.
Lors de sa première requête soumise en février 2020, laquelle a plus tard été amendée, l’intimé alléguait que l’un des enquêteurs l’avait « menacé et intimidé à répétition et avec énergie. L’enquêtrice qui prenait des notes a été témoin de ces abus et n’a rien fait », écrivait-il dans sa requête en précisant qu’il n’était alors pas accompagné par un avocat.
Dans son témoignage, la nature et la description de la prétendue menace faite par l’intimé contredisaient ses propos tenus dans la première requête. Et à la fin de l’entretien, l’intimé ne donne aucunement l’impression d’avoir été menacé ou d’être intimidé.
La théorie de l’intimé sur l’existence des fichiers originaux des enregistrements « n’est aucunement supportée par la preuve et est basée uniquement sur des soupçons et des spéculations », écrit le comité au paragraphe 309.