Dans un mémoire qu’il a déposé le 1er mai 2024 à la Commission des finances publiques en vue de l’étude détaillée du projet de loi no 30, Plan Major réclame le droit des associations étudiantes à autoassurer les régimes collectifs qu’elles offrent à leurs membres. Le projet de loi no 30 est la Loi modifiant diverses dispositions principalement dans le secteur financier.
Courtier et administrateur d’assurance collective, Plan Major se spécialise dans l’assurance collective aux étudiants en santé et en soins dentaires. Plan Major dit en desservir plus de 200 000, à travers 35 associations. Plan Major est présidé par son fondateur Louis-François Major, aussi président fondateur du courtier et administrateur de régime d’assurance collective Groupe Major, actif auprès des entreprises. Plan Major offre une couverture d’assurance en médicaments, soins complémentaires, oculaires et dentaires, accident et voyage.
Rédigé par Thomas Briand Gionest et Alpha Diallo, respectivement vice-président exécutif et directeur principal de la tarification de Plan Major, le mémoire demande au gouvernement du Québec de rétablir le droit des associations étudiantes québécoises à l’autoassurance. Un droit « qui semble avoir été oublié au moment de l’adoption du projet de loi 141 », soutiennent-ils. MM. Gionet et Diallo ont tous deux présidé des associations étudiantes par le passé.
La Loi visant principalement à améliorer l’encadrement du secteur financier, la protection des dépôts d’argent et le régime de fonctionnement des institutions financières a été adoptée le 13 juin 2018.
Aucun encadrement avant 141
Avant l’adoption de cette loi en 2018, le mémoire de Plan Major fait valoir que le droit à l’autoassurance n’était pas encadré. Le mémoire relate que certaines associations étudiantes ont instauré à cette époque des régimes d’assurance collective autoassurés pour leurs membres.
Le mémoire en donne les exemples suivants : l’Association générale étudiante du campus de Rimouski de l’Université du Québec à Rimouski (AGECAR), l’Association générale des étudiants de l’Université du Québec à Trois-Rivières (AGEUQTR) et l’Association générale des étudiants hors campus de l’UQTR (AGEHCUQTR).
« Suivant les modifications législatives de 2018, les associations étudiantes ont perdu ce droit », déplore Plan Major dans son mémoire. Ses auteurs ajoutent que l’Autorité des marchés financiers a par la suite demandé que le régime de ces associations soit pris en charge par un assureur, « malgré la stabilité financière des dits régimes qui étaient à l’avantage des étudiantes et des étudiants » (voir l’intertitre Une saga qui échoue en Cour suprême).
Selon eux, l’autoassurance permet que les profits tirés d’un régime collectif appartiennent aux étudiants plutôt qu’aux assureurs, et « crée un rapport de force pour les associations étudiantes » pour obtenir une tarification avantageuse. Ils demandent à Québec d’autoriser à nouveau l’autoassurance des régimes des associations étudiantes, et leur structure financière lorsque le régime est administré par un cabinet encadré par l'Autorité.
L’encadrement se resserre
Pendant ce temps, le législateur s’apprête à resserrer les textes de loi encadrant l’association d’assurance. Des amendements qui touchent les associations d’assurance ont été apportés à la Loi modifiant diverses dispositions principalement dans le secteur financier (Projet de loi 30). Nulle mention des associations étudiantes.
Des amendements introduiront la notion d’association d’assurance dans la Loi sur les assureurs. Par exemple un amendement à l’article 37 du Projet de loi 30 vient modifier le paragraphe 2.1 de l’article 213 de la Loi sur les assureurs pour exiger qu’une association d’assurance ait un plan d’affaires et des projections financières pour une période de trois ans.
Une saga qui échoue en Cour suprême
En novembre 2021, l’Autorité avait obtenu de la Cour supérieure une injonction permanente à l’encontre de deux associations étudiantes, soit l’AGEUQTR et l’AGEHCUQTR. Les deux associations avaient dû cesser d’offrir le régime d’assurance collective Plan Major à leurs membres. Le tribunal avait aussi interdit à Plan Major d’agir comme tierce partie.
Les deux associations ont fait appel de cette décision, mais la Cour d’appel a tranché en faveur de l’Autorité, estimant solide la décision de la juge de première instance, Claudia P. Prémont.
Elle avait entre autres statué que le contrat entre les associations et les étudiants n’est pas de l’autoassurance, car les étudiants n’assument pas le risque. Le risque est plutôt transféré aux associations, qui assurent les étudiants en retour du paiement d’une prime.
La juge de la Cour supérieure a rappelé l’article 21 de la Loi sur les assureurs, selon lequel l’activité d’assureur requiert l’autorisation du régulateur si elle implique d’exploiter une entreprise, sans égard aux autres activités que peut exercer l’exploitant.
En mai 2023, l’AGEUQTR a demandé à être entendue par la Cour suprême. Le plus haut tribunal du pays a rejeté sa demande le 14 décembre 2023.