Alors que le marché canadien de l’assurance fait face à des turbulences ces jours-ci, les assureurs s’en sortent mieux que bon nombre de leurs homologues à l’étranger, dit A.M. Best.

Au Canada, les compagnies d’assurance vie sont mieux capitalisées et interviennent de façon plus prudente que leurs homologues américains, du fait qu’elles se sont diversifiées à l’étranger en plus de prendre une place grandissante en gestion de patrimoine, a mentionné Ed Kohlberg, directeur adjoint d’A.M. Best, lors de la publication du dernier rapport sur l’assurance publié par la firme de notation.

Il n’en demeure pas moins que la faiblesse des taux d’intérêt, les problèmes de réglementation et la fluctuation de la valeur du dollar exercen Imprimert une certaine pression sur les compagnies canadiennes d’assurance vie, précise-t-il.

« Les compagnies préservent leurs marges et leurs objectifs de marge, mais est-ce que tout cela sera touché si les taux restent bas durant un bout de temps, s’interroge M. Kohlberg. Au cours des dernières années, les assureurs ont misé sur certains leviers permettant de préserver ces marges, mais pourront-ils continuer de le faire ? »

M. Kohlberg a tenu ces propos quelques minutes à peine avant que la Banque du Canada relève son taux d’intérêt de base de 0,25 point à 1 %, ce qui constitue une deuxième hausse de 0,25 point de base depuis juillet. Or, les experts avaient prévu qu’une telle hausse n’avait que 26 % de chances de se produire, signale M. Kohlberg. Elle a été décrétée par la Banque dans la foulée d’un récent rapport de Statistique Canada affirmant que l’économie avait enregistré une hausse de 4,5 % au deuxième trimestre. Elle s’est faite parallèlement à une augmentation de la valeur du dollar canadien, dont le taux de change est passé à 81,54 $ US ce jour-là.

La faiblesse des taux d’intérêt a bien sûr une incidence sur le marché de l’assurance. « Cela a une importance aux yeux d’une agence de notation, mais ce n’est pas tout ce qui compte », fait remarquer Anthony McSwieney, analyste financier principal de la division assurance vie chez A.M. Best.

Perspective de notation « stable »

Le marché canadien de l’assurance vie a malgré tout une perspective de notation « stable », alors qu’elle est négative chez ses homologues américains, tout comme du côté du marché des rentes, soutient le rapport d’A.M. Best. Chez nos voisins du Sud, l’industrie a été marquée par une volatilité croissante tant sur le plan économique que réglementaire, sans compter la pression constante des taux d’intérêt. Au Canada, l’industrie a su stratégiquement maintenir ses couts à un faible niveau et revoir le prix des produits existants, explique toutefois le rapport.

M. McSwieney estime que si Canada se dirige vers une croissance d’environ 3 % au présent exercice, l’arrivée de deux ou trois autres hausses des taux d’intérêt ne ferait pas de bien aux épargnants et entrainerait, aux yeux des agences de notation de crédit, de la volatilité en matière de couverture et de macro-couverture.

L’un des principaux avantages du marché canadien de l’assurance vie et de l’assurance maladie est qu’il connaît une croissance à l’étranger, fait remarquer M. Kohlberg. Des compagnies comme Manuvie, Sun Life et Great-West Lifeco y sont présentes depuis de nombreuses années et très connues, si bien que les nouveaux venus ont du mal à se faire une place au soleil.

À cet égard, il mentionne la division américaine de Manuvie, qui a fait l’acquisition des intérêts de New York Life dans le secteur des régimes de retraite il y a deux ans et qui poursuit sa croissance en Asie. De même, Financière Sun Life parachevait l’an dernier son acquisition des régimes d’avantages sociaux d’Assurant aux États-Unis, faisant de Sun Life United States le sixième groupe en importance du secteur des avantages sociaux aux États-Unis. Enfin, en 2016, la filiale irlandaise de Great-West Lifeco a obtenu la mainmise de GloHealth Financial Services, ce qui a fait grimper sa clientèle du marché irlandais de l’assurance maladie.

Dans le monde de l’assurance vie, les modifications de nature réglementaire ont toujours beaucoup de portée, ajoute M. Kohlberg. Il donne en exemple les nouvelles exigences en matière de fonds propres – officiellement appelées « Examen dynamique de suffisance du capital – assurance vie » ou EDSC — qui remplaceront le Montant minimal permanent requis pour le capital et l’excédent (MMPRCE) le 1er janvier 2018. Il mentionne que les règles entourant l’EDSC ne devraient pas faire augmenter le montant de capital exigé, sauf que certaines branches d’activité seront probablement davantage touchées par les nouvelles façons de faire. À son avis, cette réalité amènera peut-être des assureurs à en réévaluer l’intérêt financier.