Le cout des assurances médicales augmente à un rythme qui excède de deux à trois fois l’inflation et on s’attend à des hausses de couts de 130 % d’ici 2025. Par ailleurs, 47 % des participants à une assurance collective s’en disent insatisfaits.

Combien d’entreprises seraient en affaires en 2019 si 45 % de leurs clients étaient insatisfaits de leurs services, s’est demandé Danny Boulanger, président-directeur général de Segic, à l’ouverture d’un congrès consacré à l’autogestion et la santé collective tenu pour la première fois à Québec le 10 avril dernier.

« Si on partait avec une page blanche, est-ce que le modèle d’affaires que l’on connait dans le domaine de l’assurance collective serait le même ? Beaucoup de gens disent que probablement non », a-t-il souligné.

Si tous sont probablement conscients du problème et des enjeux auxquels le secteur est confronté, combien ont entrepris les transformations pour y faire face ? La réaction de plusieurs, observe-t-il, c’est que l'oncontinue à maintenir le modèle actuel tout en l’amenuisant : on magasine les fournisseurs d’assurance et on tente de les saigner, on enlève le paiement direct, on retire des services, on transfert des couts de l’employeur à l’employé, on coupe l’assureur et pour compléter, on coupe le courtier !  

Le PDG de la plateforme technologique Segic a cité en exemple l’industrie du taxi qui a fini par heurter un mur parce qu’elle n’a pas su évoluer et se transformer. Les typographes sont aujourd’hui totalement disparus en raison du virage technologique. Le secteur de l’assurance collective doit en faire autant.

« Ce que l’on entend, c’est que le modèle actuel doit muter, a plaidé Danny Boulanger devant plusieurs dizaines de représentants du secteur de l’assurance collective réunis au Hilton Québec. On doit se réinventer. Les modèles ne peuvent être permanents, ils doivent migrer vers des modèles les plus performants. »

Les avantages de l’autogestion

L’avenue qu’il propose, c’est l’autogestion, qui ne doit pas être confondue avec l’autoassurance, un aspect sur lequel a élaboré le conférencier qui l’a suivi, Philippe Laflamme, directeur et responsable de la pratique en assurance collective à Montréal chez Eckler. Mais l’autogestion et l’autoassurance sont deux choses complètement différentes, a-t-il tenu à rappeler.

L’autogestion présente un gros avantage, a dit Danny Boulanger : je conserve mes données, peu importe si je change d’assureur. Mais le besoin en assurances demeure. Pourquoi ?

« Le gouvernement du Québec n’assure pas la vie. J’ai besoin du DMA, d’invalidité long terme, d’assurance voyages, peut-être même de faire des ventes croisées : nous sommes 1 000 dans notre entreprise : puis-je avoir un meilleur prix pour mon assurance maison et automobile ? En ce qui concerne la santé, j’ai aussi besoin potentiellement de gérer un risque. »

« En autogestion, je suis protégé au niveau des risques, alors on peut aller plus loin et commencer à parler de prévention et de mieux-être. Tout le monde aura accès à un médecin de famille, on disposera d’un programme de nutrition, on va aider les gens pour s’assurer qu’ils gèrent bien leurs finances, car je ne veux pas qu’ils soient stressés au bureau par leurs problèmes financiers, mais qu’ils soient productifs », ajoute M. Boulanger. On parlera de l’activité physique, des politiques de gestion, des habitudes de vie. L’idée, résume-t-il, c’est de développer une boîte à outils en santé pour permettre de supporter nos besoins. 

Les avantages pour un preneur de régime

L’autogestion procure des avantages compétitifs pour les preneurs de régimes. C’est une valeur ajoutée pour le recrutement et la rétention de la main d’œuvre parce que c’est encore peu répandu. « Dans dix ans peut-être, tout le monde offrira la santé collective. Mais aujourd’hui, c’est un avantage compétitif. Certaines entreprises la verront comme un cout et la traiteront comme une dépense qu’elles vont essayer de réduire. C’est une mauvaise approche », dit Danny Boulanger. 

« La santé collective, c’est un investissement dans une organisation, pas une dépense, martèle-t-il. Il faut cibler les enjeux réels de l’organisation, absentéisme, présentéisme, maladies mentales, les maladies chroniques, la productivité. Il faut aussi réduire les couts associés, mais le faire avec une stratégie. »