Plusieurs firmes spécialisées ont fait part de leurs perspectives à l’égard du marché de l’industrie de l’assurance responsabilité et dommages (IARD) pour l’année 2025. Les sinistres liés aux événements météorologiques extrêmes demeurent une préoccupation constante des auteurs de ces divers rapports.
Dans ses perspectives 2025 portant sur l’Amérique du Nord, Hub International suggère des recommandations aux dirigeants d’entreprises en matière de gestion des risques, d’assurance et d’avantages sociaux.
Quelque 900 chefs d’entreprises au Canada et aux États-Unis, provenant de 11 secteurs d’activité distincts, ont participé à l’enquête. Parmi les risques qui peuvent affecter la rentabilité des entreprises en 2025, parmi les plus cités, les changements climatiques et les catastrophes naturelles arrivent en troisième place à 45 % et la cybersécurité est en quatrième place à 44 %.
Dans une note publiée le 12 décembre dernier, l’agence de notation Morningstar DBRS prévoit que de manière générale, la note de crédit des assureurs de dommages du Canada montre des perspectives stables pour l’année 2025, sauf si l’industrie connaît encore une série de sinistres majeurs comme ceux connus au troisième trimestre de 2024.
« Les assureurs IARD notés par Morningstar DBRS ont fait preuve de stabilité et d’un profil de crédit résilient, aidés par l’amélioration des rendements des investissements et des mesures tarifaires antérieures, en particulier sur le marché de l’assurance de biens personnels, où les pertes liées aux conditions météorologiques ont eu l’impact le plus négatif. Nous prévoyons une hausse des prix de la réassurance, une augmentation de la rétention des risques, une moindre contribution des revenus de placement aux bénéfices et une augmentation des primes d’assurance de biens en 2025. En revanche, le rythme des hausses de prix continue de ralentir dans certaines branches commerciales », indiquait l’agence.
« Par exemple, Munich Re, le plus grand réassureur mondial, a déclaré à peu près le même montant de pertes résultant des catastrophes naturelles au Canada au troisième trimestre 2024 que celles causées par un ouragan majeur aux États-Unis (ouragan Helene), ce qui témoigne de l’ampleur inhabituelle des catastrophes naturelles au Canada », ajoutait Morningstar DBRS.
De son côté, dans ses perspectives pour 2025 pour le marché canadien, Gallagher Re souligne lui aussi l’impact important des sinistres majeurs survenus au Canada en 2024. Le réassureur rapporte que « les récents résultats catastrophiques ont suscité un examen plus approfondi de la tarification des risques secondaires et des ajustements continus des retenues de réassurance, ce qui a entraîné de nouvelles augmentations pour les programmes qui n’avaient pas apporté les changements nécessaires au cours des années précédentes en fonction de leur exposition sous-jacente ».
Le magasinage
L’Institut de recherche de Capgemini a aussi récemment publié ses perspectives de 2025 pour l’industrie de l’assurance responsabilité et dommages (IARD). Parmi les tendances soulevées, les auteurs du rapport insistent sur l’expérience client. Ils notent que « les assureurs reconstruisent les expériences, les parcours et les offres autour des clients pour maximiser les taux de réussite, les ventes croisées et les ventes incitatives ».
Capgemini estime qu’il en coûte cinq fois plus cher pour trouver un nouveau client que pour en conserver un. Quelque 63 % des assurés se disent prêts à fournir plus de données sur leurs habitudes si cela leur permet d’obtenir une couverture plus transparente et à meilleur prix.
En assurance des particuliers, Capgemini rapporte que plus du quart (27 %) des détenteurs de polices changent de fournisseurs après deux années, principalement pour réduire leurs primes ou obtenir une meilleure couverture. « Les assureurs devraient déplacer leur attention des hausses de tarifs vers la conservation et l’élargissement de leur base d’assurés existante, sinon la viabilité de leur entreprise sera menacée », indiquent les auteurs.
Zones inondables
Le passage des restes de l’ouragan Debby au Québec, le 9 août dernier, a relancé sur l’admissibilité au programme général d’aide financière du gouvernement du Québec. Les dégâts causés par les refoulements d’égouts sont toujours exclus, même si le gouvernement Legault avait ouvert la porte dans les jours qui suivaient.
Ce sinistre majeur a aussi réouvert le débat sur la reconstruction à l’identique prévu dans les contrats d’assurance. Quand le même immeuble est frappé plus d’une fois par une inondation pluviale ou le débordement d’un cours d’eau, cette mesure n’a pas beaucoup de sens. Les assureurs pourraient ajuster leur offre et offrir des rabais aux assurés qui prennent les moyens pour mitiger leur risque.
Le programme national d’assurance contre les inondations devait voir le jour en 2025, mais la prorogation des travaux parlementaires à Ottawa jusqu’à la fin mars de même que la tenue très probable d’un scrutin au printemps pour élire les députés aux Communes reportent le lancement du programme. Après les inondations survenues dans les régions métropolitaines de Toronto et de Montréal l’été dernier, le Bureau d’assurance du Canada a à chaque fois demandé au gouvernement fédéral d’aller de l’avant et de créer ce programme d’assurance inondation.
De nombreuses municipalités et leurs contribuables attendent avec impatience la publication définitive de la cartographie des zones inondables. Comme on a pu le voir à la suite des inondations survenues à Baie-Saint-Paul en mai 2023, l’impossibilité de trouver une couverture d’assurance abordable peut forcer les propriétaires à démolir leur résidence et à se reloger ailleurs.
La nature
Dans un récent blogue, le Bureau de l’Organisation des Nations Unies pour la mitigation des désastres (UNDRR) rappelle aux médias pour qu’ils cessent d’utiliser l’expression « désastres naturels » ou « catastrophes naturelles ».
Pour apprendre à mitiger les dommages causés par les événements extrêmes, « il faut commencer par admettre qu’il n’existe pas de “catastrophe naturelle”. L’adjectif “naturelle” implique que ces événements sont entièrement hors de notre contrôle, ce qui nous décharge de notre responsabilité de nous préparer et de réduire les risques liés aux catastrophes naturelles », indiquait l’UNDRR.
En juillet dernier, dans un rapport publié par un groupe d’investisseurs activistes, on soulignait que de nombreux assureurs canadiens sont présents dans l’industrie des hydrocarbures. La contribution de ce secteur au réchauffement du climat ne soulève plus de débat. Comme le soulignait un porte-parole du BAC, à partir du moment où « un risque devient prévisible, il n’est plus assurable ».
Certains assureurs ont défendu leur plan de transition climatique, mais après l’été catastrophique vécu au Canada en 2024, et les hausses de primes qui pourraient en découler, il faudra voir si la pression des assurés et des investisseurs fera réagir les institutions financières concernées.
De son côté, le World Resources Institute indique les dommages liés aux événements extrêmes iront en augmentant au fur et à mesure que le climat continuera de se réchauffer. L’Organisation météorologique mondiale (OMM) exprime la même inquiétude pour la santé humaine en raison de la qualité de l’air qui se détériore. On le constate dans les localités qui subissent la fumée de feux de forêt.
L’encadrement de l’industrie
Yves Ouellet a été nommé PDG de l’Autorité des marchés financiers en juillet 2023 et il est entré en fonction à la fin du mois d’août 2023. Depuis ce temps, il n’a accordé aucune entrevue aux médias. Les demandes d’entrevue faites par les journalistes des Éditions du Journal de l’assurance au printemps et à l’automne 2024 ont été déclinées.
M. Ouellet a fait une allocution lors du Rendez-vous de l’Autorité tenu le 12 février 2024, et il a alors répondu à quelques questions d’un journaliste du quotidien La Presse qui assistait à l’événement. Il a aussi été présent au Sommet sur la finance durable tenu à la mi-mai. Sinon, il n’a fait aucune autre sortie publique, aucun discours devant un auditoire de l’industrie de l’assurance, contrairement à son prédécesseur, présent sur de nombreuses tribunes.
Yves Ouellet sera l’un des conférenciers présents devant les membres du Cercle canadien de Montréal en 2025, où sa présence est prévue le 2 juin prochain. D’ici là, nous allons renouveler nos demandes d’entrevue à l’Autorité, car les sujets d’intérêt sont nombreux, notamment sur la réorganisation des directions qui a eu lieu depuis l’arrivée du nouveau PDG.
Le Fonds d’indemnisation des services financiers continue d’accumuler des surplus, tandis que les indemnités versées ne cessent de diminuer. Or, le Fonds est alimenté par des cotisations payées par les représentants certifiés.
Les trois projets de règlement encadrant la profession d’expert en sinistre et l’utilisation des surnuméraires non certifiés lors de sinistres majeurs ont été déposés pour consultation publique en octobre 2024. On attend toujours leur approbation par le ministre des Finances et leur publication dans La Gazette officielle du Québec pour déterminer si la consultation a modifié le contenu des trois règlements. Ces changements découlent du projet de loi 30 adopté en mai 2024.
Parmi les autres changements apportés par le projet de loi 30, le gouvernement a annoncé la fin de la distribution sans représentant de l’assurance de remplacement par les concessionnaires automobiles, désormais prévue au 1er juillet 2026. On peut s’attendre à des annonces à cet égard de la part des assureurs ou du réseau de distribution en cours d’année 2025.
Du côté de la Chambre de l’assurance de dommages, il y a eu du roulement à la tête du bureau du syndic en 2024. L’actuel titulaire du poste est entré en fonction le 2 décembre dernier. Sébastien Tisserand devient la troisième personne à occuper officiellement la fonction depuis mai 2022, sans compter les gens qui ont été nommés de manière intérimaire.
La consolidation
Les grands consolidateurs actifs dans le réseau de distribution par courtage, notamment Navacord, BrokerLink et Hub International, ont continué de multiplier les acquisitions en 2024, comme on a pu le voir dans ce récent bilan. Il n’y a pas de raisons de croire que cette tendance au regroupement ralentira en 2025.
Au Québec, comme cela avait été le cas au début de 2024, trois entreprises spécialisées dans la distribution par le réseau de courtage ou par l’entremise d’une agence dédiée à un assureur viennent d’unir leurs forces au début de 2025.
Il devient de plus en plus difficile pour les petits cabinets de courtage d’obtenir des contrats de distribution auprès de certains assureurs, lesquels imposent des exigences de volume. En conséquence, les courtiers doivent recourir à un grossiste comme intermédiaire auprès des assureurs. La tendance rapportée dans l’édition de mars 2024 du Journal de l’assurance devrait se poursuivre en 2025.