À défaut d’assurer les gens contre une perte personnelle, assurer l’environnement pourrait être une mesure d’adaptation aux changements climatiques envisageable pour de nombreux pays, croient les auteurs du rapport l’économie de la biodiversité : la revue Dasgupta, commandée par le gouvernement britannique, dirigé par l’économiste Partha Dasgupta de l’Université Cambridge et publié au début du mois de février.

L’idée poussée par les auteurs du rapport s’inspire de ce qui se fait en assurance habitation. C’est-à-dire le fait de remettre son habitation dans l’état initial qu’elle était avant un sinistre.

Dans le cas de l’assurance pour la nature, la prime d’assurance servirait alors à restaurer l’écosystème en cas de perturbation ou de dommages. Les chercheurs suggèrent par ailleurs que les gouvernements ou les municipalités soient administrateur de leur propre programme d’assurance publique. La prime serait récoltée à partir d’une taxe qui servirait à mettre de côté un fonds de restauration.

Ce modèle risque cependant de rencontrer un écueil important, admettent les chercheurs universitaires. Les gens n’auraient plus d’incitatif à souscrire une assurance privée et s’appuieraient presque exclusivement sur le programme gouvernemental, craignent-ils.

Un jour, les assureurs privés ne pourront plus suivre

Les gouvernements sont des investisseurs financiers clés dans les actifs naturels nationaux et étrangers, disent les chercheurs dans leur rapport. Les gouvernements peuvent canaliser les flux financiers à travers une gamme de mécanismes, modifier les structures d’incitation autour des investissements financiers, élaborer des politiques et entreprendre une réduction des risques financiers, ce qui peut augmenter le montant du financement privé investi dans les actifs naturels.

Avec le temps, la vulnérabilité des citoyens augmente. « Si des pays entiers devenaient vulnérables aux risques physiques dus à l’épuisement du capital naturel et que les couts de la cristallisation de ces risques devenaient élevés, les régimes d’assurance nationaux ne seraient probablement plus en mesure de soutenir à eux seuls de futurs événements extrêmes », mentionnent les chercheurs.

Pour les pays plus pauvres, les événements météorologiques extrêmes peuvent anéantir une partie importante de leur capital et de leur capacité de production et par incidence affecter les coffres et la résilience du pays. Un pool mondial de risques incluant des contributions de tous les pays pourrait aider à protéger les pays vulnérables contre de tels chocs à la suite d’événements extrêmes liés aux changements climatiques.

L’incertitude prévaut

La surconsommation et la surexploitation des ressources imposent un stress à l’écosystème. La possibilité d’une baisse de productivité et de catastrophe est alors plus probable. Même si les écosystèmes affichent des signes lorsqu’ils sont stressés, personne ne peut dire à quel moment le système atteindra un état ou la restauration sera trop difficile à récupérer. L’incertitude prévaut, disent les chercheurs. « Les sceptiques exploitent cette incertitude et affirment que les spécialistes de l’environnement crient trop souvent au loup », ajoutent-ils.

Et ce même si les événements météorologiques plus fréquents et davantage extrêmes, l’accélération des extinctions d’espèces animalière et la COVID-19 ont tous mis en évidence le fait que diverses parties de la biosphère sont maintenant surchargées.

Prendre les moyens pour renverser la vapeur entraine des couts, écrivent les chercheurs. Refuser d’agir pour changer de cap exposerait la société à la possibilité d’un changement qui infligerait des pertes sociales encore plus importantes.

Jusqu’à présent, plusieurs fonds mondiaux ont été créés pour mettre en œuvre des mesures d’atténuation et d’adaptation contre le changement climatique ; notamment pour réduire la dégradation de l’environnement. Les gouvernements accordent des subventions et mobilisent une combinaison de fonds publics et privés pour soutenir des projets de conservation et de restauration.

Par exemple, le gouvernement fédéral canadien et provincial britanno-colombien a annoncé la mise sur pied d’un programme visant à améliorer la biodiversité et à protéger les espèces en péril, le 25 février dernier. Les deux gouvernements exploreront de nouvelles façons de protéger et de restaurer l’habitat de la chouette tachetée, qui est menacée d’extinction, en renforçant la résilience des écosystèmes face aux changements climatiques.

S’inspirer de la réassurance

Il n’existe actuellement aucun régime d’assurance mondial pour la nature, mais il existe des exemples de régimes d’assurance régionaux et multipays pour les catastrophes environnementales comme l’African Risk Capacity (ARC) et le Caribbean Catastrophe Risk Insurance Facility.

Les deux programmes mettent en commun les risques entre les pays participants et permettent de réduire le coût des catastrophes causées par le changement climatique, les tremblements de terre et les ouragans. Ce genre de système qui fonctionne avec un pool de risques pour atténuer le risque climatique suivant les principes de la réassurance permet de réduire la perte d’un assureur en partageant le risque avec un ou plusieurs réassureurs.