De nombreuses plateformes numériques existent désormais pour appuyer les courtiers dans leur sollicitation et leurs interactions avec la clientèle. Newton Asare en a présenté quelques-unes lors de la conférence Insurtech, tenue le 13 avril dernier à Québec.
Le PDG et fondateur de la plateforme LiveBrokers.co, est aussi cofondateur de ClaimCast, ClientDesk, en plus d'être directeur des technologies et de l'innovation chez Dream Insurance. Dans tous les cas, les plateformes visent à assister le courtier dans la gestion des relations avec la clientèle, et aussi à assister les clients lors d’une réclamation, dit-il.
Incompréhension face à l’intelligence artificielle
Il y a beaucoup d’incompréhension concernant l’intelligence artificielle, les algorithmes d’apprentissage et les métadonnées, souligne M. Asare. Or, les principales fonctions du courtier sont de vendre des polices, de bien conseiller les clients et d’appuyer les victimes d’un sinistre.
Il existe déjà des outils numériques qui permettent au courtier de réaliser ces tâches, précise-t-il. Différentes méthodes existent pour numériser les activités d’un cabinet de courtage. Sur les 5 milliards de dollars US déjà investis dans les startups du secteur fintech, une bonne partie de ces sommes ont été consacrées à la distribution des produits, tant en assurance de dommages (17 %) qu’en assurance de personnes (11 %).
Des plateformes ont été lancées avec succès ces dernières années, souligne M. Asare en citant les exemples de League, axée vers la gestion de la santé des employés couverts par des régimes collectifs, ou de Dialogue, qui facilite l’accès aux professionnels de la santé.
Le rôle de l’intermédiaire
Certaines plateformes et applications semblent menacer l’existence même du courtage, mais il en existe d’autres qui visent à les appuyer dans leur travail d’intermédiaire. Newton Asare compare la situation du courtage à celle des agences de voyages, qui ont été ébranlées par les nouvelles plateformes de réservation sur l’Internet.
Entre 1999 et 2011, le nombre d’agences de voyages aux États-Unis a chuté de 72 %, et plus de la moitié des billets sont désormais réservés en ligne. L’industrie de l’assurance n’est pas à l’abri d’un pareil bouleversement, ajoute M. Asare.
Les courtiers qui numérisent leurs activités réussiront à passer au travers, estime-t-il. Cependant, il reste beaucoup de travail à faire. Le Centre d’étude de la pratique d’assurance (CSIO) mène une veille sur le degré d’avancement de l’industrie du courtage au Canada.
En 2017, seulement 150 cabinets de courtage, sur un total de 2 000 cabinets évalués, obtenaient la certification du CSIO pour la numérisation de leurs activités. « C’est un sérieux problème. D’ici la fin de 2018, la moitié des cabinets devrait détenir cette distinction, et c’est un minimum », dit-il.
Pour obtenir ce titre, il faut maitriser les éléments suivants : documents transmis de manière numérique, présence sur le réseau CSIOnet, signature électronique, plateforme de courtage en ligne, applications mobiles, utilisation des réseaux sociaux et d’un système d’optimisation des recherches en ligne (SEO), etc.
Plateformes
De nombreuses plateformes sont accessibles tant pour les ventes que le markéting ou le service à la clientèle. Du côté des ventes, BrokerLift permet au courtier de numériser les demandes de soumission, suggère Newton Asare. Les clients peuvent alors choisir leur assureur et payer leur prime directement par l’entremise du courtier. Pour l’instant, cette application vise particulièrement les courtiers qui offrent de l’assurance commerciale aux PME.
Pronavigator fonctionne avec un robot-conseiller et met en lien le consommateur avec un représentant en cas de besoin. En assurance auto et habitation, Applied Rater permet au courtier d’offrir un agrégateur qui compare les primes offertes par les différents assureurs.
Faciliter les interactions
D’autres applications existent pour faciliter les interactions entre le courtier et ses clients. On vise à faciliter la gestion des interactions avec la clientèle, par les différents canaux de communication, que ce soit une simple demande d’information ou pour transmettre les documents reliés à une réclamation. Outre ClientDesk, Newton Asare cite en exemple SharpMobile ou Applied Mobile Insurance. Plusieurs de ces plateformes sont offertes en français et en anglais.
En markéting, des outils permettent de solliciter de nouveaux consommateurs ou d’entretenir les liens avec les clients existants. Kanetix Digital et Pathway sont de bons exemples, indique M. Asare. Le courtier peut offrir du contenu personnalisé en fonction de la durée et de la nature de la garantie détenue par le client, ou encore selon les saisons.
L’assureur Travelers offre aussi une plateforme d’information à ses courtiers, Toolkit Plus. Tout le contenu est accessible gratuitement au courtier qui a placé un risque chez cet assureur.
Chez les assureurs
L’assureur Intact offre aussi une plateforme qui permet au courtier de mettre directement en lien le client avec le service d’indemnisation de l’assureur. Certains courtiers hésitent à le faire, reconnait-il, mais le système fonctionne très bien.
De nombreux systèmes de gestion du courtage (BMS) sont accessibles. Fin mars, l’assureur Aviva a remis ses distinctions en courtage numérique. Avec la collaboration du CSIO et des associations de courtage, il a ainsi évalué la performance des plateformes Applied Systems, Keal Technology, TechCanary, Power Broker et Broker Core pour une douzaine de critères.
« Selon moi, l’aspect le plus important est de choisir son BMS en fonction de sa capacité à intégrer les capacités existantes du courtier », indique-t-il.
La plateforme Guidewire est aussi très utilisée en assurance de dommages, ajoute Newton Asare, et offre une large variété de fonctionnalités au courtier.
La stratégie
Newton Asare rappelle qu’il n’est pas courtier lui-même, mais il peut conseiller les courtiers sur leur stratégie de numérisation. « Il faut de manière urgente automatiser les processus de vente des produits qui sont les moins profitables », insiste-t-il, comme c’est le cas pour l’assurance auto ou habitation.
Si l’entreprise n’a pas dans ses rangs l’expertise appropriée pour développer et maintenir fonctionnelle la plateforme, M. Asare suggère de recourir aux fournisseurs externes qui offrent des solutions intégrées, comme Plextec Insurance, Fortify Network Solutions, Insureline ou Prolink Broker Network.
Même Lemonade, firme considérée comme étant le pire ennemi des assureurs, offre depuis octobre 2017 une plateforme utilisable par tous les intermédiaires aux États-Unis. Les commerçants intéressés peuvent ainsi utiliser l’application pour offrir de l’assurance aux consommateurs.
Approche entièrement automatisée
Basée à Vancouver, Jauntin » utilise la même approche entièrement automatisée, axée principalement sur les besoins temporaires de couverture, comme on le voit dans l’économie collaborative.
Pour l’assurance de personnes et les produits financiers, Newton Asare propose la plateforme Finaeo, qui offre notamment un système de gestion des relations avec la clientèle (CRM) entièrement numérique. « Finaeo veut devenir le partenaire des conseillers financiers, pas leur ennemi », précise-t-il.
Certains assureurs veulent tirer profit de l’économie collaborative. L’assureur Aviva a ainsi annoncé en avril 2017 qu’il investissait 2,5 millions de dollars en capital de risque dans Casalova, dont la plateforme permet de louer ou d’acheter une résidence à distance. L’agence RDA agit comme courtier pour les besoins d’assurance et de financement des transactions faites par l’entremise de la plateforme.
Besoin d’une présence humaine
Pour le conseil et le service d’intermédiation entre le client et l’assureur, il y aura toujours besoin d’une présence humaine. « Il n’est plus nécessaire de se déplacer en personne pour offrir cette présence, c’est ce que la technologie nous permet désormais de faire », dit-il.
Newton Asare a présenté sa propre application de télécourtage, LiveBrokers.co, qui permet au courtier de discuter avec le client par l’entremise d’un téléphone mobile, sur le même principe que l’application FaceTime d’Apple. « Il existe de nombreuses applications qui visent à éliminer les courtiers, mais ce n’est pas le but de notre produit. Les courtiers ont déjà des clients ; nous voulons leur permettre d’interagir avec eux à moindre cout », conclut-il.