L’Autorité des marchés financiers a obtenu gain de cause en Cour supérieure, le 15 novembre dernier. Le tribunal a accueilli sa demande en injonction permanente à l’encontre de deux associations étudiantes de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) à propos de leur régime d’autoassurance. 

Les deux intimées par l’injonction sont l’Association générale des étudiants de l’UQTR (AGEUQTR) et l’Association générale des étudiants hors campus de l’UQTR (AGÉHCUQTR).

La décision rendue par la juge Claudia Prémont force les associations étudiantes à cesser, dans les trois mois, toute activité d’assurance visée à l’article 21 de la Loi sur les assureurs.

Ce délai, qui correspond à la période demandée par l’Autorité au tribunal, vise à permettre aux associations de contracter avec un assureur privé pour maintenir les couvertures offertes à ces membres. Les associations jugeaient ce délai comme étant déraisonnable et demandaient qu’on leur accorde jusqu’en septembre 2022 pour trouver un autre assureur. 

Les associations devront aussi rendre compte à l’Autorité de toutes les sommes accumulées dans leur régime d’autoassurance dans un délai de 30 jours suivant le jugement.

Le cabinet d’assurance Groupe Major, établi à Gatineau et exploitant aussi des bureaux à Québec et à Montréal, se voit aussi ordonner par le tribunal de cesser d’agir à titre de tierce partie administratrice à l’égard de tout régime d’autoassurance mis en place par les associations étudiantes dans les trois mois suivants le jugement. 

Les faits 

Avec l’aide du Groupe Major, les associations étudiantes ont mis sur pied un régime d’autoassurance afin d’offrir à leurs membres une assurance santé et dentaire complémentaire.

En septembre 2020, l’Autorité a envoyé au cabinet une mise en demeure visant à mettre fin à cette offre de régime. Devant l’impossibilité d’obtenir que cesse cette pratique qu’elle estimait dérogatoire, l’Autorité a demandé cette injonction permanente. 

L’Autorité alléguait que les associations étudiantes ont ainsi agi comme assureur sans détenir les autorisations requises à cet effet. Lorsqu’elles ont été interpellées à cet effet par l’Autorité, les parties intimées ont plutôt demandé à la Cour supérieure de leur confirmer qu’elles pouvaient offrir ces produits d’assurance.

Après son analyse, le tribunal conclut que les associations étudiantes agissaient à titre d’assureur pour les étudiants membres qui, après avoir payé leur prime, bénéficiaient d’une couverture d’assurance leur donnant droit à une prestation si le risque se concrétisait. 

Pas de l’autoassurance 

Les associations prétendent qu’elles n’agissent pas comme assureur, mais exercent l’autoassurance, activité parfaitement légale et non couverte par l’article 21 de la Loi sur les assureurs. De son côté, le tribunal estime que le contrat intervenu entre les associations et les étudiants n’est pas de l’autoassurance, puisque le risque n’est pas assumé par les étudiants, mais est plutôt transféré aux associations.

De plus, le tribunal estime que l’assurance offerte constituait une activité d’assureur dans le cadre de l’exploitation d’une entreprise. Les ententes intervenues entre les associations et le cabinet visaient un objectif économique préétabli, soit de bénéficier des profits qui auraient normalement été réalisés par l’assureur.

Enfin, les activités d’assurance ne constituent pas une activité épisodique et occasionnelle. Même en étant constituées sous la forme d’un organisme à but non lucratif, les associations étudiantes sont toujours tenues de demander l’autorisation de l’Autorité pour exercer l’activité d’assureur, conclut le tribunal. 

Activité rentable 

Le Portail de l’assurance a obtenu une copie de la décision du tribunal et a sollicité une réaction du Groupe Major. Louis-François Major s’est gardé de commenter l’affaire. Selon lui, les associations étudiantes réfléchissent toujours à la possibilité d’en appeler de la décision de la Cour supérieure. 

Le Plan Major offre une couverture de soins de santé, accident et voyage (86 $ par année) et une assurance dentaire (169 $) pour un coût total de 255 $ par année, payable en deux tranches à la session d’automne et celle de l’hiver. Ce sont 14 000 étudiants membres qui pouvaient profiter du programme, et ce, depuis 2014. 

On apprend dans le jugement que l’offre d’assurances à leurs membres a été profitable aux associations, qui en ont tiré un solde net supérieur à 500 000 $ pour l’AGEUQTR et de plus de 100 000 $ pour l’AGÉHCUQTR, et ce, pour l’année 2020.